Jazz. Reggie Washington, contrebassiste, renoue avec l’acoustique

La modernité des classiques

Cet album, nous dit Reggie Washington, vient de loin, 2012 en l’occurrence. Il a été reporté à cause de la mort du guitariste Jef Lee Johnson et de l’urgence, pour le bassiste, de rendre hommage à son ami. Ce fut fait en deux albums.
« Vintage New Acoustic » arrive, malgré tout, à son heure. La débauche d’électronique suscite un retour vers l’acoustique. Sans doute pour lutter aussi contre notre environnement de robotisation et de « blockchain » qui pressure l’humain et ses émotions. La nouvelle acoustique va de pair avec le maintien du « groove », de ce balancement spécifique qui incite à la danse sans se séparer du swing, les pulsations du cœur. « Vintage » dans l’utilisation de compositions qui affleurent le hard bop – une superbe recréation à la basse électrique et à la contrebasse de Reggie -, le modal tourné vers le quintet de Miles Davis du milieu des années 1960 ou le Coltrane de « Afro Blue » (signée Mongo Santamaria) sans oublier l’orgue Hammond B3 ou les Beattles pour « Eleanor Rigby » que Washington transforme par le biais de deux contrebasses, en re-recording bien évidemment.
Bobby Sparks, piano, fender rhodes, synthétiseurs, Hammond B3, sait planter tous les décors, faire glisser les thèmes connus vers un inconnu déployant toutes ses fantaisies, Fabrice Alleman, ténor et soprano saxophone, tout en respectant ce qu’il doit à ses aînés – Coltrane, Shorter et Ayler – réalise une synthèse pour donner ce qu’il faut de modernité aux arrangements du bassiste et E.J. Strickland est un maître du temps pour dynamiter de l’intérieur la nostalgie et faire surgir un nouvel espace temps… pour rêver et danser sur le volcan proche de l’éruption qu’est devenu notre planète. Comme le dit le thème écrit par Reggie Washington qui ouvre et ferme l’album, « Always Moving » !
Un album nécessaire.
Nicolas Béniès.
« Vintage New Acoustic », Reggie Washington, Jammin’ Color.