Paris, 1926 et ses folies

Où est passée Ariane ?

Le Paris des années folles cache mal la mort omniprésente combattue à grands coups de jazz, de comédies musicales, de fêtes et de nuits illuminées. En mars 1926, Carnavals. Une troupe de théâtre se produit. A leur tête une figure de Minotaure sollicitée bientôt par un masque d’Ariane. Le fil se tord, introduit un doute et la mort se trompe de cible abusée par le masque. Jeremy Nelson en quête, aidée par Camille et Victor Legris en forme de retour et de legs.
Une sombre histoire de vengeance remontant à la nuit d’un temps déformé. « Qui a tué le Minotaure », dernier roman de Claude Izner, baigne dans une atmosphère étrange, tout en décrivant le Paris des années 1920 de plus en plus lointain et qui, par certains aspects se rapproche. Continuer la lecture

Le coin du polar, les sœurs Izner à l’ouvrage

Une hirondelle fait-elle l’automne ?

Paris, octobre 1926, cadre de la troisième enquête de Jeremy Nelson, nouveau héros récurrent de Claude Izner, « Les nids d’hirondelle », pour nous faire vivre « les années folles » marquées par le jazz.
Jeremy, toujours amoureux de Camille, s’essaie à la composition d’une comédie musicale avec un parolier, par ailleurs clarinettiste classique, Paul Green. Évocation de ces créations étranges sur les scènes parisiennes à commencer, bien sur, par la Revue Nègre, au Théâtre des Champs Élysées, avec comme vedette Joséphine Baker et, dans l’ombre, Sidney Bechet seul musicien à être mentionné dans les gazettes de l’époque. L’orchestre accompagnateur, celui de Claude Hopkins – le pianiste a prétendu dans son autobiographie, avoir engagé Josephine qui lui a volé la vedette -, est resté souvent inconnu des contemporains. Il était logique que l’autrice n’en parle pas. Par contre, elle nous fait visiter Paris, le quartier latin, en faisant courir Jeremy d’un point à un autre. Continuer la lecture

Le coin du polar (2)

Paris, 1923

La saga des sœurs Izner dans ce Paris des années 20, étrange, secoué par le jazz, les comédies musicales, Cocteau, les surréalistes, la révolution russe… se poursuit dans ce troisième opus, « La poule aux œufs d’or ». Le narrateur, pianiste de jazz, américain, Jeremy Nelson – il a rencontré, dans l’ouvrage précédent « La femme au serpent », la famille de Victor Legris pour relier des histoires du 20e et du 19e siècle – se transforme en enquêteur tout en nous faisant visiter certains lieux du Paris «qui « jazze ». Dans cette troisième enquête, il est engagé par le… cinéma. C’est une des grandes bizarreries du cinéma muet : la musique est nécessaire pour mettre les acteurs dans l’ambiance. La musique et le cinéma opérait déjà leur histoire d’amour/haine.
« La poule aux œufs d’or » – un titre qui ne s’explique pas totalement – raconte surtout les trajectoires de « russes blancs » qui ont refusé la révolution en choisissant l’exil pour se retrouver loufiat, chauffeur de taxi ou autre métier à la qualification empirique. Le choix était limité pour la plupart d’entre eux et plus encore pour elles. Certain-ne-s n’étaient pas partis sans rien. C’est le cas ici. La chasse au trésor s’ouvre. Ici, l’auteure prend pour personnage une professeure de diction. Les actrices de cinéma pensent au théâtre, à Sara Bernhardt et à ses funérailles nationales, pour devenir des « vrais » comédiennes. Les débuts du cinéma parlant, comme le raconte le film de Stanley Donen et Gene Kelly, « Singin’ in the rain », leur donneront du travail. Continuer la lecture

Le coin du polar

Un polar historique
Claude Izner poursuit sa nouvelle saga sur la France du jazz et de la chanson dans cette année 1921. Jeremy Nelson, jeune pianiste de jazz, Américain et Français, continue à chercher fortune et sa famille. Entre Londres et Paris, il enquête. « La femme au serpent » est le deuxième de la série – le premier, « Le pas du renard » est réédité en poche – pour une plongée dans les mondes du spectacle via une série de meurtres dont le point commun est d’être signé d’un portrait de Simonetta Vespucci, modèle de Botticelli, et d’une vipère. Une plongée dans les mondes du spectacle et une relecture des grands compositeurs américains comme français. Clément Doucet et Jean Wiener, un duo de pianos entre musiques contemporaines et jazz (ragtime souvent pour l’époque)… Le monde des années folles, des Roaring Twenties comme si on y était…

Barbaries libérales.
Pour faire de l’argent, tout est permis ? Le sordide, le barbare en tête ? Elsa Marpeau, dans « Les corps brisés », nous enduit de cette mort qui fait semblant d’être vivante. Et elle sait nous y enfoncer. Sarah, coureuse de rallye est victime d’un accident. Elle est sur un fauteuil roulant et a perdu l’espoir de vivre. Notre société n’aime pas les losers et ne fait rien pour permettre aux handicapé-e-s de trouver une nouvelle place. Elle préfère les ignorer… Sarah intègre un centre perdu en haute montagne pour retrouver ses capacités mentales, pour lutter. La peinture de sa compagne de chambre la sauvera de la barbarie. La résistance, le combat contre l’horreur, la solidarité participent de l’espérance.

Aoste, Italie.
Vivre à Aoste ne rend pas de bonne humeur. Le vice-préfet – nouveau nom de commissaire de police en Italie – Rocco Schiavone en est un bon exemple. Mauvaise humeur qui s’alimente d’un meurtre : une femme retrouvée pendue dans son appartement. L’enquête fait découvrir le quotidien de ses habitant-e-s mêlée de réflexions sur l’Italie contemporaine et les secrets nécessaires à toute bonne intrigue. Antonio Manzini dans « Froid comme la mort » sait mêler le noir de la nuit, la poésie et le temps qui sait être relatif sous sa plume. Le tout pimenté d’humour et d’ironie, de fantômes qui empêchent de dormir et de beaucoup d’autres choses qui forment la trame de ce qu’il est convenu d’appeler notre vie quotidienne. Faussement décontracté, le style et le vice-préfet pour déguiser le désespoir.

La Suède, pays fantasmagorique.
Une histoire surnaturelle qui mêle mythologie chinoise et autres croyances de l’au-delà pour dénoncer, comme Elsa Marpeau, l’utilisation mercantile de la souffrance. La révolte perce via ce personnage de mère et de soldate, le lieutenant Jasmine Pascal-Anderson. La guerre n’est pas seulement celle des champs de bataille – ici le Kosovo – mais aussi celle du « Playground » – titre de ce thriller » -, des sites qui alimentent le cauchemar de l’ultra violence pour « faire » de l’argent encore et encore. L’espoir a-t-il perdu toute actualité ? Le libéralisme est un profondément liberticide nous dit Lars Kepler…

Nicolas Béniès.
« La femme au serpent », Claude Izner, 10/18 ; « Les corps brisés », Elsa Marpeau, Série Noire/Gallimard – son précédent, « Et ils oublieront la colère » est réédité en Folio/policier- ; « Froid comme la mort », Antonio Manzini, traduit par Anaïs Bouteille-Bokobza, Folio/Policier ; « Playground », Lars Kepler, traduit par Lena Grumbach, Actes Sud.

Le coin du polar.

En direct des États-Unis.

Violences du Sud…

James Lee Burke, on ne le dira jamais assez, est l’écrivain le plus important du Sud des États-Unis. Malgré son âge avancé – son expérience de la guerre en est restée au Viêt-Nam, depuis les États-Unis se sont engagés dans des multitudes de guerre -, il sait toujours raconter des histoires tristes et curieuses comme celles des Blues qui marquent profondément cet environnement. Comme le « Old man River », le Mississippi qui structure tous ces territoires
Pour cette nouvelle aventure Dave Robicheaux, son double qu’il n’arrive pas à faire mourir, policier de cette Louisiane remplie de fantômes et de racismes comme d’assassins en série qui ont pourtant pignon sur le Mississippi. Continuer la lecture