Comment va le monde ?

Comment être libre ?
La Turquie de Erdogan nous raconterait-elle notre avenir ? Le vide idéologique actuel est comblé par la référence à la religion et au nationalisme le plus éculé pour permettre la mise en place d’un programme qui n’a pas changé et qu’il faut nommer néolibéralisme. Paradoxalement, il s’agit toujours de s’insérer dans le processus de mondialisation actuelle qui fait la part belle à la richesse financière. L’arbitraire policier est une nécessité pour imposer ces politiques.
Particulièrement, depuis le coup d’État avorté de juillet 2016. Le pouvoir a multiplié les arrestations dans tous les milieux, des fonctionnaires aux cadres de l’armée en passant par les journalistes accusés d’être des putschistes. Il fallait faire taire toute opposition. Ahmet Altan, romancier, essayiste et directeur de journal, a fait partie de ceux-là. « Je ne reverrai plus le monde », des « Textes de prison », raconte son arrestation un matin, 45 ans après celle de son père, sans raison officielle. La prison, pour cet homme de 69 ans, a dû être un calvaire. Il conserve son humour et constate les tentatives dérisoires des gardiens.
Poète, il s’évade dans d’autres sphères faisant de l’imagination une des clés de sa liberté. Une grande leçon d’humanité. Il conte aussi sa rencontre avec le juge qui l’accuse, sans preuve, de tentative de putsch. Il est accompagné de ses avocats. La réalité fait bon ménage avec la fiction ^pour provoquer à la fois le rire et la peur. Continuer la lecture

Le coin du polar (1)

Quand on a que l’amour…

L’amour peut-être une perversion lorsqu’il se conjugue avec la mort de l’être aimé. L’amoureux fou devient crocodile. C’est la thèse de Maurizio de Giovanni, dans « La méthode du crocodile ». Il l’explique remarquablement. Le crocodile n’est pas un animal vif, il ne peut se déployer rapidement pour saisir sa proie. Il faut qu’il attende que la proie vienne à lui. Il attend. Sa patience est sans limite.
Le meurtrier met en pratique cette méthode en s’attaquant à des adolescents ou à des enfants. Il a un projet. De vengeance, d’une vengeance planifiée, programmée de celle qui se mange froide.
Son « détective privé » est un inspecteur sicilien exilé à Naples, victime d’une calomnie d’un repenti, Giuseppe Lojacono. Il a perdu femme et fille et se morfond dans un commissariat obligé à ne rien faire. Père, il comprend le projet. Il sera aidé par une substitut, elle aussi venu de l’île, Laura Piras. Un couple que nous retrouverons. C’est leur première aventure.
Un roman noir, avec un arrière fond urbain, celui d’une ville, Naples, dans laquelle plus personne ne prête attention à l’autre et vaque à ses propres affaires sans se sentir concerné par d’autres questions qu’individuelles. L’auteur n’oublie pas la chape de plomb de la religion qui visse les comportements et oblige, par respect de la respectabilité, à commettre des actes irréparables.
Pour les enquêtes à venir, il faudrait une écriture plus resserrée, moins de complaisance envers les personnages centraux.
« La méthode du crocodile », Maurizio de Giovanni, traduit par Jean-Luc Defromont, 10/18.

Le coin du polar…historique.

La Toscane corrompue… en 1895.

Un grand détective auteur d’un livre de recettes de cuisine… italienne – pardon des régions de l’Italie -, à grandes moustaches blanches qui enquête en Toscane chez le Baron Roccapendente où il est invité, ce n’est pas commun. Pelligrino Artusi n’est pas seulement une figure de roman. Il est né le 4 août 1820 en Emilie-Romagne. A l’ouverture de cette première aventure, pour les lecteurs français, il est âgé de 75 ans. En cette année 1895 donc, l’Italie existe sur le papier depuis 20 ans et l’unification est loin d’être réalisée. Les vieilles familles – « Le Guépard » raconte sous une autre forme cette même histoire – sont ruinées. Les enfants ne s’en rendent pas compte. Ils ont conservé » la morgue de leur caste sociale alors qu’ils n’en ont plus les moyens. Sous une forme plaisante, sans se prendre au sérieux, Marco Malvadi, chimiste, chanteur lyrique, spécialiste du Baroque et finalement écrivain, met en scène ces personnages en train de quitter la grande scène du monde. Tout commence par l’assassinat du majordome en passe de quitter ses fonctions. On saura le pourquoi comme il se doit à la fin. Continuer la lecture