Jazz, Whirlwind – un label indépendant -,

côté saxophonistes

Tim Armacost et le NYSQ.
Une carrière déjà bien remplie pour Tim Armacost, saxophone ténor et soprano -, né à Los Angeles et qui a créé son quartet, comme les initiales l’indiquent – NYSQ – à New York. Récompenses multiples pour ce musicien qui a commencé à se faire connaître au Japon. Il se situe, pour cet album « Sleight of Hand » – tout de passe-passe -, apparemment dans la lignée de Sonny Rollins et de toute la tradition du bop et du hard bop. Les compositions choisies en témoignent avec trop d’évidence, de « Soul Eyes » à « Lover Man » en passant par « Ask Me Now » et « I Fall In Love To Easily » ou une recréation d’un thème de Hank Mobley. Une seule composition originale due à la plume du pianiste du groupe, David Berkman… « Sleight Of Hand » qui résume la démarche de « NYSQ », faire supporter aux oreilles et au cerveau un semblant de reconnaissance pour mieux tromper la connaissance.
Le groupe est soudé – Daki Yasukagawa à la basse et Gene Jackson à la batterie complètent le quartet – et sait faire s’envoler les notes pour aller au-delà des apparences. Une sorte d’illusion dans l’illusion. Si vous ne connaissez pas, une découverte nécessaire.
Nicolas Béniès
« Sleight of Hand », NYSQ, Whirlwind

Quinsin Nachoff’s Etheral Trio
Un trio à la Sonny Rollins, saxophone ténor, basse de Mark Helias et batterie de Dan Weiss, pour un voyage tournoyant et sphériques liées aussi aux mondes de Steve Coleman ou d’Ornette. Sans craindre quelques retours dans les mémoires du jazz via des portraits en sépia ou d’imaginaires reconstructions. Quinsin Nachoff sait nous faire visiter une grande partie de l’histoire du jazz moderne. Il faut dire que Mark Helias joue un rôle pivot dans un parcours d’errances sinueuses inscrites à la fois dans la loi de la gravité et d’échappées circulaires.
Le retour à la danse est aussi sensible, le calypso notamment. Un trio qui sait retenir l’attention et innover sans rompre les liens avec le passé. L’éther dont il est question dans le nom du trio est un des moyens de mélanger passé et avenir pour s’inscrire dans un présent qui se définit au fur et à mesure.
N.B.
« Quinsin Nachoff’s Etheral Trio », Whirlwind

Samuel Eagles’ SPIRIT
Samuel Eagles, saxophoniste alto et compositeur des thèmes a construit un bizarre quartet : piano, Sam Leak, vibraphone, Ralph Wyld et batteur, Dave Hamblett pour une musique qui se situe dans la lignée de celle de Steve Coleman et d’une certaine tradition en l’occurrence celle du gospel auquel les titres font clairement référence. « Eternity Within My Soul », « Hear His Voice », « Hope In The Hills » sans parler de « SPIRIT » – pour respecter le lettrage voulu par le saxophoniste alto – en sont quelques exemples. Samuel Eagles fait aussi penser à quelques saxophonistes alto comme Vernard Johnson qui servent de voix dans les Églises retrouvant une sorte de naïveté dans leur jeu qui ne dispense pas d’un travail acharné pour maîtriser l’instrument.
Comme souvent, l’influence de Thelonious Monk se fait aussi sentie. Le titre même de l’album, « Ask Seek Knock » sur le modèle « Ask Me Now » laisse planer l’ombre du compositeur/pianiste.
Le quartet ici est devenu plus mouvant. Quintet avec m’adjonction de Duncan Eagles, saxophoniste ténor, sextet avec l’adjonction du déjà vétéran – il a fait partie des Jazz Messengers » – Jean Toussaint pour deux morceaux.
Une manière de renouer avec les racines tout en déjouant les structures établies au prix quelque fois de répétitions inhérentes au genre.
Les groupes britanniques savent encore nous étonner.
N.B.
« « Ask Seek Knock », Samuel Eagles’ SPIRIT
Pour mémoire, Savoy avait publié en 1981 « Vernard Johnson in concert « I’m A Witness Too » », de quoi Vernard est le témoin ? Ce thème est l’une de ses compositions en même temps que d’autres gospels. Ce saxophoniste alto au sens propre mouillait sa chemise.

Zenya Strigalev
Le saxophone alto montre sa diversité avec Zenya Strigalev qui se sert aussi du soprano et de l’electronics – intelligemment notamment dans « Blues for Maggie » – pour une musique très inscrite dans la danse – qui fait un retour en force – dans le reggae et la musique des Antilles. « Blues for Maggie », titre de l’album, montre à la fois la continuité des références en forme de racines, les blues en l’occurrence ainsi que la rencontre avec Maggie Black, au « Ronnie Scott » comme il se doit pour cette scène londonienne, jazz-fan devenue le soutien du saxophoniste et parraine ses activités musicales.
Le quartet sait mêler toutes les musiques de notre temps. Eric Harland, batteur, est capable d’aborder tous les rythmes, toutes les métriques et faire bouger pieds et mains, corps et âme, Linley Marthe, guitariste basse laisse percer les battements venus du funk et le guitariste chilien Federico Dannemann sait servir l’univers du leader.
Une autre facette de la musique de jazz d’aujourd’hui.
N.B.
« Blues for Maggie », Zenya Strigalev, Whirlwind

Julian Siegel
Le soprano est l’instrument le plus partagé semble-t-il, Julian Siegel l’a aussi dans sa panoplie mais il s’exprime plus au saxophone ténor même si la clarinette basse – l’instrument d’Eric Dolphy – s’impose dans certaines des compositions. Le quartet, dans ce deuxième album depuis 2011, « Vista », n’a pas changé. Liam Noble au piano, Oli Hayhurst à la contrebasse et Gene Calderazzo à la batterie font circuler les idées, s’approprient les compositions du saxophoniste pour les rendre collectives et permettre l’improvisation, partir vers des destinations non prévues sans être totalement inconnues. Les références sont à rechercher du côté de Sonny Rollins, de John Coltrane et Wayne Shorter. En même temps, c’est un souffle de vent frais pour partir vers des ailleurs possibles.
Pour s’en rendre compte, il faudrait commencer par le connu soit la composition de Bud Powell qui fait exception, « Un Poco Loco » qui indique à la fois une plongé dans la tradition d’une musique reconnue et la manière de s’en séparer, de la bousculer.
Un son travaillé, résultat de préparations préalables, un album abouti et pas seulement une carte de visite. La scène britannique du jazz est vivante et bien vivante.
N.B.
« Vista », Julian Siegel Quartet, Whirlwind.