A Pierre Salama, mon ami

Pierre Salama nous a quitté en ce début du mois d’août, deux jours avant son 82éme anniversaire et laisse un grand vide. Ce n’est pas qu’il n’avait pas prévenu. Mais lorsque l’espoir disparaît, il reste l’espérance qui reposait sur une croyance : je le croyais éternel, en l’espèce plus éternel que moi.
Je lui dédie cet article qui porte sur le jazz (et non pas la musique brésilienne) qui veut insister sur la différence entre souvenir et mémoire tout en cherchant à comprendre pourquoi le souvenir peut s’inscrire dans la mémoire collective.
De Pierre, j’ai un tas de souvenirs qui naviguent dans mon cerveau mais pour faire le point sur ses apports il faudra un travail de mémoire…
Nicolas

Au-delà des commémorations du 80e anniversaire du débarquement, le souvenir et la mémoire.
L’exemple du jazz.

Les commémorations donnent lieu à un processus bien connu : se servir du passé pour le décomposer et le recomposer au service du présent pour justifier des politiques. Il faut éviter ces travers pour appréhender, dans l’histoire, la place du souvenir et de la mémoire. Le jazz, musique de la danse, de la libération est aussi musique de la Libération. Dans quasiment tous les pays d’Europe, le jazz est la musique de référence. Continuer la lecture

Une face cachée de la Libération, le racisme. Le récit de Louis Guilloux.

Mémoire oubliée

Les libérateurs américains acclamés distribuant chocolat, chewing-gum et autres cadeaux arrivent avec leurs préjugés. Beaucoup de témoins ont voulu oublier les pendaisons de jeunes soldats Noirs dont les corps s’affichaient devant des bâtiments administratifs. Le souvenir ne les retiendra pas. Ils sont tombés dans les oubliettes de l’Histoire. Le travail de mémoire est là encore essentiel.
Pendant tout la période qui suit le débarquement, il y aura beaucoup de temps d’attente que ce soit en Basse-Normandie ou, un peu plus tard, en Bretagne. Confinés, ces jeunes gens – il ne faut pas oublier que la grande majorité d’entre eux sortent de l’adolescence, que la guerre est leur première expérience – cherchent à se distraire, s’alcoolisent et commettent des actes répréhensibles, violences, bagarres, viols. Les réactions de l’armée comme des populations ne seront pas les mêmes suivant la couleur de la peau. Continuer la lecture

UIA Caen le 2 décembre 2019

Bonjour,

La semaine dernière nous avons distingué souvenir et mémoire. Le souvenir est ce qui reste dans la mémoire individuelle et collective comme flash, comme image pour qualifier une situation. Ainsi en est-il de « In The Mood » de l’orchestre de Glenn Miller. Ce thème, composé par Joe Garland (saxophoniste ténor, ts) est le résultat de « riffs » de grands orchestres, est la référence musicale clé de la Libération, « fête folle ».
Le souvenir occulte la mémoire qui suppose un travail pour retrouver le mouvement du jazz pendant les années de l’Occupation et avant. Le paradoxe de la flèche de Zénon se retrouve. Si l’on photographie la flèche à différents moments de sa trajectoire, la flèche est semblable à elle-même. Le mouvement, le processus de sa trajectoire permet de se rendre compte des contraintes qu’elle subit. la force du vent, la traction du tireur… vont changer notre vision de la flèche.
Pour la mémoire, pour ce travail nécessaire, le mouvement est essentiel. Pour la remettre dans l’Histoire, dans le contexte général de la période considérée. Il faut retrouver les documents, les textes, les enregistrements (pour ce qui concerne le jazz) pour rendre compte de la réalité d’une époque. Continuer la lecture