Connaître avant de parler

Deux livres pour appréhender l’Islam.

CandiardUn frère dominicain, Adrien Candiard, membre de L’institut dominicain d’études orientales, propose un vade-mecum pour « Comprendre l’Islam ou plutôt pourquoi on n’y comprend rien ». Pas seulement à cause de toutes les bêtises entendues dans les bouches des politiques ou des journalistes dont le seul but est de susciter la haine et la guerre entre des communautés pour leur plus grand profit, du moins le croient-ils. Mais aussi parce que l’Islam dont on entend parler n’a rien à voir avec la réalité de cette religion profondément divisée entre des courants antagoniques qui semblent se référer au même texte, le Coran. Cette division n’est pas propre à l’Islam bien entendu. Elle se retrouve dans toutes les religions. Partout, des sectes pensent détenir la seule vision possible des textes sacrés.
Ce petit livre, 119 pages, issu de conférences de l’auteur, permet de se retrouver entre les différentes tendances existantes qui, pour les plus importantes – les Sunnites et les Chiites – remontent à la mort du prophète. Le salafisme est une autre variante plus tardive. Continuer la lecture

Marxisme et Pragmatisme.

Des honnêtes hommes, Trotski/Dewey
La fin et les moyens : d’une discussion à une présentation.

Dans ces années 1930, marquées à la fois par la crise systémique profonde du capitalisme et par l’installation du stalinisme – surtout après 1934, date de l’assassinat de Kirov prétendant à la direction de l’URSS à la place de Staline -, s’instaurait une sorte de nouvelle morale. Elle allait servir de justification à la fois aux procès de Moscou – 1936-37 -, aux capitalistes et aux fascismes en se résumant dans la formule « la fin justifie les moyens ». Pour Staline, réfutant toute dimension internationale à la Révolution et prônant contre toute la tradition marxiste le « socialisme dans un seul pays », le rôle des Partis Communistes se résumait dans la défense de la patrie du socialisme, cette morale servait de paravent à la contre révolution politique de l’URSS. Tous les moyens étaient bons s’ils permettaient de défendre l’URSS, le pouvoir de la bureaucratie stalinienne. Ces moyens allaient de la politique « classe contre classe » dénonçant les sociaux-fascistes suivie de la politique dite des « Front populaire » d’alliance avec des partis de la bourgeoisie et, enfin – pour cette période – le pacte Germano-soviétique de 1939. De quoi donner le tournis…
L’ennemi principal de la bureaucratie stalinienne, Trotski et les « trotskistes » de tout poil, centre des procès de Moscou. On parle alors d’« hitléro-trotskistes », formule qui resservira… Continuer la lecture

Présentation de Max Weber.

Une sociologie pragmatique

Max Weber fait partie des théoriciens les plus cités et, suivant son traducteur Jean-Pierre Grossein, le plus mal compris. Pour des raisons qui tiennent à la fois à la traduction d’un allemand volontiers touffu et d’une simplification de cette pensée dont les concepts sont souvent évolutifs. Rançon de ce pragmatisme, école dont se réclame ce sociologue. Ainsi le lien effectué entre le protestantisme et le capitalisme n’est pas aussi simpliste, dans le texte wébérien, que la présentation des manuels de sociologie. Tout est dans les nuances.
La présentation de Grossein, à partir d’un choix de textes, sous le titre « Concepts fondamentaux de sociologie » (Tel/Gallimard) permettra, peut-être, de le lire au plus près de sa pensée.
Sous le titre « Leçons de méthode wébérienne », le traducteur essaie de saisir méthode et concepts de cette théorisation des sociétés. Tout en notant, avec un peu d’ironie, « le caractère déroutant de la terminologie wébérienne ». Il réussit pourtant à dérouler, malgré la pédanterie du propos, une sorte de fil directeur tout en soulignant les difficultés mêmes de la traduction. Il insiste particulièrement sur « la conceptualisation idéaltypique » comme base de la méthode du sociologue. Weber insiste sur la nécessité de l’Histoire et de la psychologie pour appréhender les phénomènes sociaux. Il voudrait construire – ce fut là son échec – une théorie globalisante des sociétés.
Hormis les textes retraduits souvent par ses soins, Jean-Pierre Grossein propose un « Glossaire raisonné » et un « Lexique franco-allemand ». Un outil essentiel pour comprendre, analyser, critiquer cette œuvre importante et qui a une influence marquante dans la sociologie.
Nicolas Béniès.
« Concepts fondamentaux de sociologie », Max Weber, Tel/Gallimard, Paris, 2016.

Bon de souscription pour mon livre, « Le basculement du monde »

Bonjour,

Je viens de terminer un livre sur l’économie qui se veut un essai sur les enjeux de la crise systémique du capitalisme ouverte en août 2007 et les propositions possibles (un début) dans un environnement marqué par la crise écologique et les mutations climatiques.
Les gouvernants et les « élites » se sont installés dans le monde d’hier. Il est temps de prendre la dimension des déstructurations en cours et des transformations nécessaires.
Nous vivons une crise du capitalisme qui appelle de nouvelles modalités de l’accumulation du capital, soit un nouveau régime d’accumulation différent de celui des « 30 glorieuses » et de celui des années 1980 dit « à dominante financière » pour révolutionner une fois encore le capitalisme pour qu’il change tout pour ne rien changer de l’essentiel, comme aurait dit Keynes. C’est aussi une charge contre le libéralisme liberticide et réactionnaire qui ne propose aucun projet d’avenir. Cette crise a de multiples dimensions, financière, économique, sociale, politique, culturelle… Et même morale depuis la « déchéance de nationalité  » et la campagne de la droite sur le thème de l’identité nationale millénaire; L’Histoire, sa méthode, sa réalité, ne supporter pas l’idée d’une identité séculaire. La réalité c’est une identité qui se transforme au cours du temps. L’identité de la monarchie n’est évidemment pas la même que celle de l’après révolution française…

Vous trouverez ci-après le bulletin de souscription à des conditions préférentielles.

Merci à toutes et à tous.

Nicolas Béniès.

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ça va mieux ?

La crise entre parenthèses

L’analyse de la conjoncture ne peut se limiter à un seul pays. La croissance de l’économie française a enregistré un léger mieux au premier trimestre de 2016, suivant les estimations de l’INSEE provoquant un tonnerre de cocoricos. Pourtant, la situation de l’économie mondiale reste dominée par deux dangers principaux : le ralentissement de l’économie américaine et la politique monétaire de la FED comme de la crise ouverte en Chine.

En convalescence ?
L’économie française « va mieux » et ce n’est pas seulement François Hollande qui l’affirme mais aussi l’INSEE dans son estimation de la croissance du PIB pour le premier trimestre 2016. qui avait prévu 0,4%, et ce serait – l’estimation peut-être revue – 0,5. Pas de quoi fouetter un chat ? Que nenni prétend Michel Sapin, le ministre des finances, c’est une très bonne nouvelle qui a été associée à la baisse du nombre de chômeurs de la catégorie A… pour grossir les catégories B et C, une manière de passer du chômage à la précarité.
La hausse limitée de la croissance s’explique par l’augmentation de la consommation des ménages, +1,2%, moins par celle de l’investissement des entreprises. Pourtant, les marges brutes des entreprises – les profits – se sont bien redressées par l’action sous l’effet du CICE et du « pacte de responsabilité » mais sans action sensible sur l’investissement productif…faute de demandes solvables suffisantes. Il faut rajouter que la consommation des ménages n’avait guère progressé après les attentats de novembre 2015. Un rattrapage a eu lieu, en même temps que les soldes au premier trimestre de 2016. Ce résultat risque d’être une exception. D’autant que la zone euro connaîtra une faible croissance de l’ordre de 1,6%, suivant selon la Commission Européenne, et se trouve minée par la récession en Grèce et en Espagne. La politique d’austérité est sur la sellette malgré les injonctions de Bruxelles pour encore plus baisser les retraites et compresser les minima sociaux. Une politique qui se traduira par la poursuite du processus déflationniste malgré la politique expansive de la BCE. Continuer la lecture

Retour du « Califat » ?

Contre toutes les oppressions, la démocratie.

Du despotismeAbd al-Rahmân al-Kawâkibî, Syrien (1849-1902), ne jouit sans doute pas, dans nos contrées, d’une grande reconnaissance ni même d’une connaissance. Son essai, « Du despotisme », publié en 1902 au Caire, vient juste d’être traduit. Il faut lui reconnaître le statut d’un grand texte fondateur. Avec d’autres, il défend la venue du nationalisme arabe, la construction d’Etat-Nation, Etats de droit, pour combattre l’asservissement des populations qui prive le monde arabe de la force vive de l’intelligence et de la réflexion. L’argumentation qu’il utilise est étrange pour l’Occidental laïque. Il s’appuie sur les sourates du prophète, qu’il veut débarrasser de ses exégèses, pour justifier la nécessité de mettre fin à la tyrannie qui s’appuie sur une lecture du Coran qui permettrait de la justifier. Dans le même mouvement, il s’appuie sur les philosophes français, des « Lumières », pour indiquer un chemin, pour le monde arabo-musulman, d’entrée dans la modernité. Il s’oppose, de ce fait, au « panarabisme » pour permettre les avancées démocratiques et sociales. Continuer la lecture

Faible croissance mondiale, crise financière…

Les nuages noirs s’accumulent.

Toutes les institutions internationales se rejoignent pour prévoir une croissance mondiale inférieure à 3% et cette prévision est continuellement revue à la baisse, la déflation dans les pays capitalistes développés s’inscrit dans la réalité et la crise financière n’en finit d’être combattue par les banques centrales. Dans ce contexte, l’économie française peut-elle connaître une embellie ?

Suivant la dernière Note de conjoncture de l’INSEE datée du 17 mars, l’économie française bénéficierait d’une croissance de 0,4% par trimestre et d’une baisse du chômage en juin de moins 0,1% grâce à la reprise, constatée, des créations d’emploi. Cette croissance serait tirée par les exportations vers les autres pays de l’Union Européenne et plus spécifiquement la zone euro par le biais d’une compétitivité retrouvée. Autrement dit, la baisse du coût du travail sera plus importante en France que chez les partenaires européens. S’agit-il là de la fonction du projet de loi sur le travail ? La baisse des cotisations sociales des entreprises et les aides diverses gouvernementales – CICE, Pacte de responsabilité – au prix d’attaques répétées de la protection sociale ont permis d’augmenter les profits des entreprises/L’INSEE prévoit donc une hausse timide des investissements. Continuer la lecture

Essai. Un monde étranger.

Une complexité au service d’une nouvelle barbarie.

Sakia Sassen ExpulsionsLa thèse de Saskia Sassen, sociologue spécialisée dans l’analyse de la « ville globale », dans « Expulsions », se résume facilement. Les années 1980 ont vu se dessiner une nouvelle forme du capitalisme dominé par l’idéologie libérale, un régime d’accumulation à dominante financière pour employer le langage des économistes de l’école de la régulation, langage que la sociologue n’utilise pas. Elle est consciente que les critères de la finance se sont imposés pour régler les orientations de l’économie dans toutes ses facettes.
Cette forme a combiné – elle en fait la démonstration – une complexité de plus en plus sophistiquée aux montages inextricables comme le montre une fois encore les « panama papers » et une brutalité extrême. La combinatoire s’explique par la nécessité pour tous les capitalistes d’extraire le profit maximum – et non plus optimum comme dans la période des « 30 glorieuses » – et à court terme, dans les deux mois. La conséquence la plus importante, pour elle, des expulsions dans tous les domaines se traduisant par un rétrécissement de la base économique. Une idée à creuser. Elle signifie que, contrairement aux « 30 glorieuses », les politiques actuelles d’austérité ne se posent plus la question de la demande pour faire face à la surproduction mais privilégient l’entreprise et même la grande entreprise et ses profits pour qu’elle soit compétitive. L’avenir apparaît, de ce fait, semblable au passé et bloque toute possibilité de construire un futur. Continuer la lecture

De la théorie à l’idéologie passant par un pragmatisme critique.

L’idéologie libérale fracassée par la réalité

Je vous propose une réflexion à la fois sur les théories économiques qui devraient permettre d’expliquer le monde et sur la tendance à transformer la théorie en idéologie, comme c’est souvent le cas pour les théories néo-classiques, le nom officiel du libéralisme économique.
Pour ce faire, nous nous servirons de deux propositions de politique économique, celle qui sert à justifier la loi dite « El Khomri », sur le « travail et celle émanant de Mario Draghi, le président de la Banque Centrale Européenne (BCE).

Dans une pétition publiée par Le Monde, qui a réuni 31 signataires dont le Prix Nobel d’économie 2014, Jean Tirole et le titulaire de la chaire d’économie au Collège de France, Philippe Aghion pour défendre le projet de loi. Ils affirmaient qu’en « réduisant fortement l’incertitude attachée à la rupture des contrats de travail, le projet de loi incite les entreprises à revenir vers des embauches en CDI. » Ils reconnaissent aussi que la conséquence sera de « flexibiliser le CDI » soit de précariser l’ensemble des salarié –es. Ainsi pour lutter contre les inégalités et la précarité, leur objectif, ils arrivent à élargir la précarité. Tous précaires donc disparition de la précarité !
Plus important, c’est la philosophie économique, la théorie économique qui sous tend cette prise de position qui est importante. Pour eux, embauches et licenciements doivent obéir aux règles du marché. Pour y arriver, il faut libérer le jeu de l’offre et de la demande des entraves, le droit du travail en l’occurrence, qui empêchent la réalisation de l’allocation optimum des ressources, le point d’équilibre optimal. C’est l’alpha et l’oméga de toutes les théories néo-classiques. Le marché doit être libre de toute contrainte pour réaliser, par ses mécanismes, l’équilibre général. Steve Keene, un économiste australien, avait démontré dans « L’imposture économique » – aux éditions de l’Atelier – les hypothèses et les développements coupés de toute réalité et de toute logique de ces théoriciens. Le marché n’a jamais fonctionné sans règles sinon la confiance dont ces économistes parlent beaucoup disparaît. Tout marché est structuré par l’État ! Continuer la lecture

Comment va le monde ?

Un monde incertain et sans avenir.

Les marchés financiers jouent – sans jeux de mots – aux montagnes russes. Elles augmentent fortement et chutent tout aussi profondément. Montées et descentes trouvent leur cause dans un indicateur pour le moins étrange, les cours du pétrole. Il est passé de moins de 30 dollars au début de l’année 2016 à plus de 38 dollars début mars. Dans la lignée, les cours des Bourses haussent. Il n’empêche que la tendance à la baisse subsiste en fonction d’une prévision faible de la croissance mondiale. Continuer la lecture