(Re)découvrir Frédéric Mistral.
Mirèio -Mireille – est un poème épique, une ode à la Provence et à sa langue qu’il revisite et, comme tout poète qui se respecte, permet de lui donner un statut et une grammaire. Walt Whitman, avec « Feuille d’herbe’, avait été prescripteur, dans ce même moment du milieu du 20e siècle, de l’Anglais américanisé qui se séparait du britannique.
Mistral est habité, comme Marx et Engels qui écrivent « Le manifeste du Parti Communiste », par l’utopie révolutionnaire de 1848, vague qui touche toute l’Europe, un soulèvement qui transforme le regard et le monde. Lamartine écrira, à propos de la première édition du poème, « la grande nouvelle :un poète épique est né ».
Pourtant, Mireille restera longtemps inconnu du lecteur français. Joseph Delteil s’en plaindra : « Soyons francs, écrira-t-il, qui lit Mistral ? En France, à Paris, qui lit Mistral ? Or la place de Mistral n’est pas à Maillane, mais à Paris, à Moscou, à New York. Aujourd’hui, en 1928, un jeune Français bien né peut lire en français Goethe et Dante mais pas Mistral. Je signale ça comme un scandale. »
Les éditions Actes Sud proposent la réédition du poème original assortie d’une traduction originale de Claude Guerre qui explique à la fois ses choix et son amour de Mistral comme de la Provence dans une avant propos empli du soleil et de vents. L’écriture du traducteur est rempli de références à cette langue et culture un peu oubliées qui se redécouvrent nécessairement pour apporter à toutes les autres cultures la manière de Mistral de concevoir le monde en charriant sa révolte contre toutes les injustices ? Ce poème qui fait de la mésalliance le cœur de son propos définit un projet républicain pour lier toutes les origines tout en les respectant.
Il faut découvrir la langue de Mistral, après avoir lu la traduction, pour se laisser emporter dans ces contrées merveilleuses que le poète transforme. Vincent Van Gogh comme Renoir – et tous ceux classés « Impressionnistes » ou « fauvistes », des classements sans foi ni loi – influencent l’écriture du poème. Continuer la lecture