Du blues qui tâche.
Memphis Slim ? Le nom de ce bluesman sonne tellement parisien que tout-e amateur-e de piano, de blues, de boogie woogie français semble tout connaître et avoir tout entendu de ses enregistrements et performances. Le concert proposé dans la collection « Live in Paris » vient apporter un démenti et propose une nouvelle pierre – presque une pierre participant de la fondation du mythe Memphis Slim – à la connaissance du périple du chanteur/pianiste.
Le 27 mai 1961, Peter Chatman – son nom pour l’état civil – débarque à Paris venant de Haïfa (Israël) sans le sou. Ténot et Filipacchi organisent ce concert pour le renflouer. 250 personnes suivant la Police, 500 suivant Jazz Hot. Un public qui ne connaît pas le bluesman, raconteur d’histoires, un peu griot.
Ce soir là, il se raconte en passant en revue les bluesmen qui compte, particulièrement de Chicago, ville qui a quasiment vu naître le blues. Memphis Slim fait référence à Jimmy Yancey, l’un des pianistes les plus mystérieux du Boogie avec des fins en forme d’interrogations, à Pete Johnson et à beaucoup d’autres. Il n’oublie pas, dans son tour d’horizon, la Nouvelle-Orléans et « Fats » Domino en particulier. Une sorte de panorama des blues et des villes des Etats-Unis. Plus tard, il les fera connaître par l’intermédiaire des tournées de « L’American Folk Blues Festival ».
Dans ces années 60, le blues n’a pas bonne presse aux Etats-Unis, associé par la jeune génération à l’esclavage. C’est le temps du « Black Power » et des luttes pour les droits civiques. Les bluesmen sont rejetés et végètent. Se profile leur grand retour via les groupes de rock anglais comme les Rolling Stones ou les Beattles.
Ce concert est donc une borne. Il a donc un double intérêt musical et sociologique, sublimé par l’art du pianiste/chanteur.
Nicolas Béniès.
« Memphis Slim 27 mai 1961 », Live in Paris, notes personnelles de Michel Brillié et un souvenir de Alain Frémeaux, Frémeaux et associés.