Un thriller sur la part noire de soi-même

Tout savoir du somnambulisme.
Un thriller est une mécanique. « Les yeux fermés » – c’est curieux la référence à Kubrick qui se retrouve, « Eyes Wide Shut » est un film qui a marqué beaucoup d’auteurs – permet à Chris Bohjalian d’attirer l’attention sur le somnambulisme et la manière d’être mort-vivant, loup-garou. Le rêve et la réalité s’entremêlent. Certains n’en ont pas souvenir, tandis que d’autres conservent une vague sensation de ce qui s’est passé.

Il pose le problème dans un cadre réduit, ici une famille de quatre personnes, le père, la mère et deux filles – 21 et 12 ans, l’aînée est la narratrice – dans un petit village où les maisons sont espacées pour éviter toutes les interférences. La clé se trouve donc dans la famille elle-même. La mère, somnambule, a disparu. Que s’est-il passé ? Le mari était absent : il participait à un congrès, il n’est pas coupable et la narratrice dormait. L’enquête semble piétiner d’autant que l’enquêteur – lui aussi atteint de somnambulisme, décidément – tombe amoureux de la jeune femme et réciproquement. Continuer la lecture

Les romans de la rentrée.

L’Arlésienne.

Jérémy Fel a préféré titrer son roman « Helena », personnage de mère qui n’apparaît qu’à la fin, comme contrepoint et facteur clé d’explication d’une partie de l’intrigue. Il est nécessaire de recoller les morceaux pour comprendre, enfin, les actes d’une demoiselle en perdition qui le restera dans l’impossibilité de se sortir du piège. Le piège de son enfance, de sa mémoire, de sa mère.
Histoire aussi d’une famille monoparentale, une autre La mère tient une place exorbitante pour ses trois enfants de maris différents. Seul l’aîné est le fruit de l’amour qui lui permettra, apparemment, de s’en sortir. La petite fille est choyée par sa mère et porte toutes les espérances déçues d’une mère qui s’est réfugiée dans une maison perdue au milieu des champs. Un huit-clos nécessaire pour rendre crédible les événements survenus mais qui étouffe le lecteur. Le cadet est perturbé par des violences qu’il a subies et dont son inconscient refuse de se souvenir.
De lui viendront tous les drames sans qu’il en soit réellement responsable. Coupable mais pas responsable ! La rencontre de toutes ces solitudes, de ces êtres sans amour ou d’amour trompé est la trame de ce roman. Il faut croire au choc, improbable, entre cette jeune fille de 17 ans, golfeuse, et la famille monoparentale de trois enfants.
Les réactions psychologiques sont bien décrites, avec lucidité et sans complaisance ni pathos mais le thriller a trop tendance à naviguer en circuit fermé sans références ni sociales ni sociétales. Il ne respire pas manquant d’oxygène. Le « dehors » devrait investir ces familles bien trop renfermées sur elles-mêmes.
Nicolas Béniès
« Helena », Jeremy Fel, Rivages