Départ vers des contrées ignorées
Si vous ne pouvez aller aux festivals de jazz, il faut s’organiser pour que les festivals viennent à vous. Installez-vous confortablement et prenez des disques parus cette année. Continuer la lecture
Départ vers des contrées ignorées
Si vous ne pouvez aller aux festivals de jazz, il faut s’organiser pour que les festivals viennent à vous. Installez-vous confortablement et prenez des disques parus cette année. Continuer la lecture
Henri Texier, une légende européenne du jazz !
Henri Texier, contrebassiste, a été choisi par la revue « Jazz thing » pour illustrer son centième numéro, paru en septembre 2013. Il devait y avoir 5 concerts – et 5 CD – dans cette série. Concerts au « Gütersloh », situé au centre de l’Allemagne, endroit connu pour son innovation architecturale, un écrin pour le jazz.
Henri, avec son quartet – Sébastien Texier, saxophone alto, clarinette, basse clarinet, François Corneloup, saxophone baryton et Louis Moutin à la batterie – signe le n° 5 de cette série. Qui, finalement, s’est poursuivi. Récemment, nous avons chroniqué le n°6 du bassiste Arild Andersen. Si les objectifs sont atteints, 10 CD devraient voir le jour…
Henri, pour son concert, continue de creuser sillon de ces « Natives Lands » comme on dit désormais aux États-Unis. Après les nations perchées sur les gratte-ciel, c’est le tour des « Dakota ». « Dakota Mab » – titre de l’album et du concert – débute, pourtant, par un hommage à Elvin Jones, batteur toujours de référence, « ô Elvin » un peu gâché par un solo légèrement décousu de Louis qui a voulu trop bien faire. Il faut dire qu’évoquer Elvin est une tache difficile pour n’importe quel batteur. Henri ne lui a pas fait de cadeau. Le solo de Sébastien sur ce même thème est un modèle du genre.
Le reste nous fait passer des « Hopi » au « Comanche » en passant par le rêve des Najavos, « Najavo Dream » pour terminer sur un chant, « Sueno Canto » et l’interview indispensable en anglais comme il se doit, un anglais humoristique à la manière de Henri.
Le tout ne dresse pas vraiment un portrait du compositeur/bassiste mais s’arrête sur un moment actuel de sa création. Superbe. Aussi indispensable que le précédent. Différent : les musiciens ont plus d’espace pour s’exprimer qu’en studio et le public participe de cette création. Henri, dans l’interview parle de sa musique – du jazz en général ? – comme une musique de la liberté, de l’égalité et de la fraternité. C’est l’impression que nous laisse cet album.
Nicolas Béniès.
« Dakota Mab. Live at Theater Gütersloh », Henri Texier, Intuition Records distribué par Socadisc.
Histoires rêvées
Un quartet à la fois étrange et traditionnel. Orgue, Olivier Caudron, guitare, Pierre Durand, batterie, Guillaume Dommartin soit un trio qui fleure bon la fin des années 50, de ces groupes formés par Jimmy Smith pour faire avancer l’orgue Hammond B3 sur le devant de toutes les scènes, une formule qui sera reprise jusqu’à son usure totale. Étrange tout de même par l’adjonction du leader de ce quartet, Sébastien Texier, clarinettiste et saxophoniste alto venu avec ses rêves pour transformer ce trio classique en rêveurs d’un nouveau monde. « Dreamers », un titre qui nous va comme un gant. Nous aussi nous sommes embarqués sur le même bateau. Un « radeau de la Méduse » transformé en voilier par la force d’une imagination partagée.
Les compositions de Sébastien s’inspirent de toutes les cultures matinées d’une référence omniprésente aux groupes de Ornette Coleman caressée par une mémoire du jazz qui sert de ligne directrice. L’énergie pousse le groupe souvent en dehors de ses propres définitions pour aller voir ailleurs si le monde est plus fraternel.
Il arrive pourtant qu’un thème fasse trop penser à un des précédents et provoque une perte d’attention mais le suivant relance les dés… Le son de la clarinette retient toujours l’oreille. La rencontre avec cet instrument tient, pour le leader de son rêve d’amour le plus fou et le plus total. La clarinette et Sébastien font corps et pas seulement corps à corps. L’alto transbahute moins de mystères mais plus de mémoire, une alliance nécessaire.
Le tout est un des albums convaincants de ce mois.
Nicolas Béniès.
« « Dreamers », Sébastien Texier Quartet, Cristal Records, distribué par Harmonia Mundi.
Le quartet sera en concert à Jazz Sous Les Pommiers, Coutances (50)
Le jazz et son printemps.
Les « feuilles mortes » disparaissent de notre paysage. Les « Sons d’hiver » et autres festivals de cette saison se sont terminés. Une saison étrange, sans neige, avec une chaleur étrange qui ne fait plus douter de l’existence du réchauffement climatique.
Le calendrier nous oblige à passer au printemps sans que le temps – celui qu’il fait – le fasse réellement sentir. L’impression est quelque fois inverse. Comme un retour en arrière. Comme si après le faux hiver, le vrai voulait se faire sentir. Le jazz s’en fout.
Il fête le printemps via les festivals. Il accueille, entre autres, « europa djaz » pour sa 37e édition et « Jazz sous les Pommiers », pour sa 35e. Un peu avant les débuts de ces deux réunions, « Banlieues Bleues » continue à organiser les rencontres entre les jazz et les publics.
2016, année qui nous aura fait travailler un jour de plus, fête l’Ascension beaucoup plus tôt que l’an dernier. Comme si, l’appel vers les cieux était, d’un coup, plus urgent. Mettre ce jeudi encore férié début mai – le 5 – a obligé Denis Le Bas et l’ensemble des organisateur(e)s de Jazz sous les Pommiers » à commencer le 30 avril. Continuer la lecture
Danser sur les nuages.
Henri Texier a toujours voulu se renouveler et trouver des sources d’inspiration dans des cultures rencontrées au hasard de son existence. Cultures souvent de populations annexées, colonisées ou tout simplement ignorées. Les « Native Lands » – soit les Indiens d’une Inde confondue par Colomb avec l’Amérique – sont les grands laissés pour compte de ces États-Unis incapables dans le même temps de rompre avec le racisme.
Il fallait soulever la lourde pierre qui ferme l’accès à leur musique, à leur héritage. Ces Nations indiennes ont été très utilisées à la construction des gratte-ciel. Ils n’ont pas le vertige et dansent sur les constructions en fer donnant ainsi l’impression d’être les maîtres des nuages que les gratte-ciel voulaient atteindre. Un truc de mâles : féconder le ciel. Eux se nommaient « Sky Dancers ». Voilà nous dit Henri l’origine du titre de cet album. Qui répond à une autre préoccupation, nous faire danser pour nous faire comprendre que notre sol est un volcan miné par la crise écologique et les mutations climatiques. Continuer la lecture
De la lecture à la musique.
Comment faire du jazz lorsque la malchance d’être un fil de prof de philo s’abat sur vous ? Vous n’êtes pas responsable. Et pourtant… Vous vous sentez sans doute redevable de ces morceaux de culture ingurgités tout au long de votre jeune vie ? Comment faire cohabiter cette référence mémorielle avec le jazz ? Entretemps, vous êtes devenu pianiste de jazz. Il vous faut vous libérer de tout ce fatras. Par la musique ? Une bonne idée qui permet de justifier des compositions au climat différent. Errer dans le château de Kafka où les portes mystérieuses s’ouvrent pour des labyrinthes de vies possibles, croiser Erri de Luca, Marguerite Yourcenar – un curieux rêve d’Hadrien pour approcher une forme musicale dont il ne reste pas grand chose, comme un fantôme qui viendrait envahir des nuits trop froides, trop dénuées d’humanité -, James Baldwin et son Harlem qu’il dessinait de paris et terminer par une évocation de Jimi Hendrix qui sut marquer d’une empreinte indélébile la musique tout entière pour s’en aller, seul, sans cette fraternité appelée de ses vœux. Pour cette boîte à musique, « Music Boox, volume 2 », Sébastien Lovato, pianiste et compositeur, s’est inspiré de tous ces créateurs de sons, utilisant les mots pour faire surgir d’autres significations – Marguerite Yourcenar a voulu rendre hommage au gospel dans un essai insensé de traduction – pour créer un environnement musical épars, éclaté comme toutes les disciplines artistiques de ce 21e siècle qui ne sait pas (encore ?) définir son style, son identité. Il est à la fois très prés du jazz – ses influences s’entendent à commencer par celle de Herbie Hancock et de McCoy Tyner et par-là même celle de Coltrane – et très éloigné pour aller vers la musique contemporaine. Une mention à « Ritournelle » sans doute inspirée par la fille du compositeur qui pourrait servir de berceuse aux enfants du temps. Continuer la lecture