Un bon revers.
Philippe Lacarrière a plusieurs vies. Créateur de l’association « Au Sud du Nord », il est aussi le directeur artistique du festival du même nom et du label tout en étant surtout contrebassiste et compositeur « Backhand project » propose une sorte de revers vers ses inspirateurs, Coltrane bien sur, Keith Jarrett évidemment, Steve Swallow heureusement et quelques autres rencontrés au hasard des plages. Ses compositions évoquent tous ces créateurs d’un passé difficilement dépassable dans un 21e siècle qui ne semble pas vouloir commencer. Le groupe arrive à tirer son épingle d’un jeu de fantômes qui ne demandent qu’à revivre une fois encore. Sébastien Texier, saxophone alto et clarinette fait la preuve de sa capacité à installer une atmosphère, un feeling pour aller à la recherche de sa propre individualité, Fady Farah, piano, forge un arrière fond tout en effectuant un collage entre tous les pianistes associés à Coltrane, Guillaume Dommartin à la batterie comme Hubert Colau aux percussions (et voix pour certains morceaux) tisse le rythme, toile d’araignée qui permet aux solistes de rebondir. Le leader/bassiste quant à lui joue, me semble-t-il, de cette guitare basse construite par Steve Swallow pour des solos flexibles et plastiques. J’aurais attendu plus de sauvagerie de temps en temps, plus de rage mais l’album reste plein d’une musique multicolore, de cette musique qui ne se refuse aucune incursion dans d’autres cultures. Une musique aussi dansante.
Le tout est un album dont les revers vous atteindront en plein cœur.
Nicolas Béniès
« Backhand project », Philippe Lacarrière, Au Sud du Nord, www.ausuddunord.fr
Puzzle musical dansant
Il est toujours attendu et, souvent, arrive. Quand il est là, il se passe quelque chose. Zorro bien sur. Qu’un groupe se nomme « Z Comme » laisse entendre qu’il était désiré. Pourquoi pas ? Ce deuxième album se veut « disruptif » comme on dit galamment aujourd’hui. « Dis_order » ont-ils titré. Le désordre pour jeter un peu d’huile sur un feu mourant, redonner de la vie, refaire le chemin de la musique. Au prix d’un ordre contrarié, d’un ordre dit, voulu pour donner un semblant de cohérence à une sorte de collage de références assises sur le temps. Un peu hypnotique, répétitif et dansante, la musique du quartet qui ne craint pas d’invoquer les mânes des derviches tourneurs comme la musique arabe. Julien Behar, saxophones et compositions, Christophe Chaïr, percussions, Stéphane Decolly basse électrique et Philippe Rak, vibraphone, marimba forment un tout, un ensemble. L’addition de la guitare, Eric Thomas sur « Evanescent », relève la sauce sans rompre l’homogénéité. Rupture dans la continuité ou continuité de la rupture ? Une autre manière de créer du désordre ?
Le dernier thème, composition collective du quartet, « Ras el Hanout » – jeu sur les sonorités – révèle la manière de fonctionner de ces musiciens. Les influences sont ouvertes et visibles pour aller vers la transe. Pour parfaire leurs idées, ils ont invité d’autres instrumentistes pour leur prêter main forte pour les collectives soit une section de cuivres, Lucien Behar, Elias Delaunay et Johann Lefevre. Pour danser sur le volcan du monde.
Nicolas Béniès.
« Dis_order », Z Comme, Inouïes Distribution