Le polar espagnol, original et moderne, Marto Pariente

Idiot, idiot à demi

Marto Pariente, pour son premier roman paru dans la Série noire, renouvelle l’art du polar à l’heure des gadgets électroniques, de l’ADN qui parle trop et d’autres expédients pour tuer toute intrigue, objets qui ont du mal à pénétrer dans des petites bourgades apparemment bien tranquilles comme Ascuas. Tony Trinitad – référence sans doute aux westerns spaghettis de la grande époque de Cinecitta – est l’unique policier municipal dont l’emploi est périodiquement remis en cause par le maire ou un de ses adjoints et semble un peu limité, bas de plafond pour tout dire. Mais il faut se méfier et prendre le titre au pied de la lettre : « La sagesse de l’idiot » pour s’interroger. Tout est là. Les thèmes sont traditionnels dans notre monde étrange ou seul compte la richesse accumulée et peu importe les moyens, trafic de drogue, blanchiment, chantage, assassinats pour assurer son pouvoir. Les meurtres peuvent avoir d’autres causes, l’amour par exemple, la vengeance, les traumatismes d’une enfance volée… Habilement, l’auteur entremêle thèmes et raisons pour développer une histoire qui tient en haleine jusque la dernière ligne même si le retournement final a été préparé. La surprise est émoussée.
Il est conseillé de dépasser l’ennui qui sourd des premières pages dans la mise en scène de l’environnement et du personnage principal. Il est présenté comme il est vu par ses concitoyen.ne.s, et l’image est celle d’un incapable qui est là uniquement grâce à sa famille d’accueil, le style reflète cette vision. L’auteur sait faire évoluer son style en fonction des changements successifs d’images qui se succèdent dans l’esprit du lecteur.
Un portrait intelligent d’un idiot incarnant la sagesse d’un monde qui l’a totalement perdue. Une réussite.
Nicolas Béniès
« La sagesse de l’idiot », Marto Pariente, traduit par Sébastien Rutés, Série noire/Gallimard

Vrai ? Faux ? Faux-vrai ? Vrai-faux?

Idiot, idiot à demi

Marto Pariente, pour son premier roman paru dans la Série noire, renouvelle l’art du polar à l’heure des gadgets électroniques, de l’ADN qui parle trop et d’autres expédients pour tuer toute intrigue, objets qui ont du mal à pénétrer dans des petites bourgades apparemment bien tranquilles comme Ascuas. Tony Trinitad – référence sans doute aux westerns spaghettis de la grande époque de Cinecitta – est l’unique policier municipal dont l’emploi est périodiquement remis en cause par le maire ou un de ses adjoints et semble un peu limité, bas de plafond pour tout dire. Mais il faut se méfier et prendre le titre au pied de la lettre : « La sagesse de l’idiot » pour s’interroger. Tout est là. Les thèmes sont traditionnels dans notre monde étrange ou seul compte la richesse accumulée et peu importe les moyens, trafic de drogue, blanchiment, chantage, assassinats pour assurer son pouvoir. Les meurtres peuvent avoir d’autres causes, l’amour par exemple, la vengeance, les traumatismes d’une enfance volée… Habilement, l’auteur entremêle thèmes et raisons pour développer une histoire qui tient en haleine jusque la dernière ligne même si le retournement final a été préparé. La surprise est émoussée.
Il est conseillé de dépasser l’ennui qui sourd des premières pages dans la mise en scène de l’environnement et du personnage principal. Il est présenté comme il est vu par ses concitoyen.ne.s, et l’image est celle d’un incapable qui est là uniquement grâce à sa famille d’accueil, le style reflète cette vision. L’auteur sait faire évoluer son style en fonction des changements successifs d’images qui se succèdent dans l’esprit du lecteur.
Un portrait intelligent d’un idiot incarnant la sagesse d’un monde qui l’a totalement perdue. Une réussite.
Nicolas Béniès
« La sagesse de l’idiot », Marto Pariente, traduit par Sébastien Rutés, Série noire/Gallimard

Polars historiques, 1302 et 1941, un pas de géant

Le monde en 1302

« La tour maudite des Templiers » de l’autrice italienne Barbara Frale est un étrange roman. Etrange par l’érudition supposée par la caution de Umberto Eco, « C’est le livre que j’attendais, il est passionnant et d’une érudition sans faille », mort en 2016 pour ce livre paru en 2020… Petite entourloupe sans doute, Eco parle de son livre précédent « Les Templiers » permettant de s’interroger sur la place des fantômes qui prennent de la place surtout quand il s’agit de faire surgir un monde disparu.
Elle nous fait pénétrer dans la cour de Philippe IV dit le Bel – décrit comme tel – jouant de sa parenté avec Louis IX canonisé devenu Saint Louis lui permettant de s’opposer au pape, dans le Vatican de Boniface VIII et Dante en émissaire de Florence voulant éviter que sa Cité ne tombe aux mains des Français. Crescenzio et Madalena, frère et sœur, neveu et nièce du pape, mènent l’enquête pour percer le secret de Arnaud de Villanova, alchimiste – un chimiste pour employer le terme adéquat – qui a été au service du Roi de France mais ne veut plus avoir de contact avec lui. Une énigme leur est proposée, une sorte de rébus, pour pénétrer dans ce monde étrange. Les Templiers sont décrits comme partagés entre le grand maître Jacques de Molay obnubilé par la croisade pour reprendre Jérusalem et le reste plutôt attaché au roi de France mais qui s’interdit de remettre en cause le grand maître. « Abraxas » ici est le rébus à résoudre. Continuer la lecture

D’un tueur, cas de psychanalyste, à l’histoire sociale, deux formes du polar

La solitude du tueur de fond.
« L’agent seventeen », un titre qui ne laisse pas planer de doute sur le héros, ou plus exactement sur le personnage central qui ne nous laissera rien ignorer de ses doutes, de ses questionnements divers concernant tous les aspects de sa vie qu’elle soit professionnelle ou privée. A proprement parler, il envahit toutes les pages. Le thème est connu depuis Freud : tuer le père pour exister. Ici, 17 doit tuer 16 sur ordre de son supérieur à la CIA. Pourquoi ce meurtre ? Le tueur à gage s’interroge, nous pas tellement. On voit venir le coup. Pourtant là n’est pas l’intérêt de cette chronique violente. Il se trouve dans les glissements, dans les clins d’œil, dans les fausses références mais aussi dans les héros des films et romans d’espionnage, à commencer par Jason Bourne citée par l’auteur plus que James Bond. Continuer la lecture

Des nouvelles de Nesbo et la suite des aventures d’espion vues par Semenov

Des histoires au coin du feu
Le temps de cet automne ne dit rien sur l’hiver qui vient. Une saison propice aux contes, aux histoires qu’on se raconte pour se rapprocher d’un feu qui s’éteint. « De la jalousie », de Jo Nesbo, fait partie de cette panoplie. Des nouvelles qui se veulent révélatrices de notre monde, de nos comportements assez semblables finalement malgré les frontières. Continuer la lecture

Polar. La ville cauchemardée et l’amitié plus ou moins trompée

Chandler en slammeur.

Desmund Sasse est un curieux enquêteur, en marge et refusant toute compromission. Il tient beaucoup du détective privé créé par Raymond Chandler, Philip Marlowe. Une naïveté désabusée, plus rien et tout l’étonne. La confiance n’est jamais aveugle mais elle fait son œuvre pour s’engager dans des aventures qui sont celles d’autres mais dans lesquelles, à son corps défendant et de son plein gré, il s’engage. Continuer la lecture

Polars. Robin des bois et préservation des œuvres d’art sur fond de meurtres et de confinement

Arsène Lupin pas mort et Américain

Jeff Lindsay, le créateur de ce personnage singulier, « Dexter », tueur et policier, a décidé de changer de registre. Riley Wolfe est un voleur, tueur occasionnel et spécialiste du déguisement. Une personnalité bizarre, réellement sans définition sinon celle du moment et du personnage qu’il incarne, sans mémoire et sans émotions. Un être venu d’ailleurs. Pour cette première aventure, « Riley tente l’impossible » – un commencement qui ressemble à une fin – il se donne le défi de voler le diamant le plus cher du monde et le mieux gardé par les gardiens de la Révolution et par le FBI. Il réussit au prix d’un stratagème inédit et fondamentalement répréhensible moralement. Le personnage n’en est pas conscient uniquement préoccupé du but tandis que l’auteur y est sensible. Continuer la lecture

Quand les frontières se brouillent entre fiction et réalité… Afrique du Sud et États-Unis


La littérature permet d’appréhender les mécanismes sociaux et la manière dont les individus les vivent.

L’Afrique du Sud est une société où la corruption s’affiche à tous les étages. Deon Meyer s’en est fait une spécialité transformant ses polars en autant d’analyses politiques. Mike Nicol a choisi de prendre pour personnage principal, sa ville Le Cap, capitale administrative. Le meurtre du ministre de l’Énergie est la pointe visible de l’iceberg d’un trafic d’uranium enrichi. Vraisemblablement, l’assassinat a été commandité par une partie du gouvernement, sinon le président lui-même qui ne partageait pas les vues de son ministre s’orientant vers d’autres énergies, renouvelables, que le nucléaire. Derrière s’agitent toutes les officines plus ou moins secrètes, la CIA et même Daesh. « Infiltrée » pour décrire une espionne multi carte qui synthétise tous les brouillards enveloppant la réalité. Le polar et ses techniques est un guide efficace.
Jason Mott a choisi une autre voie pour faire entrer dans le monde étrange des États-Unis, particulièrement ce Sud – South Side – qui, actuellement, est en train de faire voter des lois pour empêcher les populations africaines-américaines d’exercer leur droit de vote. « L’enfant qui voulait disparaître » est une introspection, un dialogue entre un écrivain adulte et l’enfant qu’il a été. Ils veulent oublier la couleur de leur peau pour vivre « comme tout le monde ». Leur environnement politique leur refuse. La peur est leur compagne de tous les jours, de leurs nuits. Elle les empêche de vivre. Le titre original, « Hell of a book », l’enfer dans un livre, est peut-être plus clair même si c’est intraduisible. Un cri de révolte poétique pour sortir du piège. Les États-Unis dans toute leur horreur. L’avenir se trouverait-il dans les mobilisations autour de « Black Lives Matter » ?
Nicolas Béniès
« Infiltrée », Mike Nicol, traduit par Jean Esch, Série noire/Gallimard
« L’enfant qui voulait disparaître », Jason Mott, traduit par Jérôme Schmidt, Éditions autrement.

Littérature : Polar et Science fiction

La littérature se diversifie, lorgne vers le polar ou la science fiction lesquels affichent leur ambition d’être une des branche d’icelle. Le présent de l’édition donne quelques exemples. Continuer la lecture

Polar taïwanais


Vu de Taïwan (Taipei)

Chang Kuo-Li se lance dans le polar après avoir écrit une trentaine de livres. Comme une nouvelle naissance. « Le sniper, son wok et son fusil » indique que la cuisine sera aussi de l’intrigue. Alex, surnom venant de la légion étrangère, Ai Li pour l’état civil, participe d’une confrérie qui, comme les Yakusa, rassemble ses « fidèles », tatoués, par un contrat de confiance et une solidarité qui se veut à toute «épreuve. Ils et elles obéissent à celui qui les a formé.e.s et les a conduits au sens le plus fort, dans leur carrière et dans leur vie. A Rome, Alex doit assassiner un conseiller du président taïwanais. Pourquoi ? Alex sera obligé de se poser cette question, pourchassé qu’il est par des forces anonymes qui le traquent. La réponse est un gage de survie. Il est « aidé par l’inspecteur WU en fin de carrière qui cherche aussi le pourquoi de l’assassinat et n’accepte pas, malgré son départ à la retraite, de renoncer. Continuer la lecture