Le printemps est là, celui des jazz et de la liberté.
Les festivals, pas seulement ceux de jazz, se conjuguent avec la citoyenneté et l’éducation populaire. L’Europajazz – ex festival du Mans – a soufflé sa 35e bougie en élargissant son champ géographique à toute la région – en débordant sur la Basse-Normandie – et ses activités culturelles vers les collèges et lycées, les Maisons d’arrêt, les maisons de retraite, les hôpitaux et même les entreprises et les conservatoires. Jazz sous les Pommiers suit le même mouvement et fait rayonner le jazz dans les mêmes lieux, comme la plupart des autres festivals. Pour lutter contre une image qui colle à la peau du jazz, « intello », « élitiste ». Le jazz est, à l’inverse, liberté pour créer d’autres sons, d’autres univers. Les jeunes musicien(ne)s l’ont bien compris. Ils et elles sont de plus en plus nombreux sans que le public ne se rajeunisse. Un oxymore pour une musique qui n’en manque pas.
Cette 35e édition de l’Europa avait commencé le 15 mars et se terminera le 16 mai pour laisser la place à Jazz Sous les Pommiers qui lui fêtera son 33e anniversaire.
La fin de la fin de l’Europa a lieu au Mans, la ville de naissance, avec la « Grande fête anniversaire du festival » le dimanche 11 mai dans le parc de l’Abbaye de l’Epeau – un lieu idyllique -, de 11h à 17h, une sorte de ballade dans les fanfares, à l’instar de Jazz Sous les Pommiers qui, traditionnellement, le propose le dimanche – cette année le 25 mai. La conclusion, le vendredi 16 mai, sera laissée à Youn Sun Nah, vocaliste de renom qui a su imposer son style dans les mondes du jazz, en n’oubliant pas sa culture d’origine, celle de la Corée, un pays coupé en deux, à l’histoire tourmentée. Concert qui aura lieu au sein de l’Abbaye, haut lieu de concert de ce festival.
Le jazz envahira, comme chaque année du côté de l’Ascension, la petite commune de la Manche, Coutances pour fêter la liberté comme la Libération et le Débarquement. Pour faire œuvre de mémoire – un travail toujours recommencé – et appréhender le jazz non pas comme une musique du passé mais l’étendard de la révolte de la jeunesse à toutes les périodes troublées de notre histoire. Le jazz et la France, une histoire d’amour, de liberté et d’ouverture vers d’autres possibles, des rêves d’un autre monde.
Soixante dixième anniversaire du débarquement oblige, Jazz Sous les Pommiers se vit aussi au rythme d’un passé jamais dépassé. Le jazz est vivant et le reste. La Libération est une fête folle et le jour le plus long, le jour le plus fou surtout pour les populations de la manche. Le débarquement à Omaha Beach fut une violente boucherie. La mer était rouge de ce sang de jeunes gens.
Le jazz et la danse débarquaient tout autant. La danse surtout, interdite par les autorités d’occupation comme par le Régime de Vichy qui partageaient les mêmes conceptions réactionnaires parlant de musique « dégénérée » à propos du jazz même si certains « collaborateurs » faisaient du jazz une musique blanche et française parce que née à la Nouvelle-Orléans. Les concerts de jazz, contrairement à une idée encore répandue malgré des ouvrages savants, étaient légaux et très fréquentés. Pendant la période de l’Occupation un « jazz français » commençait à se développer. Le « bebop » viendra tout éclabousser jusqu’à l’explosion. La nouvelle révolution esthétique écrasera tout sur son passage. Y compris la mémoire qu’il existait un jazz en France avec deux génies, le premier est connu, Django Reinhardt, le second beaucoup moins, Michel Warlop, violoniste et compositeur.
Ce sera le thème de mes conférences, « Le souffle de la liberté, 1944 le jazz débarque », titre aussi de mon livre aux éditions C&F – voir mon blog www.soufflebleu.fr – que je donnerai, en lien avec Jazz Sous les Pommiers à Argentan le 17 mai, à Granville le 23 mai et à Coutances le 30 mai. Continuer la lecture →