Passé et présent chez Boris Akounine
Les mondes de Boris Akounine semblent aux antipodes du polar moderne. Il se plait dans le passé, apparemment du moins. Il a pourtant lu Chandler, Hammett et les grands auteurs du polar américain. Il a su construire une nouvelle figure du détective privé qui traverse le temps et pas seulement le sien.
Son héros, Eraste Fandorine, est le révélateur – au sesn photographique du terme, mais c’était avant le numérique – de la Russie de la fin du 19e siècle pour des enquêtes étranges dans les méandres d’un pouvoir chancelant. Toute ressemblance avec la Russie d’aujourd’hui est conseillée.
Il sait aussi s’approprier toute la littérature mondiale – la russe évidemment mais pas seulement – pour construire une sorte de puzzle dessinant une nouvelle figure. Une sorte de dialectique de la citation. Les parties réunies constituent un tout différent de ses parties.
L’attrapeur de libellules – beau titre, énigmatique à souhait – distend le temps. Le voyage se fait dans deux espaces-temps. 1905 et la révolution qui vient dans cette Russie en train de construire des partis révolutionnaire dont les SR bien décrits et le Japon de 1878.Il est question d’attentats et de Ninja ainsi que d’une grande histoire d’amour qui se terminera encore plus mal que supposée.
Le lien entre ces deux histoires apparaît seulement à la fin.
A ce jour, l’œuvre la plus aboutie de cet auteur étrange. Page 343, le lecteur apprendra que « akounine », en japonais, signifie un voleur étrange, voleur de concepts, de textes… Une sorte d’autoportrait. A ne manquer sous aucun prétexte pour fêter le 30e anniversaire de la collection « Grands détectives » même si l’auteur l’a désertée.
N.B.
« L’attrapeur de libellules », Boris Akounine, 10/18.