Le coin du polar (3)


De Londres à Paris, une même histoire s’écrit.

Dans l’actualité éditoriale de 10/18, du côté des polars historiques et bien ancrés dans l’Histoire, un auteur britannique brosse le tableau de la Grande Révolte à Londres en 1381, première grande révolte de la Ville, une première par rapport aux jacqueries qui continuent de faire mugir les campagnes. Artisans divers, corporations se révoltent face au roi et aux nobles qui les pressure. Paul Doherty poursuit la description du climat qui précède l’éclatement de cette Grande Révolte dans les enquêtes précédentes de Frère Athelstan.
De sont côté le Français Jean d’Aillon décrit la situation de Paris et de ses environs, en 1424, dans cette guerre dite de 100 ans qui a fait une multitude de morts.
L’histoire de ces deux royaumes s’entremêle dans le combat pour l’élargissement du pouvoir de chaque souverain qui doit aussi compter avec sa noblesse.
Une manière agréable de se plonger dans le passé tout en puisant dans la littérature policière – Conan Doyle évidemment pour Jean d’Aillon », les intrigues policières classiques pour Doherty – des références, des enquêtes pour agrémenter l’Histoire d’histoires.

Londres
Juin 1381, Londres connaît une Grande Révolte. Une véritable armée déferle assoiffée de revanche et de haine pour les Nobles et les possédants. La bière coule à flots excitant les foules tout en rendant plus difficile la nécessité de la discipline condition nécessaire pour gagner. Les divisions entre les sociétés secrètes répondant à des intérêts différents organiseront la défaite. Sans compter les espions, les ambitions personnelles notamment celle du Régent qui veut la mort du jeune Roi. Ce serait suffisant comme narration.
Paul Doherty, spécialiste de cette Histoire, ne s’en contente pas. Elle lui sert d’arrière-fonds pour une nouvelle enquête de son détective Frère Athelstan, « La Grande Révolte ». Une sombre intrigue venue du passé qui touche de près le Frère habité par la volonté de protéger ses ouailles. Le lecteur habitué n’en sera pas surpris. Les récits précédents avaient permis de s’en rendre compte et de faire connaissance avec tous les protagonistes de ce récit.
Une fois encore, le mystère de l’assassinat derrière une porte fermée à clé fait partie de l’intrigue sans la réduire. La croyance et sa nécessité fait partie intégrante de cette histoire qui construit le paysage intérieur des assassins. Du passé, décidément, on ne peut faire table rase !

Paris
Au printemps 1424, Paris est Anglais. Dans la guerre dite de 100 ans, Charles VII essaie d’imposer sa loi en partant à la conquête de son royaume. Il lui est nécessaire de faire reconnaître sa légitimité. Il se servira de la Pucelle d’Orléans, Jeanne d’Arc, et des mercenaires réunis par Gilles de Rai – un vampire qui a besoin du sang des enfants – transformé, pour un temps, par Jeanne.
Jean d’Aillon, dans ce contexte marqué par une lutte meurtrière entre Bourguignons et Armagnacs, narre une nouvelle enquête de d’Edward Holmes et Gower Watson dans « Le pont de Montereau » qui les conduit, en compagnie d’une Pucelle, Jeanne, sur les routes pour répondre à plusieurs appels. Des routes dangereuses. La guerre, les bandes de pilleurs, les déserteurs, les mercenaires font que la mort rôde en permanence. Ils sont sauvés in extremis par des interventions logiques malgré tout.
Là encore le passé vient percuter le présent pour expliquer les ressorts des meurtres et des tentatives de meurtres. Passent aussi un emprisonné, père de la Pucelle, Gilles de Rai et ses étranges compagnons, des secrets qui se voudraient bien gardés. Une évocation d’un royaume décomposé entrain de se refonder.
Jean d’Aillon s’inspire, évidemment, de Conan Doyle et des aventures de Sherlock Holmes tout en détaillant une leçon d’Histoire.
Nicolas Béniès.
« La Grande Révolte », Paul Doherty, traduit par Christiane Poussier et Nelly Markovic ; « Le pont de Montereau », Jean d’Aillon, 10/18.