L’Institut du Monde Arabe (IMA) propose le tome 5 des Arabofolies

Soulèvements


Les printemps arabes, s’en souvient-on ?, avaient provoqué d’énormes espoirs de par le monde. Enfin les dictateurs étaient tirés de leur lit, obligés de partir ou de rendre des comptes. Enfin, les libertés démocratiques à commencer par les droits des femmes faisaient des pas importants, l’émancipation semblait la donnée principale de tous ces soulèvements.
Les soulèvements depuis n’ont pas cessé. Les femmes se sont mobilisées dans tous les pays du monde pour faire respecter leurs droits et les élargir manière de lutter contre toutes les répressions. El Assad a montré jusqu’à quelles extrémités un dictateur était prêt à aller pour se maintenir au pouvoir. Depuis 2010, les populations syriennes ont subi les assassinats de masse. Continuer la lecture

Des cadeaux à (se) faire.

Le Père Noël n’est pas toujours nécessaire pour faire des cadeaux. Toutes les périodes de l’année sont propices. Par les temps qui courent – et vite – il est nécessaire de se référer plutôt à la Mère Noël, c’est plus sur. Les cadeaux les plus importants ne sont pas forcément les plus chers ni les plus en vue. Il faut toujours se méfier d’un produit, d’un bien qui plait immédiatement. Il vaut mieux viser le moins évident, le plus hermétique pour un cadeau qui durera.
Mais ne gâchons pas le plaisir. Celui d’offrir bien sur. Un bon moyen de lutter contre la dépression qui vous prend devant la profusion de marchandises. Un cadeau, ce peut être un livre de poèmes. Il faut savoir y penser. Continuer la lecture

Et la poésie…

Poètes d’avant-hier, d’aujourd’hui et d’ailleurs

La poésie fait figure de parent pauvre de la littérature. Comme si elle avait perdu son aura. Inondé par les essais, les romans, il reste peu de place pour quelques bouts rimés lorsqu’ils le sont. C’est une erreur. A chaque rencontre avec ces voyageurs, l’émotion, le rire, la tristesse et la réflexion sont au rendez-vous. Il ne faut pas hésiter à lire les poètes d’hier et d’aujourd’hui.
La poésie a, pourtant, une actualité.
Actualité d’abord d’une nouvelle traduction de la Divine Comédie de Dante Alighieri. Un poème en forme de voyage pour aller à la rencontre de l’amour perdu, disparu. Un long parcours semé de mondes divers, ahurissants ou frissonnants, torturés ou idyllique. Par le rêve halluciné, le poète ouvre les portes de l’ « Enfer-(du) Purgatoire-(du) Paradis », une trilogie souvent oubliée pour ne laisser le souvenir que de l’Enfer.
Dans la collection Poésie (Poésie/Gallimard, 2015, une édition bilingue), Jean-Charles Vegliante en avait proposé une traduction sans notes pour rendre compte du choc que peut ressentir le lecteur moderne à la lecture de cet auteur du 13e siècle.
Danièle Robert livre une version, bilingue elle aussi, de la deuxième partie, Purgatoire. Ce choix ré­sulte de la nouveauté : le Purgatoire ne prend place dans la théologie qu’en 1274. Dante lui donnera un contenu qui s’imposera. Ce lieu intermédiaire, passage vers le haut ou retour en bas, mêle toutes les références, en particu­lier celle d’Ovide et de ses Métamorphoses, que Danièle Robert a aussi traduit (Babel/Actes Sud).

Poètes sans Dieu
Les poètes d’aujourd’hui sont moins « divins » même s’ils cherchent, de temps en temps, à réenchanter le monde par le quotidien. Altaf Tyrewala décrit Mumbai (ex-Bombay), ville pieuvre où vivent, s’affrontent des populations dans un environnement souvent hostile. Le ministère des sentiments blessés, un beau titre, fait référence à l’interdiction de blasphémer toute religion, quelle qu’elle soit. Une synthèse de cette ville-monde entre sectarisme religieux assassin et modernité.La ville indienne ouvre ses entrailles sous les coups de scalpel du poète . Cinéaste à la Rimbaud, il superpose les vues. Grand angle, zoom pour décrire cette métropole condensé d’un monde à la recherche de solutions à ses crises.
John Freeman, lui aussi, fait référence à des villes où vit une grade majorité des populations ; Il se balade et nous perd dans un dédale de pays pour susciter l’angoisse d’avenirs imprévisibles. Logiquement les villes des États-Unis sont les plus nombreuses. Freeman – « homme libre » ! – les entremêle avec Beyrouth, Paris et beaucoup d’autres pour dire que nous sommes arrivés. Vous êtes ici – titre de son recueil – déclenche une série de réflexions sur des cités qui se ressemblent tout en suscitant une « inquiétante étrangeté dont parlait Freud. « Ici » peut être ailleurs. Les mémoires du passé mêlées aux voyages construisent un curieux espace/temps qui conduit à un bizarre champ des possibles. 
En forme de synthèse de poésie d’hier, d’aujourd’hui et de demain, la réédition, vingt ans après, des œuvres poétiques de Jean Sénac, entre plusieurs cultures, plusieurs reflets d’une société qui ne sait pas accepter ses marginaux produits par son fonctionnement même. Jean Sénac a été assassiné dans sa cave en 1973 après avoir participé à la lutte pour la libération de l’Algérie où il était né en 1926. Des mots fragiles qui vacillent mais résistent en sachant décrire émotion, sensualité et sexualité. Il faut le (re)découvrir de toute urgence.
Nicolas Bénies
• « Purgatoire », Dante Alighieri, traduit, préfacé et annoté par Danièle Robert ; « Le ministère des sentiments blessés », Altaf Tyrewala, traduit par Bee Formentelli ; « Vous êtes ici », John Freeman, traduit par Pierre Ducrozet ; Œuvres poétiques, Jean Sénac. Tous ces livres chez Actes Sud.

JAZZ, Cecil Taylor, départ pour l’éternité.

Ne rien oublier.

Un auteur, que je ne citerai pas, vient de commettre un ouvrage sur Chopin. La belle affaire me direz-vous. Cette publicité m’a conduit à me demander si, en remplaçant Chopin par Cecil Taylor, l’éditeur se serait fendu d’une publicité. La réponse négative s’impose d’elle-même. Pourtant, Cecil fait plus partie de notre présent que Chopin. Je ne demande pas que Chopin soit ignoré mais que puisse se faire reconnaître, le génie intransigeant de Cecil Perceval Taylor, mort à Brooklyn le 5 avril 2018. Continuer la lecture

Poésie de la fulgurance

Georges Perros, l’esthétique du quotidien

La poésie surgit dans des endroits bizarres, étranges d’une rencontre avec un paysage, une personne, un sentiment. Pour Georges Perros (1923-1978), le point de départ est dans la sensation d’être vivant alors que la mort rôde. Il se dira « noteur » pour indiquer que la note est la seule manière d’exprimer la fulgurance de la vie, la nécessité de l’éphémère face au livre imprimé. Le quotidien est, par nature, « gravée sur le mur du vent » pour perdre la trace du passé tout en conservant son ombre. La poésie de Perros ressemble, de ce point de vue, au sillage d »’un bateau qui suit des routes invisibles à l’œil nu mais conservées par les navigateurs. L’écume devient la signification du passé. Continuer la lecture