Une musique contemporaine.
Stéphane Guillaume a longtemps été un saxophoniste prometteur – même s’il joue aussi de la flûte et d’autres instruments. Musicien accompli, ses compositions recelaient un parfum de modernité qu’il n’arrivait pas à transmettre dans son jeu et, surtout, dans ses enregistrements. Un peu trop de modestie peut-être, pas assez d’agressivité sûrement.
Le même sentiment pouvait s’appliquer à ses compagnons, Frédéric Favarel, guitariste et Antoine Banville, batteur. Un manque de confiance en soi sans doute. Un trac difficile à maîtriser.
Dans cet album La Baleine/Gemini Records, du « Stéphane Guillaume quartet » – et le quatrième est un des grands bassistes de jazz en France Marc Buronfosse -, intitulé « Pewter Session », ils arrivent à surmonter leurs angoisses et à construire une musique résolument moderne, une musique qui, à la fois, s’inscrit dans notre temps et le dépasse. Les influences sont visibles. Coltrane, Wayne Shorter, Steve Lacy, une grande partie du jazz modal mais aussi les rythmes afro-cubains servent de balises, d’affluents, d’aliments à ces quatre là pour construire une sorte de synthèse d’une entrée dans la modernité. Ces références s’entendent sans peser sur les musiciens qui s’en servent pour suivre leur propre chemin. Une révolte rentrée, une quiétude inquiète marquent cette musique.
Les ambiances sont diverses pour indiquer la nécessité de creuser tous les styles pour en extraire une partie de la moelle et l’intégrer à un « work in progress », une construction, un mouvement, un processus. Rien n’est acquis, tout doit être questionné.
Un début de quelque chose ? Ce quartet fait, dans tous les cas de figure, la démonstration que le jazz a encore quelque chose à dire, qu’il n’est pas ringard. Que tous les jazz du passé peuvent être sollicités pour dessiner une musique actuelle.
Une réussite. Une musique qu’il faut écouter et entendre.
Nicolas Béniès.
« Pewter Session », Stéphane Guillaume quartet, La Baleine/Gemini Records.