Appel aux esprits tambours

Mystères du monde

Peut-on faire cohabiter mondes réels et mondes rêvés ? Le fantastique envahi la réalité de tous les jours. Approcher la musique via les chants de divination d’où qu’ils viennent, du vaudou haïtien à la Sibérie en passant par Bali et beaucoup d’autres cultures peut être un chemin de connaissances et une possibilité de guérir un monde hanté autant par les pandémies que par la guerre et qui semble, pour le moins, en sursis.
Anne Pacéo, battrice, compositrice et chanteuse répond par la positive dans « S.H.A.M.A.N.E.S » qui commence par une invite : « Wide Awake », complètement conscient, préambule nécessaire pour entrer dans des mondes parallèles. Elle sait nous entraîner en un ailleurs rempli de possibles. En compagnie de Isabel Sorling et Marion Rampal vocales, Christophe Panzani, saxophone, clarinette, Tony Paeleman aux claviers, Benjamin Flament, métallophone se dessine d’autres univers. La réalisation de cet album a bénéficié du soutien du festival Jazz sous les Pommiers lorsque Anne y était en résidence.
Le seul reproche, un trop plein qui nuit à la lisibilité de l’ensemble. Trop de Shamanes nuit au shamanisme. Le bouillonnement, malgré tout, est une composante nécessaire. Une nouvelle voie s’ouvre ici, les tambours parlent de nouveau. Il faut les entendre.
Nicolas Béniès
« S.H.A.M.A.N.E.S », Anne Pacéo, Jusqu’à la nuit/L’Autre Distribution

Jazz

Déterrons nos mémoires
« Das Kapital » – un titre déjà pris mais pas en musique – est un trio de joyeux perturbateurs. Edward Perraud, batteur et créateur d’environnements, Hasse Poulsen, guitariste capable de toutes les sonorités de l’acoustique à l’électrique et Daniel Erdmann, saxophoniste ténor dans la lignée de Coltrane évidemment tout en creusant les chemins de toutes les mémoires arrivent à ne faire qu’un tout en restant eux-mêmes. Leur dernier opus a un titre qui pourrait faire penser à la mobilisation des « gilets jaunes » : « Vive la France », pour reprendre quelques airs du répertoire, classique, jazz ou variété et les transformer en du « Das Kapital ». Ils sont loin du divertissement. Proches, plutôt, d’une réflexion à la fois musicale et philosophique pour interroger un monde déjà mort et proposer des alternatives vitales. Continuer la lecture

Confrontation

Musiques actuelles

Les influences des jeunes musiciens d’aujourd’hui sont multiples. Pourquoi choisir ? Christophe Imbs, pianiste et compositeur, a décidé d’emmêler toutes les musiques pour faire surgir l’inattendu. Lourdeurs du rock, envolées du jazz, avec ce qu’il faut de force pour marteler la réalité d’un monde qui semble échapper à ses créateurs, d’un monde de mutations climatiques, culturelles, d’un monde qui se connaît plus de repères. Un mélange détonnant qui en laissera plus d’un-e sur le côté pour attendre l’accalmie… qui viendra tout en laissant percer l’angoisse de la barbarie qui se diffuse. Les migrations actuelles laissent percer des rencontres qui devraient permettre l’émergence de nouvelles cultures, une chance pour le jazz comme pour la culture française.
Anne Paceo, batteure, sait se prêter à ce jeu de tremblements pour habiller les compositions du pianiste et la rencontre effectue son travail de transcendance du talent des deux participants sans oublier le contrebassiste Matteo Bortone, arbitre indispensable. Un trio est né à l’alchimie bizarre, mystérieuse et pleine de promesses. Ne vous laissez pas rebuter par un abord criard. Il faut comprendre la révolte qui s’infuse face à tous les déchirements de la société incapable d’appréhender son propre rythme. « For Your Own Good » – le titre de l’album – est une invite. Pour votre propre bien, il faut écouter ce trio.
Nicolas Béniès.
« For Your Own Good », Christophe Imbs, Label Oh !/InOuïe distribution