Jazz, Dave Liebman, rencontre au sommet

Sous la cendre, la création encore.

Aucun album signé par Dave Liebman, saxophone soprano, ténor et flûtes, ne laisse tranquille. La sonorité des instruments qu’il se refuse à cajoler est au service de compositions interrogatives sur notre monde absurde tout en dégageant créativité et émotions. Il sait alterner les voix et les métriques pour envoyer l’auditeur vers d’autres horizons. Un de ceux qui marquent le passage entre les deux siècles.
Est-ce l’âge, la décomposition des Etats-Unis – bien mise en évidence par l’élection de Trump, postérieure à la date d’enregistrement de cet album -, la volonté de retrouver des compagnons un peu perdus de vue pour un voyage dans le temps et dans l’espace ou tout simplement pour proposer un bilan de ces années de feu que furent ces années de l’après 1968. On dira que c’est un peu la mode. Ce sera vrai. Tout dépend de la manière de le faire. Nulle nostalgie, juste cette mélancolie nécessaire pour faire le deuil d’un pan de notre histoire collective et personnelle qui donne l’impression de se clore. Continuer la lecture

JAZZ. A deux, c’est mieux ?

Un art qui se perd…

kenny_barron_and_dave_holland-couv-585Cet album tient un titre, « Art of Conversation », et il le tient bien. Kenny Barron, pianiste, né à Philadelphie le 9 juin 1943, sait tout du jazz. Dave Holland, britannique de départ devenu totalement jazz, a baladé sa contrebasse dans tous les groupes pour finir par diriger le sien où il a permis la découverte de nouveaux talents. Les réunir ne venait pas tout de suite à l’esprit.
Une bonne idée pourtant à les entendre dialoguer. Un échange, une interaction sans jamais hausser le ton. Les aspérités de la conversation n’apparaissent qu’au bout d’une écoute attentive. Chacun se raconte tout en se gardant d’imposer son histoire. Bud Powell accompagné de Monk, « In Walked Bud », est invoqué par Kenny – Bud fut son voisin -, Kenny Wheeler, trompettiste et compositeur qui nous a récemment quittés, « Waltz for K.W. » par Dave Holland – ils avaient joué ensemble aux côtés de Anthony Braxton pour des albums qui restent, de référence – ou encore Billy Strayhorn, Charlie Parker… musiciens qui font aussi partie de notre mémoire, de notre histoire.
imagesSi cette conversation est aussi affûtée, c’est qu’elle est le résultat d’une tournée effectuée pendant l’année 2012. Contrairement à une tradition récente, cet enregistrement en studio ne précède pas la tournée mais la conclut. Le CD, souvent, sert de carte de visite pour obtenir des engagements alors qu’il devrait être la synthèse des apparitions en public.
Kenny Barron et Dave Holland continue de se produire. En septembre on a pu les entendre à La Villette en septembre et, plus récemment, au New Morning… Ne les rater pas…
C’est aussi, cette première rencontre entre les deux hommes, la renaissance d’un label mythique, « Impulse ! ».
Deux réussites. Retrouver un label disparu qui fut celui de Coltrane – Bob Thiele en fut le producteur – et une conversation qui vous suivra tard dans la nuit autour de ce cognac que ces deux là ont dû se partager…
Nicolas Béniès.
« The Art of Conversation », Kenny Barron/Dave Holland, Impulse distribué par Universal.
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