La littérature permet d’appréhender les mécanismes sociaux et la manière dont les individus les vivent.
L’Afrique du Sud est une société où la corruption s’affiche à tous les étages. Deon Meyer s’en est fait une spécialité transformant ses polars en autant d’analyses politiques. Mike Nicol a choisi de prendre pour personnage principal, sa ville Le Cap, capitale administrative. Le meurtre du ministre de l’Énergie est la pointe visible de l’iceberg d’un trafic d’uranium enrichi. Vraisemblablement, l’assassinat a été commandité par une partie du gouvernement, sinon le président lui-même qui ne partageait pas les vues de son ministre s’orientant vers d’autres énergies, renouvelables, que le nucléaire. Derrière s’agitent toutes les officines plus ou moins secrètes, la CIA et même Daesh. « Infiltrée » pour décrire une espionne multi carte qui synthétise tous les brouillards enveloppant la réalité. Le polar et ses techniques est un guide efficace.
Jason Mott a choisi une autre voie pour faire entrer dans le monde étrange des États-Unis, particulièrement ce Sud – South Side – qui, actuellement, est en train de faire voter des lois pour empêcher les populations africaines-américaines d’exercer leur droit de vote. « L’enfant qui voulait disparaître » est une introspection, un dialogue entre un écrivain adulte et l’enfant qu’il a été. Ils veulent oublier la couleur de leur peau pour vivre « comme tout le monde ». Leur environnement politique leur refuse. La peur est leur compagne de tous les jours, de leurs nuits. Elle les empêche de vivre. Le titre original, « Hell of a book », l’enfer dans un livre, est peut-être plus clair même si c’est intraduisible. Un cri de révolte poétique pour sortir du piège. Les États-Unis dans toute leur horreur. L’avenir se trouverait-il dans les mobilisations autour de « Black Lives Matter » ?
Nicolas Béniès
« Infiltrée », Mike Nicol, traduit par Jean Esch, Série noire/Gallimard
« L’enfant qui voulait disparaître », Jason Mott, traduit par Jérôme Schmidt, Éditions autrement.