Jazz, Un continent oublié

Les dames du jazz.

Les femmes, d’une manière malheureusement un peu trop générale, sont les grandes oubliées de toute histoire et de l’histoire culturelle en particulier. C’est le cas dans les mondes du jazz mais il est trop facile de mettre en cause le « machisme » du blues comme du jazz pour expliquer cet ostracisme. Les exemples sont multiples ailleurs. Ce rejet a des causes sociales et politiques bien mises en lumière dans l’essai de Roland Pfefferkorn, « Genre et rapports sociaux de sexe », coédition Syllepse/Page deux.
Il fallait bien tenter de remédier à cette absence, la combler pour commencer un travail de mémoire absolument nécessaire. Oublier les femmes c’est se priver d’une partie du patrimoine de l’Humanité, c’est une amputation volontaire et sans excuse. Heureusement chercheurs et chercheuses ont permis de redécouvrir une partie de ces créatrices. Il en reste par trop.
Pour le jazz, le travail avait commencé avec un double CD du label Jass Records intitulé simplement « A double disc feminist restropective », « Forty Years of Women in Jazz » qui permettait de découvrir toutes ces musiciennes laissées de côté par les maisons de disques comme ce grand orchestre « The International Sweethearts of Rhythm » ou la trompettiste Dolly Jones et beaucoup d’autres. Depuis cette parution, d’autres ont suivi moins virulents dans leur présentation pour continuer à découvrir ces trésors cachés.
Encore aujourd’hui, les femmes dans le jazz sont difficilement reconnues. Sauf les chanteuses qui ont droit, dans la plupart des histoires du jazz, à leur chapitre à part comme si elles ne faisaient pas partie intégrante de cette construction culturelle. Bizarre, et d’autant plus bizarre que chacune de ces chanteuses est une musicienne accomplie. Il est possible de démontrer que Bessie Smith – dite l’impératrice du blues – n’a pas seulement influencé les autres chanteuses mais aussi les musiciens. Bud Freeman, saxophoniste ténor contemporain de Bix Beiderbecke, le reconnaissait affirmant toute son admiration à la chanteuse. Billie Holiday a eu une influence profonde sur tous les instrumentistes qui ont suivi…
Pour dire que ce coffret de trois CD, « Jazz Ladies », vient renforcer à la fois notre connaissance et rafraîchir la mémoire défaillante de cette société qui n’arrive pas à présenter son patrimoine culturel. Jean-Paul Ricard, auteur du livret dans lequel il donne les renseignements nécessaires sur chacune des musiciennes, propose une lecture en trois parties. D’abord les pianistes où brillent Lil Hardin Armstrong et Mary Lou Williams, ensuite les autres instrumentistes – les femmes jouent de tous les instruments y compris de la batterie au grand dam des « machistes » – et, enfin les groupes uniquement composés de femmes, les « All Girls Band » dont celui cité plus haut ou ceux réunis par Beryl Booker, pianiste engagée par Billie Holiday pour sa tourné en Europe au début des années 1950…
Les découvertes sont au rendez-vous. Je suis sur que vous ne connaissez pas la trompettiste Clora Bryant ou la pianiste Pat Moran… Ouvrez ce coffret, un double plaisir vous y attend, celui de la surprise et celui de l’écoute…
Nicolas Béniès.
« Jazz Ladies. 1924-1962 », présenté par Jean-Paul Ricard, coffret de trois CD, Frémeaux et associés.

Note : ce coffret vient illustrer un article ancien que j’avais commis sur « les femmes du jazz » que vous trouverez sur ce site.

Réflexion : en regardant sur Google en faisant « Ladies of Jazz », on tombe surtout sur des chanteuses. les clichés ont la vie dure.

Les femmes du JAZZ, Mary-Lou Williams

A Mary Lou, en mémoire de toutes les femmes ignorées

Il a fallu attendre. Consacrer un coffret de trois CD pour faire vivre l’art magnifique et original d’une des musiciennes, Mary Lou Williams, qui ont marqué l’histoire du jazz, avait l’air d’une entreprise périlleuse. Enfin, il est là. Jean-Paul Ricard signe un livret d’une grande justesse pour rendre sa place à la pianiste/compositeure – que je préfère à compositrice.
Notre présent est fait de commémorations du passé. Tout est bon pour faire oublier les causes des événements pour se contenter uniquement d’émotions, de ressentis. Il est, pourtant, des anniversaires qui s’oublient. Celui de Mary Lou en fait partie. Continuer la lecture

Hommage à Marian McPartland, interview dans DownBeat de 1957

by Dom Cerulli // September 1957
Marian McPartland: What’s It Like To Be a Woman in a Man’s Jazz World? It Has Problems
Marian McPartland threw back her head and laughed. “You have no idea how often I’ve been asked that,” she said. “And, actually, I don’t know how to answer it.” The questions were: What are your comments on being a woman in a man’s world, the world of jazz? Are there advantages and disadvantages?

A little of both,” she answered. “I have come to the point where I try not to think about it at all. I just try to concentrate on improving my playing. I’d rather think of myself as a piano player, anyway

Marian McPartland: What’s It Like To Be a Woman in a Man’s Jazz World? It Has Problems
by Dom Cerulli — 9/1/1957
An Exclusive Online Extra
Marian McPartland threw back her head and laughed. “You have no idea how often I’ve been asked that,” she said. “And, actually, I don’t know how to answer it.” Continuer la lecture