Deux festivals de jazz

JAZZ
Le printemps est là !

« Banlieues bleues » à peine terminé en ce début du mois d’avril – un festival qui a tenu quelques-unes de ses promesses – que s’ouvre « europa djazz », ex festival du Mans. Depuis quelques temps déjà, il prend ses aises sur presque toute l’année en multipliant les initiatives surtout en direction des collégiens et des lycéens et en organisant concerts, conférences. Se prépare aussi « Jazz sous les Pommiers » à Coutances, qui suit une voie semblable. Ces deux festivals de nos printemps – le premier fête sa 36e année, l’autre sa 34e – se sont imposés comme des lieux incontournables pour les musicien(ne)s d’aujourd’hui. Ils réussissent un tour de force : présenter à la fois des figures connues, quelque fois des légendes comme Pharoah Sanders qui se produira à Coutances le vendredi 15 mai, ou des inconnu(e)s qu’il faut découvrir.
Les organisateurs, toujours sur le fil du rasoir de la baisse des subventions publiques malgré leur notoriété, sont obligés à la réussite. Il faut attirer du public pour justifier des crédits publics. Curieuse société que la nôtre qui oblige au succès ! Malgré cette épée de Damoclès, ils continuent de programmer des artistes jeunes qui ont besoin de ce coup de pouce. Les résidences servent aussi à permettre à un(e) musicien(ne) de créer une performance. Ce sera le cas à Coutances. Airelle Besson, trompettiste, présentera son travail de l’année. Le jazz fait ainsi la preuve de sa vitalité. De jeunes musicien(ne)s se tournent vers cette musique sans que, paradoxalement, le public ne rajeunisse…
« Europa djazz » a invité Vincent Peirani et Emile Parisien pour un « régional tour » (jusqu’au 10 avril) pour mettre en bouche avant les « Rendez-vous du printemps », une sorte de sacre, avec des Nuits – de la salsa, du jazz manouche, des fanfares – et un final, du 6 au 9 mai dans la belle Abbaye de l’Epau – fondée en 1229 par la Reine Bérangère de Navarre – qui verra Matthieu Donarier et Sébastien Boisseau pour un duo saxophone/contrebasse, la saxophoniste Alexandra Grimal, Louis Sclavis, Dominique Pifarély – un violoniste sensuel et actuel -, Airelle Besson, Paolo Fresu et beaucoup d’autres…
Coutances, localité de la Manche avec sa cathédrale en guise de promontoire, chevauchera les dates du Mans en commençant, cette année, le vendredi 8 mai avec le film « Whiplash » à propos duquel le batteur Mourad Benhamou donnera un aperçu de son talent, pour aller jusqu’au samedi 16 mai. Comme à l’habitude, le festival s’adapte au jeudi de l’Ascension. Le dimanche est réservé aux fanfares – ils ont prévu le soleil – et le mardi au blues. Larry Garner sera l’invité de cette soirée. On ne l’a pas vu sur les scènes françaises depuis longtemps et il ne faudra pas le rater… Kenny Garrett, Jacky Terrasson, Joe Lovano, Guillaume Perret – un saxophoniste qui s’affirme –, Henri Texier, un habitué, Paolo Fresu comme beaucoup d’autres… seront de ce feu d’artifice des jazz. Je donnerai, comme tous les ans, une conférence sur le 70e anniversaire de la fin de la guerre en faisant écouter la révolution de ce temps, le bebop.
Ces rendez-vous sont des moments de découvertes, de musiques, de musicien(ne)s. Il ne faut pas rater les concerts de midi, sous chapiteau, qui font, souvent, les madeleines de demain.
N.B.
Rens. Europa djazz, 02 43 23 78 99, www.europajazz.fr,
Jazz sous les Pommiers, 02 33 76 78 50, jsp@jazzsouslespommiers.com

Télémaque

Une poésie sans mots.

Télémaque catalogueTélémaque, peintre français né à Haïti en 1937, fait l’objet d’une exposition au Centre Pompidou et d’un livre proposant une monographie de ses œuvres couvrant les années 1958 à 2014. 250 reproductions pour faire connaissance avec cet artiste jouant avec ses souvenirs, objets du quotidien qui servent de points de repères, pour les noyer dans la mémoire de notre temps. Il aime la concurrence avec la poésie, déniant aux mots leur capacité de prendre la place de la peinture. Les explications des auteurs permettent d’interroger les œuvres pour pénétrer dans un univers étrange qui oblige à voir autrement.
NB
« Télémaque », Gérard Durozoi, David M Lemaire, Alexia Guggémos, Henri Griffon, Flammarion, exposition jusqu’au 30 avril.

Séminaire jazz du mercredi 26 novembre 2014

Bonjour,

Semaine chargée pour moi et pour vous.

Après l’économie, le jazz. Mercredi 25 novembre.

Nous quittons Kansas City (Missouri) à regret. Il me restait des musiciens à vous faire entendre.

je vous propose un échantillon – de références – de ce que nous avons entendu
Andy Kirk and his Twelve clouds of joy, avec Mary-Lou Williams, pianiste, compositeur et arrangeure. Des sorties récentes font la part belle à Mary-Lou. Voir les chroniques sur ce blog/site.

Je vous mets ci-après quelques extraits en MP3 de ce que je vous ai fait entendre.

Big Joe Turner, son grand succès « Corrine Corrina » (je vous ai fait entendre Rebecca…)

Le pianiste Pete Johnson, compère attitré de Turner, and his boogie woogie boys, « Cherry Red »

Mary-Lou Williams en trio, « Little Joe from Chicago »

Pete Johnson et Joe Turner dans ce premier grand succès « Roll ’em Pete »

Lester Young premier enregistrement en 1936, « Lady be Good », en compagnie de Count Basie (p), Jo Jones (dr) notamment. Sous le nom de « Jones-Smith inc. », le trompettiste Carl Smith a peu enregistré et on ne connaît pas de solos de lui, mais il fut un premier trompette important de l’orchestre de Basie. Les 13 musiciens étaient au Reno Club à KC et la musique ne s’arrêtait jamais sauf pour le changement d’orchestre…

Harlan Leonard and his rockets que je n’ai pas eu le temps de vous faire entendre, l’arrangeur Tadd Dameron, pianiste du groupe, deviendra un des grands compositeurs du bebop. « My gal Sal » de 1940

Lester Young en 1941 accompagnant Una Mae Carlisle dans « Blitzkrieg Baby »

Lester Young en 1944, « Blue Lester »

1942, premier enregistrement de Charlie Parker avec le Big band de Jay McShann, « Swingmatism »

Charlie Parker et « Dizzy » Gillespie avec Slam Stewart, bassiste fredonnant et le guitariste Slim Gaillard, MC, pour cette jam gravée en 1945 pour Savoy.

Julia Lee en 1947, pianiste et vocaliste, son grand succès « Snatch and grab it »

Quand Ravel et son infante servent de matériau pour un très bel arrangement pour deux musiciens dont l’élégance est le point commun, le trompettiste Buck Clayton et le tromboniste Vic Dickenson, en compagnie de Hal Singer (ts) pour ce « The Lamp is low » titre américain.

Décembre 1945, Lester Young à la sortie de l’armée, « These foolish things »

Un beau final…

Nous quittons donc le Missouri pour partie de nouveau vers le nord industriel, Philadelphie est notre arrêt pour 4 rendez-vous.
skylineLa ville de Benjamin Franklin a été, un temps, une concurrente de New York. Ville des arts et des sciences. Sa gare en forme de temps, inspiré par La Grèce et Rome – mais aussi la « Ville Blanche » de Chicago, au moment de l’exposition universelle.
Sans parler des Amish toujours présent, héritage du fondateur de la ville, Penn et des Quakers. Le film de Peter Weir, « Witness », « Témoin sous surveillance » pour le titre français », fait de la communauté Amish le personnage principal de ce film, avec Harrisson Ford (1985). Communauté présente au marché couvert de Reading Terminal. Repas et commerces tenus par la communauté…
Aujourd’hui, Philly fait bien silencieuse face à Big Apple qui ne dort jamais…
university-city-philadelphia-skyline-day-1400vpUn jazz spécifique est pourtant né là… Beaucoup des musicien(ne)s de cette Ville marqueront le jazz – et le jazz de New York – de leurs empreintes…

Les photos ci-dessous, de Francine Béniès, en guise d’entrée dans la ville de Philly. Elles datent du 17 septembre 2014

Photo 677

Photo 675

Photo 673

Photo 664

Ci-dessus quelques tableaux sur les murs de Philadelphie et ci-dessous l’entrée du Musée d’art moderne.

Photo 631

A mercredi, 18 heures – 19h30 au Café Mancel.

Nicolas BENIES.

Les pays émergents d’Amérique latine

Le basculement du monde.

Pierre Salama est un spécialiste reconnue de l’Amérique latine. Le livre qu’il vient de publier est apparemment un livre de cours sur « Les économies émergentes latino-américaines, entre cigales et fourmis ». Il est aussi une analyse des formes de sortie du sous développement comme des politiques à mettre en œuvre pour se situer dans le basculement actuel du monde qui voit surgir des nouvelles économies potentiellement dominantes, comme la Chine et d’autres en déclin comme les Etats-Unis. Comment se situent, dans ce contexte les grands pays latino américains ? Peut-on tirer des leçons du passé ? De la Chine ? Peut-on comparer ces économies classées comme émergentes après avoir été appelées « NPI », nouveaux pays industriels ? Comment expliquer les problèmes rencontrés actuellement par le Brésil ? Les questions sont multiples, les éléments de réponse incitent le lecteur à « faire » de l’économie, qui suppose de raisonner non pas à partir des seuls éléments économiques, mais à intégrer les luttes sociales et surtout l’intervention de l’Etat, les politiques mises en œuvre. Pour se donner des outils de compréhension d’un monde en complet bouleversement, un monde qui bascule. L’ancien est en train de mourir en laissant des traces, le nouveau à du mal à sortir des limbes. En ce sens, ce livre est un vrai manuel d’économie politique, pour tous, étudiants et enseignants.

Nicolas Béniès.

« Les économies émergentes latino-américaines. Entre cigales et fourmis. », Pierre Salama, Collection U/Armand Colin, 225 p.

Quand le livre fait le beau.

De catalogues en catalogues…qui peuvent être des livres tout simplement.

Les catalogues d’exposition ont une drôle de vie. Il en est qui disparaissent derrière les fastes de l’exposition, d’autres qui se mettent en lumière à la place de l’exposition, d’autres encore qui savent vivre leur vie. Tout est ouvert. Il ne faut se contenter ni de l’une ni de l’autre. Elle et il ne sont pas forcément complémentaires. Continuer la lecture

Du côté des nouveautés en jazz

Un groupe, un guitariste israélien et la suite….

Un autre retour, le groupe Quest qui avait marqué de son empreinte la fin des années 1970 et le début des années 1980. un groupe qui avait su synthétiser le free-jazz, John Coltrane bien sur, Bill Evans, Albert Ayler, Wayne Shorter, Miles Davis pour créer un « son » reconnaissable entre tous. Dave Liebman, sopraniste sans égal, une des grandes voix d’aujourd’hui, Richie Beirach, pianiste à la fois aventureux et classique, Ron McClure, bassiste conservant envers et contre tout le tempo nécessaire à la création et Billy Hart, batteur superbe, sorte de synthèse d’Elvin Jones et de Tony Williams ont construit ce quartet et une connivence résultat de longues années de pratique commune. Leur album précédent pour « out here », « Quest », faisait la démonstration de leur capacité à continuer de créer. Celui-ci a une ambition différente, rendre hommage à Wayne Shorter compositeur, grand compositeur que ce saxophoniste. Dans la production actuelle, cet album sort la tête de l’eau musicale et il continue à faire la preuve que ces quatre là ont eu raison de reconstruire leur groupe sans regarder vers leur passé glorieux – ce qui n’est pas facile notons-le en passant. Ils donnent pourtant l’impression de n’être pas totalement libre dans ces compositions qui ne font pas totalement partie de leur monde. Une des raisons c’est que la méthode de composition de Wayne Shorter, faite de glissements successifs, apparaît un peu trop. Le titre nous l’indique avec quelque humour, « Circular dreaming », un processus de rêves circulaires, une bonne définition de la musique de Wayne Shorter. Ce qui n’empêche de goûter le projet et… le groupe !

Nicolas Béniès

« Circular dreaming », Quest, Enja/Harmonia Mundi. Continuer la lecture

Un monde barbare et incertain. (article publié dans Critique Communiste)

 

Le 11 septembre 2001 marque l’entrée dans une phase nouvelle.

Le 11 septembre 2001 est une date importante. Elle marque l’entrée dans une phase nouvelle de l’histoire du monde. De nouvelles divisions apparaissent, des théorisations idéologiques deviennent force matérielle pour légitimer les guerres assurant la domination absolue des États-Unis. Le Canard Enchaîné du 22 mai 2002 se fait l’écho de la décision du gouvernement américain de bombarder l’Irak au plus tard en janvier 2003. L’administration américaine est en train de vouloir convaincre les gouvernements des pays de l’Europe qu’il faut se mettre au service de l’impérialisme américain pour combattre le terrorisme, laissant planer la menace d’attaques comme celles du 11 septembre 2001 sur les autres grandes villes.

Ce monde là est aussi un monde barbare. La disparition de l’URSS, la domination absolue du capitalisme à l’échelle mondiale pour la première fois depuis la révolution russe de 1917, le libéralisme comme seul corpus de pensée théorique ont conduit à la domination absolue – et nouvelle – des États-Unis sur le reste du monde. Continuer la lecture

Un monde barbare et incertain. (Publié dans Nouveaux Regards)

Pourra-t-il résister à la récession et au krach financier ?

Les attentats suicides de New York et Washington ont dévoilé la réalité de ce monde de l’après-guerre-froide où ne subsiste qu’une seule super puissance, les États-Unis, où la Ville-Monde, New York, tient dans ses mains la vie de milliards d’individus, de pays ou de firmes parce qu’elle est le premier centre financier du monde.1 Un monde sans règles, sans vision, sans futur où ne règne que la loi du plus fort. Continuer la lecture

Nouveautés en jazz de 1999

Les disques prioritaires

Sam Rivers’ Rivbea All-Star Orchestra : « Inspiration », RCAVictor/BMG.

Cet album mérite son titre. Oui, Sam Rivers, saxophoniste ténor et soprano, flûtiste est inspiré et son grand orchestre tourne au quart de tour comme une machine bien huilée qui aurait des années de route derrière elle. Ce n’est pas le cas pourtant. Il faut croire que, dans le studio, la magie du jazz était là, que c’était fête. Pourquoi cette euphorie ? Personne ne répondra. Elle est là, c’est l’essentiel. Le jazz montre toute son étendu de sons, de couleurs, de références, de joie de jouer, de rire, de peurs, d’angoisse, de larmes. Tout est là soudain, dans nos oreilles. La fraternité, la liberté, l’égalité composantes essentielles de cette musique-art-de-vivre qui sait se dépasser et continuellement, sont présentes. Sam Rivers nous apparaît sous les traits d’un jeune homme – il a en fait 68 ans, il est né en septembre 1930 – capable de s’étonner et de nous étonner, retrouvant une certaine naïveté non dénuée de rouerie pour nous faire entrer dans son monde. Un album qui sera l’album de l’année qui commence. Le compositeur a retrouvé là le bonheur de composer, d’improviser avec un orchestre de jeunes et de moins jeunes qui ont subi son influence et qui le connaissent bien, comme Steve Coleman, Chico Freeman, Ray Anderson, Joseph Bowie… Il faudrait tous les citer… Ne vous laisser pas influencer par les clichés qui traînent dans les têtes sur le « Free-jazz » inécoutables. Sam Rivers a cette réputation. Oubliez vos préjugés. Entrez dans le monde de Sam Rivers. Vous en resterez sur le cul. Continuer la lecture