Lorsque les espoirs disparaissent, il reste l’espérance

Pour alimenter notre réflexion sur notre passé, notre présent et, peut-être notre futur. De la fête d’indépendance en Algérie – 1962 – aux printemps arabes aux déceptions politiques et philosophiques.

Mémoires et Histoire

Un essai historique intitulé « Algérie 1962 » donne une impression de déjà lu, déjà connu. Et on aurait tort. Le sous titre, « Une histoire populaire », indique une manière inédite dans la manière d’aborder cette année de l’indépendance de l’Algérie, de la décolonisation. Malika Rahal veut rendre compte de la variété des expériences vécues par les populations. Au-delà ou en deçà de la chronologie, accords d’Evian, crise, les conflits politiques à l’intérieur du FLN comme la « défaite des Messalistes », elle veut faire partager « le souffle de la révolution », le sentiment individuel et collectif de libération. Une révolution vécue dans la violence, celle de l’OAS mais aussi celle du FLN, violence inhérente à tout changement fondamental. Des expériences nouvelles naîtront. Pour faire face au départ des administrateurs coloniaux, des formes d’auto organisation se mettront en place. L’espace lui-même change par l’ouverture des camps de concentrations, des prisons, des retours d’exils pour renouer des liens et servir la République algérienne. Temps de ruptures et travail de mémoire nécessaire pour penser l’indépendance et la faire vivre.
L’auteure brasse toutes ces questions que l’année 1962 synthétise par un aller-retour dialectique entre passé et le présent pour faire aussi partager l’enthousiasme des populations. Cet état d’esprit explique que le pays est reparti en assurant lers fonctions essentielles. La rentrés scolaire en particulier et l’ouverture de la plupart des services publics sont ainsi possibles alors que le pays était exsangue. ll fallait redonner de la chair à l’Histoire pour faire surgir une autre dimension qui explique la mobilisation des populations. A cette hauteur d’être humain apparaissent aussi tous les travers, toutes les corruptions. L’année 1962 nous semble proche, remplie d’espérances et de manœuvres politiciennes. Un grand écart.
S’appuyant sur des témoignages oraux et écrits, elle permet d’appréhender le champ des possibles inclut dans la décolonisation pour refuser une histoire déterministe. Une leçon qu’il ne faudrait pas oublier.
Nicolas Béniès
« Algérie 1962, Une histoire populaire », Malika Rahal, La Découverte.

Interrogations sur notre monde
« Le rendez-vous manqué des peuples », de Pierre Blanc et Jean-Paul Chagnollaud est à la fois une réflexion sur les concepts, celui de « Peuple » notamment, et leur utilisation. A travers les histoires de révolte des populations contre les régimes autoritaires qui s’est heurtée à la confrérie des autocrates, surgit une nouvelle donne politique, le populisme. Il révèle la crise politique profonde qui vise les valeurs démocratiques elles-mêmes. La montée de l’extrême droite dans tous les pays est un symptôme et une conséquence. La conclusion des auteurs qui veut insister sur les possibles de la démocratie est aujourd’hui en butte à la guerre de Poutine qui laisse la part belle à tous les populismes de droite.
N.B.
« Le rendez-vous manqué des peuples. De l’échec des révolutions populaires aux dérives populistes », P. Blanc et J.P. Chagnollaud, Éditions Autrement

Un déçu de Macron
François Dosse, professeur de Macron et disciple de Paul Ricœur avait appelé à voter Macron en 2017. Cinq ans plus tard, il fait part de ses « illusions perdues ». Il épingle avec fureur et un peu d’ironie toutes les promesses non tenues. Et il ne rate pas sa cible. Les plus grands procureurs sont les plus grands déçus.
N.B.
« Macron ou les illusions perdues. Les larmes de Paul Ricœur », François Dosse, Le Passeur.