Le masculiniste en action

Portrait d’un prédateur sexuel

Kate Foster, pour son premier roman « Le Baiser de la Demoiselle, histoire d’une femme décapitée », réussit le tour de force, en suivant le raisonnement de Christian, une jeune femme de la petite noblesse écossaise, d’obliger le lecteur à comprendre la toile d’araignée tissée par un prédateur sexuel pour annihiler la volonté de la proie en « lavant » son cerveau. Le laird – traduction écossaise de lord – James Forrester, son oncle, l’avait séduite tout en ayant des relations sexuelles avec ses domestiques et une prostituée installée à demeure.
Une coalition féminine et féministe aura raison de la suffisance et bonne conscience du laird assassiné à l’arme blanche. Lady Christian a été condamnée à la peine capitale et attend dans sa cellule de la prison de Tolbooth à Edimbourg le moment de l’exécution. L’Ecosse possède la « Demoiselle », une machine qui a servi de modèle à la guillotine française, pour les crimes commis par les nobles. Le tribunal n’a pas envisager les crimes du laird évidemment. Nous sommes en 1679 et la notion du consentement mettra encore quelques temps à exister
Un découpage fait de retours en arrière, d’un récit à deux voix, celle de Christian bien sur qui n’a pas confiance en elle, ne comprend pas les motivations ni les signaux d’alerte de son entourage et celle de Violet, la prostituée -seul moyen de sortir de la misère -, cynique, volontaire qui joue avec la vanité du laird. Elle s’en sortira grâce à la mère maquerelle qui connaît toutes les tares de la « bonne » société, du shérif notamment.
Un roman plus vrai que vrai.
Nicolas Béniès
« Le baiser de la Demoiselle. Histoire d’une femme décapitée », Kate Foster, traduit par Christel Gaillard-Paris, Éditions Phébus

Féministes, les mères ?

Un essai vigoureux, révolté et argumenté

« Briser la chaîne » – et non pas les chaînes, la différence est majeure ici -, au sous-titre volontiers provocateur malgré le point d’interrogation, « misogynes de mère en fille ? » pose des questions centrales. Dans cet essai Camille Lextray, avec une rage, une colère dynamique au rire communicatif pour démontrer la nécessité du féminisme. Combattant beaucoup d’idées reçues contenues dans ce qui s’appelle « le bon sens » autrement dit la perpétuation des règles en usage considérées comme éternelles, elle propose, comme c’est nécessaire à tous les niveaux, de former les formatrices en transformant les rôles dits traditionnels dans le couple. Les mères qui veulent protéger leur fille leur demande souvent, pour éviter les problèmes, de correspondre au modèle ambiant, le modèle du capitalisme patriarcal. Toutes les propositions qui passent par le « petit geste » qui ne sauve rien sont autant de justification du modèle global forgé par le pouvoir des hommes. Le féminisme doit déterminer une vision globale de la société qui passe par la destruction de ce mode de société. Continuer la lecture

Luttes féministes

BD
« Ne nous libérez pas, on s’en charge »

« La belle de mai » ne fait pas référence à mai 68, mais à la grève des cigarettières de la manufacture des tabacs, dépendante de l’État, à Marseille en 1887. Une lutte ouvrière et féministe, les revendications sont explicites. Le dessin, signé Élodie Durand, suit, dans le mouvement des corps, la prise de conscience collective dans le combat ainsi que la fierté d’être debout, de sortir de invisibilité pour être autre chose qu’une marchandise ou une épouse. L’histoire d’amour, enveloppée dans la fumée continuelle des cigarettes, sorte d’halo nécessaire pour dire que le travail suit pas à pas chacune de ces ouvrières au-delà de l’usine.
Une grève victorieuse, pour cette raison peut-être, oubliée. Mathilde Ramadier, pour le texte, met en scène cette « Fabrique de révolutions », sous titre de la saga. Émerge le parfum de fête qui va de pair avec la découverte du collectif, le moment où le « nous » remplace le « je » pour créer un autre monde. Le slogan « Ne nous libérez pas, on s’en charge » de ces combattantes résume bien la nécessité du féminisme.
Nicolas Béniès
« La belle de mai. Fabrique de révolutions », Mathilde Ramadier et Elodie Durand, Futuropolis