Histoire à écrire.

Du Rock, du Rhythm and Blues ou du blues ?

Le titre, en ces temps de controverses moraniennes – néologisme qui gagnerait à être utilisé, formé à partir de Nadine Morano, comme équivalent à la bêtise raciste -, fait problème : « Race Records, Black rock music forbidden on US Radio, 1942 – 1955 ». Levons une ambiguïté. Les hommes marketing aux Etats-Unis se sont aperçus dans les années 20, grâce au succès d’un 78 tours de Mamie Smith, « Crazy Blues » en l’occurrence, qu’il existait un marché spécifique, celui des populations noires des ghettos. Ils se sont précipités sur ce filon en créant des sous marques pour gagner ce public. Ils ont ainsi créé les « race series » destinées au public noir.
Après la guerre, période traités surtout par ce coffret de trois CD, en 1946 le terme de « race series » a été abandonné remplacé par celui, plus neutre, de Rhythm n’ Blues. Là encore, il s’agissait de viser la population des ghettos noirs. Se sont créée deux « hit parade » – pour parler en Français -, l’un pour le RnB, l’autre pour le public caucasien, les variétés.
Pour dire que le rhythm n’ Blues n’est pas un genre musical mais une création des industriels de l’entertainment – comme on dit aux États-Unis – pour cibler un créneau du marché.
Dans ces années 1950, le rock envahira toutes les chaînes de radio. A l’exception des DJ des radios en direction des ghettos noirs, les grands musiciens noirs qui font encore danser aujourd’hui seront ignorés, dans une large mesure, du public blanc. Mais pas interdits contrairement à ce que dit le titre de ce coffret.
Ce coffret permet de les redécouvrir. Et se rendre compte que le courant passait entre musiciens. Elvis Presley notamment fut toujours attentif à « Beale Street », le ghetto noir de Memphis où il était né. Ces musiciens noirs seront aussi influencés par les blancs. La musique ne connaît pas ces frontières de « race ». Le terme, soulignons-le en passant, a plutôt une signification sociale aux Etats-Unis. Blessure toujours ouverte de l’esclavage.
Tous les musicien(ne)s réunis sont à citer. Il faut aller les découvrir. Certains d’entre eux sont plus connus que d’autres. C’est le cas de Wyonnie Harris ou de Howlin’ Wolf, Muddy Waters ou Big Maybelle mais tous les autres sont à entendre. Et si vous voulez organiser une soirée dansante, ce coffret vous servira de guide…
Nicolas Béniès.
« Race Records, black rock music forbidden on US Radio, 1942 – 1955 », livret signé par Bruno Blum, Frémeaux et associés.

Histoire culturelle des Etats-Unis, une leçon de dialectique

L’Afrique et l’Amérique, un choc !

Le jazz, musique forgée par les Africain(e)s déporté(e)s aux États-Unis pour devenir esclave, est le résultat dialectique d’un choc de cultures ou plutôt d’un choc d’acculturations. Les Européen(ne)s arrivé(e)s sur le sol américain en quête de liberté exportaient dans le même temps leur propre culture. Ces origines diverses de plusieurs strates d’immigration expliquent les spécificités des villes américaines, des accents qui se retrouvent dans la musique. Boston, pas exemple, fut contaminée par l’accent irlandais. Les Africain(ne)s étaient porteurs de cultures spécifiques, orales celle-là, aussi différentes que celles des Européens. Les nations africaines ont leur existence même si les Etats construits par les colonisateurs ne correspondent pas aux Nations anciennes. Les grands propriétaires terriens, esclavagistes – et pas seulement dans le Sud des États-Unis, dans le Nord aussi – avaient comme politique de séparer les familles, les ethnies pour éviter les révoltes. Du coup, à l’intérieur de ces grandes propriétés fermées, c’est un mouvement d’acculturation qui s’est enclenché. Un mouvement qui a duré. Une des résultante fut le vaudou comme synthèse des grands mythes de cette Afrique mais, du coup, l’Afrique se faisait rêve d’un eldorado, d’un Éden passé. Continuer la lecture

A propos d’une histoire culturelle des Etats-Unis

« Tracer » la route.

Et si l’histoire des États-Unis s’écrivait plus à travers les chansons, les blues, le jazz ? La route, la voiture a toujours été synonymes de liberté dans ce pays marqué par le mythe de « la frontière », aller plus loin pour éviter l’asservissement, devenir son propre maître. Un mythe sur lequel s’est construite à la fois l’utopie et la culture. Les « westerns », la conquête de l’Ouest en sont des avatars. La réalité est pourtant loin de ce rêve. Dans cette formation sociale, le capitalisme ne s’est pas heurté aux modes de production antérieurs. Cette colonie de peuplement a importé le capitalisme des pays d’Europe. En même temps que le mouvement ouvrier. On ne se souvient pas suffisamment que, dans les années 20-30, le socialisme est une idée forte et influence la plupart des intellectuels. Il faudra la « chasse aux sorcières » de l’après seconde guerre mondiale dans le cadre de la guerre froide pour éradiquer cette alternative, avec l’aide indirecte du stalinisme. Continuer la lecture

Histoires de chansons françaises.

Le jazz a un tournant, panne d’inspiration de Gainsbourg…

Frédéric Régent poursuit Serge Gainsbourg, dans le volume 2 de cette « Intégrale Serge Gainsbourg et ses interprètes » qui couvre des années étranges 1960 – 1962. Étranges par la nouveauté que représente le « phénomène yé-yé ». Le succès de Johnny Hallyday, des « Chaussettes noires », des « Chats sauvages » éclipsent totalement les chanteurs dits « rive gauche » – à cause de l’emplacement des cabarets où ils et elles se produisent -, la chanson française qui devra, de nouveau, se renouveler. Gainsbourg suivra les rythmes du temps, de ce temps pour faire vivre ses textes. Continuer la lecture