Fin d’un monde

Le temps des guerres et des révolutions

Photographe de guerre 14-18La guerre de 1914-18 est restée dans toutes les mémoires. Elle fait l’objet cette année d’une commémoration qui cherche, comme souvent derrière ces cérémonies du souvenir, à occulter la recherche des causes de cet événement majeur pour en rester à l’émotion. Les discours oscillent entre la valorisation de l’unité nationale et la dénonciation de la guerre sans s’interroger sur les raisons et les conséquences de ce tremblement de terre qui a vu, via la révolution russe d’octobre 1917, la naissance de ce « court 20e siècle ». Dans le même mouvement, les révolutions esthétiques se sont succédé. Le surréalisme, le jazz, le dadaïsme et… la photographie. « 1914-1918, la violence de la guerre » est une compilation de photographies réalisées principalement par deux sous-officiers au début de la guerre, devenus officiers. Ils ne racontent pas la guerre mais mettent en scène les tranchées et ces soldats qui souffrent au-delà de tout respect humain. Leur travail a, peut-être, inspiré Tardi. Cette succession de clichés fait témoignage de la place désormais importante de la photographie. Ils ouvrent la voie à tous les artistes qui suivront. Il faut lire et regarder cet ouvrage avec ces deux entrées, la représentation de la violence de cette Grande Boucherie et l’accession de la photographie à un nouveau statut.
Cette guerre a permis aussi une transformation fondamentalecombat de femmes, 14-18 dans les rapports entre les hommes et les femmes. Dans la guerre, les femmes deviennent les productrices de richesses. Elles font tourner la machine économique. Il faut enlever des têtes les clichés traditionnels : elles ne sont pas seulement infirmières. Dans un premier temps, elles se situeront du côté de l’Union Sacrée contre l’ennemi pour, un peu plus tard, faire partie, des pacifistes. Le syndicalisme au féminin sera aussi de la partie pour imposer un salaire minimum aux femmes. A la fin de cette guerre, elles seront sommées de retourner dans leur foyer. Elles n’obtiendront pas le droit de vote contrairement aux femmes américaines ni des droits nouveaux. Pourtant, surgira, dans ces années 1920, la figure de la « garçonne » qui marquera un nouveau pas dans la lutte pour la reconnaissance des droits. « Combats de femmes 1914-1918 » fait partie de ces ouvrages essentiels qui permettent un travail de mémoire en luttant contre les oublis du souvenir.
Nicolas Béniès.
« 1914-1918. La violence de la guerre », Stéphane Audoin-Rouzeau, Gallimard/Ministère de la Défense-DMPA
« Combats de femmes, 1914-1918. Les Françaises, pilier de l’effort de guerre », dirigé par Évelyne Morin-Rotureau.

Rencontres.

 

Rétropédalages vers le futur.

La photographie a longtemps été considérée comme un art mineur, plus récemment elle a été qualifiée « d’art moyen », une notion floue qui lui convient bien. Ce domaine artistique, comme, plus tard, le cinéma et le jazz, n’ont pas de définitions précises. Leur périmètre est évolutif, leur champ d’analyse en expansion. Ces « anti-art » au moment de leur naissance sont liés à l’évolution des technologies, des techniques qui les rendent dépendantes de l’industrie et du « retour sur investissement ». Walter Benjamin, étudiant l’ère de la reproductibilité en tirait la conséquence que l’art avait perdu son « aura ». La démonstration est facile à faire. La photographie d’un tableau cache le choc esthétique du tableau. La photographie, si elle ne se veut pas reproduction, peut révéler des trésors cachés du travail du peintre. Continuer la lecture