Milan, mélanges de noir et de rose.
Alessandro Robecchi, qui n’a pas renié son passé – il fut «éditorialiste pour Il Manifesto -, dresse le portrait de Milan, une ville italienne considérée comme bourgeoise mais abrite des secrets redoutables. Il met en scène un de ces auteurs de téléréalité qui se pensent de gauche parce qu’ils analysent ce qu’ils proposent aux téléspectateurs comme de la merde mais qui font de larges audiences et eux gagnent beaucoup d’argent. Carlo Monterossi est de ceux là. Alessandro ne craint de se moquer de son personnage dont il souligne avec une verve sauvage et chargée de venin, tous les travers.
La tentative de meurtre dont il fera l’objet, point de départ de sa quête pour connaître les raisons pour lesquelles certains veulent sa mort, en lien avec Nadia – le personnage principal –, chercheuse, enquêtrice aux multiples CDD et Oscar, journaliste, le conduira sur des terres singulières d’une organisation fasciste qui mêle nostalgiques de Mussolini et bourgeois du monde des affaires.
Ils ne sont les seuls à rechercher le ou les commanditaires. Deux gitans veulent aussi le retrouver pour venger la mort d’un enfant dans l’incendie de sa roulotte, victime d’un jet de Cocktail Molotov de cette bande de racistes. Les deux trajectoires se retrouveront au même endroit, de même que deux tueurs à gages.
La drôlerie, la Comedia del Arte du début se marie avec une description quasi clinique d’une ville qui a conservé la nostalgie de la période fasciste. Milan apparaît dans toute sa disharmonie pour ouvrir des portes à des sentiments et des émotions qui savent faire bon mélange avec la rationalité. Le titre s’éclaire à la fin, « Ceci n’est pas une chanson d’amour » pour situer à la fois la présentatrice de l’émission qui voudrait que l’amour triomphe et un personnage de femme victime de violences conjugales. Forcément, l’amour est présent mais pas là où on l’attend. Alessandro Robecchi s’est servi avec délectation de sa connaissance des milieux de la télé italienne. Un documentaire mâtiné d’ironie.
Les effets faciles du début, en lien avec le dessin de Carlo, qui vit dans l’ignorance, prend l’accessoire pour le principal, permet de le jeter dans un monde qu’il découvre et le lecteur avec lui. Bien loin d’une histoire d’amour…
Nicolas Béniès
« Ceci n’est pas une histoire d’amour », Alessandro Robecchi, traduit par Paolo Bellomo avec le concours de Agathe Lauriot dit Prévost, l’Aube/Noire