Voix du 20e siècle


Mickey Baker, l’inconnu célèbre

Mickey Baker ? Le nom ne vous dit peut-être rien ? Et le film « Dirty Dancing » (danse lascive) sorti en 1987 – et un remake en 2004 non plus, pour le thème « Love is strange » chanté par Mickey and Sylvia – Vanderpool pour son nom complet – au milieu des années 50 et qui servait au lancement de la mode disco ? L’auteur d’une méthode de guitare jazz d’une simplicité pour la technique et laisse la porte ouverte au feeling et à l’écoute pour appréhender cette musique ? L’arrangeur de tous les enregistrements réalisés dans les années 60 par tous les « yéyé » ? Pour cette dernière question, vous avez des excuses, son nom ne figure sur aucune pochette et pourtant son travail est immense. C’est lui, comme tous ses collègues, qui arrive à faire sonner la musique, à habiller une mélodie pour qu’elle prenne de la consistance et vienne à nos oreille en parlant à notre cerveau. Une voix de l’au-delà qui se raconte en composant un blues qui tisse les composantes de son existence mais aussi des États-Unis, de la France et de l’industrie phonographique.
« Alone » – seul – est le titre qu’il a choisi. Une vie se déroule et s’enroule à l’Histoire, aux formes de résistance des Africains-Américains – lui est métis – face au racisme, composante de cette société. Il décrit aussi la drogue, l’alcool pour s’accommoder de cette existence.

Une grande première que la parution de « Alone » en traduction française. Pour l’instant ce livre n’est disponible en aucune autre langue. « Mémoires » dit le sous titre et il faut prendre ce terme dans tous ses sens. Retracer le passé, glorieux et moins glorieux du guitariste et compositeur, se situer dans les cultures qui structurent son art, souvenirs de toutes les vilenies et, surtout, de l’absence d’amour maternel. Sensible est la volonté de tordre le cou à la société raciste de ce Sud des États-Unis et de son milieu qui le voit comme un étranger. Métis, il ne se sent à sa place nulle part. Résultat d’un viol, il se retrouve à l’orphelinat où il apprend la musique. Crise de 1929 pour son enfance et succès dans l’après guerre grâce au blues et la France des années 60. Une voix qui compte et nécessaire pour comprendre le 20e siècle.
N.B.
« Alone », Mickey Baker, propos recueillis par Jesper Ismael, traduit par Yves Gabay, L’indéfinie/Séguier