La solitude du tueur de fond.
« L’agent seventeen », un titre qui ne laisse pas planer de doute sur le héros, ou plus exactement sur le personnage central qui ne nous laissera rien ignorer de ses doutes, de ses questionnements divers concernant tous les aspects de sa vie qu’elle soit professionnelle ou privée. A proprement parler, il envahit toutes les pages. Le thème est connu depuis Freud : tuer le père pour exister. Ici, 17 doit tuer 16 sur ordre de son supérieur à la CIA. Pourquoi ce meurtre ? Le tueur à gage s’interroge, nous pas tellement. On voit venir le coup. Pourtant là n’est pas l’intérêt de cette chronique violente. Il se trouve dans les glissements, dans les clins d’œil, dans les fausses références mais aussi dans les héros des films et romans d’espionnage, à commencer par Jason Bourne citée par l’auteur plus que James Bond. Continuer la lecture
Archives par mot-clé : 10/18
Roman, David Joy analyste du mal de vivre
Roman vrai
David Joy trace les dessins de vies sans but autre que les paradis artificiels pour faire semblant de vivre. Errances dans un monde incompréhensible dans lequel les raisons de croire ont disparu. Comment survivre dans les Appalaches ? Le désespoir se niche dans les paysages, dans ces contrées étranges où le monde lui-même semble avoir disparu, englouti dans on ne sait quel puits dont la trace s’est perdue. La solidarité, l’amour surnagent, luttent pour conserver leurs droits mais ils restent dilués dans des silences serrés comme si les mots restaient collés à la terre, désespérés eux aussi.
Les réserves Cherokee ne sont pas loin tout en étant lointaines. Le Casino est la seule activité lucrative et renforce l’aspect factice de la réalité, laissant toute la place à l’appât du gain. Les drogues circulent librement. Les truands sont protégés par des policiers corrompus. Ils ont, bien sur, des excuses. Seuls les junkies sont les dindons d’une farce qu’ils alimentent sans cesse pour trouver des trésors dans la poudre blanche. Continuer la lecture
Polar, quand le polar se fait Histoire, du 16e siècle à 1962, de la Provence à Marseille
Plongée dans les guerres de religion en Provence
Le prétexte de cette plongée : le trésor que Charles-Quint aurait laissé dans l’Église d’Aix, enterré sous les dalles. Pour le découvrir, il faut décrypter deux quatrains – dont un en français en forme de rébus – objet de toutes les recherches et des rivalités. Catherine de Médicis fera appel à Nostradamus pour trouver les clés de compréhension. Jean d’Aillon mettra en scène son personnage principal, Yohan de Vernègues, fil conducteur de l’enquête, qui louvoiera entre moines assassins envoyés par l’Inquisition, les croyants catholiques et reformés rivalisant de violences pour imposer leur loi et leur pouvoir au-delà même de leur religion. Richelieu, en bon centralisateur, y mettra un terme. Sans compter les intrigues internes à la Cour du Royaume de France et la cohorte de jeunes et jolies demoiselles au service de la Reine Catherine. Un mélange explosif et meurtrier. Continuer la lecture
De la Corée à l’Afrique du Sud morceaux d’histoire
Polar coréen
Mettre en scène dans un costume de Sherlock Holmes – le fameux trench-coat – quatre femmes d’âge divers, mères de famille, dont une fille mère, dans un quartier de Séoul, avec, comme quartier général la supérette Gwangseon tenue par l’une d’elles est une gageure. Ce n’est pas la seule. Faire rire, sourire des références des romans policiers britanniques – Conan Doyle, Agatha Christie en particulier – tout en menant une enquête policière sur un tueur de femmes est l’autre pari tenu par Jeon Gunwoo. « La section des enquêtrices mères au foyer » comme elles se nomment fait preuve d’un sens de l’observation et de déduction tout en accumulant les gaffes et les erreurs. Continuer la lecture
Des nouvelles de Nesbo et la suite des aventures d’espion vues par Semenov
Des histoires au coin du feu
Le temps de cet automne ne dit rien sur l’hiver qui vient. Une saison propice aux contes, aux histoires qu’on se raconte pour se rapprocher d’un feu qui s’éteint. « De la jalousie », de Jo Nesbo, fait partie de cette panoplie. Des nouvelles qui se veulent révélatrices de notre monde, de nos comportements assez semblables finalement malgré les frontières. Continuer la lecture
Polar De Naples à nulle part et partout en passant par Chicago lieu d’exil des Japonais-Américains
Visions de morts et d’amour
Retrouver le commissaire Ricciardi et Naples qui s’apprête à fêter les 10 ans de la marche sur Rome et l’arrivée au pouvoir du Duce, de Mussolini – le 29 octobre 1922 – est un plaisir presque coupable. Le polar se fait poésie pour conter l’amour qui traverse les océans sous la forme d’un boxeur célèbre et célébré, d’un crime crapuleux au nom d’un amour égaré dans les plis de la folie et du commissaire lui-même incapable de répondre à l’être aimée, secoué par les souvenirs de sa mère et de sa propre maladie, héréditaire comme il se doit. Continuer la lecture
Polar : Un nouvel Arlidge
M.J. Arlidge en une série qui met en scène Helen Grace, cheffe d’une escouade de la police de Southampton. La solidarité de son équipe a été mise à mal. Helen a été accusée à tort et sort juste de 9 mois de prison. Les traces sont sensibles. Faisant office de commissaire, elle est confrontée à une série de meurtres apparemment sans lien entre eux.
L’enquête se transforme vite en un portrait d’adolescentes en butte, à cause de son père alcoolique, au harcèlement de ses camarades. C’est aussi une immersion dans cette classe moyenne déclassée qui ne sait plus quelle est sa place dans cette société fortement marquée par les effets des politiques néo libérales, de baisse des dépenses sociale.
« A la folie, pas du tout » – le titre original « Love me not » est plus explicite – fait exploser les secrets de famille qui semble toucher toutes les familles, celle d’Helen ne fait pas exception. Une découpe au scalpel de cette société totalement bouleversée par les coups de massue de Thatcher d’abord et des gouvernements qui ont suivi. Continuer la lecture
Polar very british
Une adolescence à Southampton
M.J. Arlidge en une série qui met en scène Helen Grace, cheffe d’une escouade de la police de Southampton. La solidarité de son équipe a été mise à mal. Helen a été accusée à tort et sort juste de 9 mois de prison. Les traces sont sensibles. Faisant office de commissaire, elle est confrontée à une série de meurtres apparemment sans lien entre eux.
L’enquête se transforme vite en un portrait d’adolescentes en butte, à cause de son père alcoolique, au harcèlement de ses camarades. C’est aussi une immersion dans cette classe moyenne déclassée qui ne sait plus quelle est sa place dans cette société fortement marquée par les effets des politiques néo libérales, de baisse des dépenses sociale.
« A la folie, pas du tout » – le titre original « Love me not » est plus explicite – fait exploser les secrets de famille qui semble toucher toutes les familles, celle d’Helen ne fait pas exception. Une découpe au scalpel de cette société totalement bouleversée par les coups de massue de Thatcher d’abord et des gouvernements qui ont suivi.
La paranoïa tient sa place comme la vengeance – même si les cibles ne sont pas les bonnes – qui provoquent le besoin de reconnaissance. « Aimez-moi » sinon « suppliez-moi » pourrait raisonner le fonctionnement de la société.
Des personnages attachants qui évitent tout manichéisme.
Nicolas Béniès
« A la folie, pas du tout », M.J. Arlidge, traduit par Séverine Quelet, 10/18
Les polars plongent dans l’histoire : la France de 1974, Cracovie à la fin du 19e, Ratisbonne en 1662
1974, une année noire
La mémoire de ce temps se trouve ravivée par Xavier Boissel qui place ses personnages dans ce moment qui, politiquement, de transition. Pompidou avait déjà largement rompu les amarres avec les « services spéciaux » du gaullisme, le SAC – Service Action Civique, pas mal comme intitulé pour des basses œuvres – notamment. Il leur avait coupé les subventions. Il fallait bien qu’il trouve d’autres sources de financement en s’acoquinant avec les anciens de l’OAS – ils s’étaient pourtant combattus – et la pègre. L’hypothèse, crédible, formulée par l’auteur pour trouver de l’argent, le trafic de drogue. Continuer la lecture
Polar historique et sanglot d’amour
1951, la guerre n’est pas finie
François Médéline est un amoureux des paysages de la Drôme. Il a raison. Il les décrit avec une plume habile qui leur rend tous leurs mystères et leurs profondeurs. « Les larmes du Reich », titre de roman, sonnent comme un, avertissement. Les apparences, des premières pages, sont trompeuses. L’inspecteur Michel est-il vraiment celui qu’il dit être ? Pourquoi recherche-t-il activement une petite fille et sa mère ? D’où lui vient l’argent qu’il dépense à flot continu ? Pourquoi supprime-t-il les témoins potentiels ?
Des questions multiples qui trouvent leur origine dans la déportation des Juifs, de ces Juifs, Juives français.e.s qui se sont découverts juifs au moment des rafles, notamment celle dite du Vel’ d’Hiv. Ielles n’avaient pas cru aux avertissements. Comme en Allemagne. Ce polar est aussi une grande histoire d’amour, contre tout ce monde nazifié de la guerre et des camps de concentration, une histoire qui ne peut que mal se terminer.
Un roman qui plonge dans le contexte du début des années 1950 dans lequel les traces de la guerre restent encore présentes. L’auteur se sert aussi des chansons de l’époque pour les titres de ses chapitres. Une réussite.
Nicolas Béniès
« Les larmes du Reich », François Médéline, 10/18