Jazz, Paul Jost

Paul Jost, « Simple Life » ?

Paul Jost a déjà une carrière derrière lui comme batteur, arrangeur et compositeur issu de la ville de Philadelphie, pas seulement connu pour Benjamin Franklin mais aussi comme terreau du jazz. Il est devenu vocaliste pour ce premier album, « Simple life » référence à la chanson « Give Me the Simple Life », un vœu plutôt qu’une réalité. Il fait la preuve dés l’entrée de toutes ses qualités. Un arrangement original, un scat qui défie toutes les frontières et une assise rythmique solide, c’est bien le moins.
Il a su s’entourer. Joe Locke au vibraphone, invité sur quelques plages, brille de tous ses feux jusqu’à brûler la politesse au leader et un trio – Jim Ridl au piano, Dean Johnson à la contrebasse et Tim Horner à la batterie – qui apporte le background nécessaire à toutes les envolées du chanteur pour le servir au mieux tout en faisant la preuve qu’ils constituent un vrai trio.
Une découverte un peu gâchée par la présence de fantômes à qui Paul Jost fait un peu trop penser : Tony Bennett – il lui ressemble un peu – et Mark Murphy. Des noms évocateurs qui limite mon plaisir…
Nicolas Béniès
« Simple Life », Paul Jost, Jammin’ colorS distribué par L’autre distribution

Jazz, Pierre Christophe live à New York

Melting-pot musical

Pierre Christophe, pianiste, sait se souvenir de tous les styles comme son maître Jacki Byard – un peu trop oublié – pour faire ronfler le piano, lui redonner sa capacité d’épuiser tous les univers du jazz, du boogie jusqu’aux groupes de Charles Mingus sans oublier les musiques d’aujourd’hui. Une manière d’entremêler toutes les mémoires, toutes les époques pour le plaisir de se retrouver, pour la nécessité de ne pas rompre tous les liens avec le passé.
Il n’a pas choisi la facilité. Le trio qu’il a constitué n’est pas traditionnel. Une basse, Joe Martin, à qui est dévolu le rôle de gardien du temps tout en lui conservant une place de soliste à égalité avec les deux autres, une performance et un saxophone ténor, Joël Frahm, un jeune musicien qui perce sur le scène new-yorkaise très encombrée comme toujours, capable d’évoquer les mânes de tous les grands ancêtres et de laisser percer sa propre sonorité, sa propre capacité à exister.
Le trio se fait volontiers quartet pour rendre vivante la musique composée par Jacki Byard. Une musique qui ne se donne pas l’air mais sait provoquer et titiller le corps et l’âme. Enregistré en public, comme le dit le titre de l’album : « Live at Smalls », un club de New York qui obligé les trois compères à se surpasser pour convaincre l’auditoire américain. Et ça marche…
« Live at Smalls », Pierre Christophe, Camille Productions distribué par Socadisc.

Jazz, Rhoda Scott

L’orgue Hammond dans toute sa splendeur féministe.

L’âge ne fait rien à l’affaire, Rhoda Scott reste la personnification de cet instrument bizarre né à Philadelphie au milieu des années 1950, l’orgue Hammond – du nom de son inventeur. Elle renoue ici avec le duo pour faire la démonstration des capacités de son instrument qu’elle caresse avec ses pieds nus, de susciter la danse, d’évoquer les blues pour faire sauter le cafard. « Movin’ Blues » est un titre en adéquation avec son contenu. Le groove est invité et ça bouge dans tous les sens. Je vous défie de rester assis en entendant la composition éponyme. Elle déménage avec une joie communicative et le batteur Thomas Derouineau est un compagnon idéal pour asseoir la performance de l’organiste.
Elle sait aussi, via la composition de Duke Ellington, « Come Sunday » – une erreur de plages pour deux compositions du Duke, « Caravan » est en 5, « Comme Sunday » en 3, sur mon exemplaire – extrait de la suite « Black, Brown and Beige » faire référence à la fois au Gospel et aux combats pour les droits civiques qu’elle inscrit dans les luttes féministes. Son groupe, « Lady Quartet » en témoigne aussi.
Une musique vive, vivante, joyeuse qui sait ce que le malheur veut dire.
Nicolas Béniès
« « Movin’ blues », Rhoda Scott, Sunset Records distribué par L’autre distribution