Jazz ou pas ? A vous de voir. Claudia Solal et Benjamin Moussay posent la question.

Beurré ?

« Butter in my Brain » est un titre qui ne peut qu’interroger. Fernand Raynaud aurait dit « C’est étudier pour », bien évidemment. Un titre original introduit à un monde bizarre, étrange, onirique. Si on se risque à une traduction pour épaissir le mystère, on trouve littéralement « du beurre dans le cerveau ». Pour graisser les rouages d’un muscle le plus mystérieux de notre anatomie. Il en a besoin. La communication dégouline, la publicité envahit les neurones, la place et la plasticité manquent pour de nouvelles visions, de nouveaux paysages. To butter veut dire aussi « passer de la pommade à quelqu’un ». Faudrait-il donc passer de la pommade à notre cerveau pour lui demander d’avoir l’obligeance de s’ouvrir à des expériences inédites ? Continuer la lecture

Jazz. Retrouver Ben Webster


Un souffle brutalement amoureux

Qui écoute encore Benjamin Francis Webster ? Le saxophoniste ténor a d’abord appris le violon pour jouer du piano dés l’âge de 11 ans. Il nous reste un enregistrement qui ne nous dit rien de Ben Webster. Il passera au saxophone sous l’égide Budd Johnson après avoir entendu Frankie Trumbauer qui influença tous les saxophonistes à l’exception, peut-être, de Coleman Hawkins. Sa reconnaissance date de son entrée à la fin des années trente dans l’orchestre de Duke Ellington, en même temps que le libérateur de la contrebasse Jimmy Blanton et du compositeur Billy Strayhorn. Duke était ainsi paré pour réaliser ses compositions marquées du sceau du génie.
Ben Webster fait partie de la cohorte qui inventa le saxophone ténor dans le jour. Un trio, Coleman Hawkins le précurseur, Lester Young deuxième inventeur et Ben. Comme les trois mousquetaires, il faut rajouter d’Artagnan en l’occurrence Frankie Trumbauer déjà cité, compagnon de Bix Beiderbecke. Bix et Tram n’ont pas été reconnus comme des références à part entière par les critiques alors que les musicien-ne-s ne tarissaient pas d’éloges sur eux. Continuer la lecture

Compléments au « Souffle de la révolte »

Un retard.

La parution du « Souffle de la révolte » est retardé. Les délis sont plus logns que prévus. Pour faire attendre je vous propose quelques spots, photos et musiques.

Reproductions de « Blind » Lemon Jefferson (coin gauche), de Charley Patton (en haut à droite), Bessie Smith (en bas à droite) et au milieu des reproductions de 78 tours dont « Saint Louis Blues » enregistré par Bessie Smith en 1925 avec Louis Armstrong comme accompagnateur. C’est elle qui, à l’époque, est la plus connue. Louis est en train de faire ses premières armes à New York dans l’orchestre de Fletcher Henderson. Sur les instances de la pianiste du King Oliver Creole Jazz Band, Lil Hardin, il quitte l’orchestre à regret. Lil deviendra la deuxième Madame Armstrong et restera liée à Satchmo au-delà de son divorce. Elle restera à Chicago. Comme pianiste, arrangeure et vocaliste, elle aura une très grande influence. (Comme d’habitude, il faut cliquer sur la photo pour la voir en entier)

Saint Louis Blues, Bessie Smith avec Louis, 1925, Porter Granger est à l’harmonium.

Il faut souligner, une fois encore, que ces enregistrements sont uniquement destinés au public Noir sous le nom de « Race Series ». Ils ne sont pas diffusés. En France particulièrement ils ne sont jamais cités parce qu’inconnus.

Une photo publicitaire de Bix Beiderbecke dont l’influence a été longtemps sous estimée. Pourtant Miles Davis comme Chet Baker ont reconnu que ce style leur avait ouvert d’autres portes.
Bix s’est aussi reconnu dans les compositions de Maurice Ravel dont témoigne son « In the Mist », dans le brouillard, une sorte de définition de son monde un peu brouillé par le Moonshine, le mauvais alcool de contrebande qui le fera mourir à 28 ans. Il jouera « In A Mist » au piano et non pas au cornet. Il est l’un des premiers à construire un solo de manière à raconter une histoire et non pas à associer des morceaux de phrases entendues ici ou là comme le faisaient la plupart des jazzmen de son temps.

« In A Mist » (titré parfois « Bixology »)

Cette photo parue dans le livre, recueil de souvenirs revus et non corrigés, « Jazzmen » est reprise dans tous les livres sur le jazz des origines. C’est tout ce qui reste de « Buddy » Bolden et de son groupe. Les noms sont indiqués en légende. Cette photo a été reproduite « l’envers » dans le livre précité. Du coup, elle a fait l’objet d’intenses spéculations dénuées de tout fondement mais favorisant la légende. C’est l’essentiel. Donald Marquis, dans le livre déjà cité dans un autre article, « Buddy Bolden, le premier musicien de jazz » (Denoël pour la traduction française), revient sur cette photo. Il en propose une seconde

avec les signatures de ces musiciens pour donner de la chair à cette photo historique. Il n’existe malheureusement pas d’autres études du même genre pour les autres villes américaines. Il devient évident que le jazz, comme le blues ou le gospel n’est pas né uniquement à la Nouvelle-Orléans.

Trois évocations de Buddy Bolden
Celle de Jelly Roll Morton en 1939, avec Sidney Bechet

Celle de « Baby » Dodds, batteur, en 1946 avec Albert Nicholas à la clarinette.

Et… Nina Simone

Nicolas Béniès
(à suivre)