Facettes de Daniel Zimmermann en dichotomie ?

Le trombone dans tous ses éclats.

Deux albums viennent de paraître qui permettent de dresser un portrait contrasté du trombone jeté dans les eaux troubles du jazz via Daniel Zimmermann, l’un des virtuoses de cet instrument singulier rétif à toutes les cases dans lesquelles on veut l’enfermer. Continuer la lecture

Jazz. En direct du Brésil

Tromboniste et Carioca, Raul de Souza, entre samba et jazz.

RaulRaul de Souza est né en 1934 à Rio de Janeiro. Il a donc 81 ans. Il part, une fois encore, sur les routes pour une tournée internationale sur la base des compositions de cet album, « Samba jazz » toutes de sa plume. Ce trombone à coulisses est un curieux instrument. Il sonne fortement les temps dans ses premières années à la Nouvelle-Orléans – il faut entendre Kid Ory figure importante du style « tailgate » – pour s’émanciper via Jack Teagarden ou Dickie Wells et devenir un soliste sans attache par la grâce de Jay Jay Johnson.
Raul de Souza connaît visiblement cette histoire. Son trombone sait se faire mémoire du jazz en y mêlant celle de la samba, de la bossa nova, de l’air respiré à Rio. La poésie, la grâce de Jobim, les mots de Vinicius de Moraes se retrouvent en train de jongler avec la dureté, la hargne, la colère de Sonny Rollins et du jazz en général.
Dans cet album, « Brazilian Samba Jazz », il permet aussi de découvrir des musiciens de la génération d’aujourd’hui qui lui donnent la réplique dans ce dialogue intergénérationnel nécessaire pour permettre au patrimoine de vivre avec de nouvelles couleurs.
Pourtant, à vouloir un peu trop jouer sur la nostalgie et les ballades les compositions n’arrivent pas à de détacher les unes des autres. Un peu plus de violence, de révolte ouverte – le trombone est l’instrument pour ce faire – n’aurait pas desservi le propos. Cocktail qui aurait permis de se rendre compte que coller jazz et samba n’est pas une sinécure surtout lorsqu’il s’agit de tempo.
Ces réserves ne doivent pas empêcher d’entendre ce musicien et ses compagnons qui expriment un aspect de la réalité culturelle. Il faut ajouter qu’un label qui a décidé de s’appeler « Encore Merci » ne peut pas être fondamentalement mauvais…
Nicolas Béniès.
« Brazilian Samba Jazz », Raul de Souza, Encore Merci distribué par Rue Stendhal

Ray Anderson, tromboniste

La joie d’être en vie.

Ray Anderson est tromboniste, compositeur, créateur de cet « Organic Quartet » composé d’un orgue – tenu par Gary Versace plutôt dans la lignée de Larry Young que de Jimmy Smith -, d’une batterie – incarnée par Tommy Campbell – et d’une guitare – Steve Salerno – pour une musique sans frontières, dansante et joyeuse. Elle nous transporte des Antilles aux confins de la musique contemporaine avec le même enthousiasme et cette manière de refuser de rompre toutes les amarres de la mémoire. Quelque chose de la musique originelle de la Nouvelle Orléans passe ici comme une référence à Katrina et à ses destructions qui oblige à reconstruire, refonder une musique, des lieux pour la faire entendre de nouveau.
Rien, pourtant n’aura été épargné au tromboniste. Le diabète alors qu’il a à peine 20 ans, une paralysie faciale aux débuts des années 1980, sa femme morte d’un cancer et lui-même obligé de composer avec un cancer du larynx… A 62 ans, c’est un beau parcours un peu à l’image de notre monde.
Rien, malgré tout, ne le détourne de la musique et de ce trombone avec lequel il vit, c’est évident, une histoire d’amour. Rien non plus ne l’empêche, avec nous comme réceptacle et amplificateur, de célébrer la vie. « Being the point », être le point, d’arrivée, de départ ? Pour savoir se redessiner une fois encore, faire la preuve que le combat est joyeux et se refuse à tout apitoiement sur soi-même. Il faut créer encore et encore pour affirmer que la vie vaut d’être vécue et entendue.
Refuser cette musique serait une erreur. A 12 ans, raconte Ray Anderson, il a entendu Jimmy Smith – c’était en 1964 – dans cet album Blue Note (superbe il faut bien le dire) « Back at the Chicken Shack » et quelques 50 ans plus tard, il met l’orgue au centre de son quartet sans perdre sa place de soliste principal. Pour la petite histoire, le batteur Tommy Campbell est le neveu de Jimmy Smith, façon de marier toutes les jazz pour construire une musique de notre temps qui permet de se sentir bien contre le monde…
Nicolas Béniès.
« Being the point », Ray Anderson’s Organic Quartet, Intuition Records, distribué par Socadisc, paru en mai 2015.

JAZZ Trombone (allemand)

Trombone, il t’aime.

Einem.ArtMax Von Einem, 28 ans, tromboniste résidant actuellement à Cologne (Allemagne) a participé à tos les big bands que compte son pays. Pour y faire ses classes et déclarer son amour pour cet instrument étrange qui, en Allemagne, a connu des développements inédits via notamment Albert Mangelsdorff. Einem ne renie pas cette filiation.
Pour cet album, « Lamara », il a constitué un quartet pour mettre en valeur le trombone. Un pari difficile. Il faut faire preuve d’idées, de virtuosité pour éviter de lasser l’attention. Il multiplie pour ce faire les ambiances, les références aux musiques. Il affirme que le « jazz n’est pas old fashioned », dépassé et il faut le répéter. Le jazz reste une des musiques fondamentales de notre temps même si, actuellement, il a du mal à s’outrepasser. Il l’avait toujours fait dans le passé. Depuis les années 1980, il subit une sorte de coup d’arrêt à son expansion. Une sorte de stagnation bien en phase avec la croissance zéro… Continuer la lecture