JAZZ, Portal et Vitous

Légendes européennes du jazz. (Suite et pas fin)

La revue « Jazzthing » traque les jazzmen – peu de femmes en vérité – qui peuvent garnie son tableau de légendes européennes du jazz. Deux nouveaux albums, respectivement 7e et 8e d’une collection qui devrait désormais en compter 16 (voir mes recensions précédentes de cette collection) viennent s’y accrocher, réalisés comme à l’habitude en direct du théâtre Gütersloh. Michel Portal d’abord qui, en mars 2016 pour cet enregistrement, venant juste de passer le cap des 80 ans. Est-ce à cause de son âge qu’il a besoin d’un « Radar » – c’est le titre de cet album – pour plonger dans les ténèbres de son passé ?

L’interview, qui termine le concert sur le CD a été enregistrée à Paris, est inhabituelle. Il s’exprime en français – même pas en basque – et bénéficie de l’aide d’un traducteur à qui il ne laisse pas le temps de traduire. Une longue interview, près de 20 mn et arrive à se terminer brutalement. Décidément ce vieux jeune homme arrive aussi à déconcerter en parlant et en jouant du piano pour illustrer ses propos. Il se dit « plein de musique », incapable d’oublier Parker même lorsqu’il joue Mozart et la musique est toute sa vie même s’il a le tract et qu’après un concert il ingurgite une tonne d’aspirine.
L’intérêt de ce concert est tout entier dans la rencontre, en duo, avec le pianiste – compagnon habituel de Dave Liebman -, Richie Beirach, lui aussi féru de cette musique dite classique mais qui est aussi « contemporaine ». La suite « Esquisse » en 3 parties voit Portal passer de la clarinette au soprano et aux autres saxophones. Deux de ses compositions sont jouées par le WDR Big Band dont il est le soliste principal. Compositions étonnantes par leur apparente stature classique – là je parle du jazz – qui rappelle les Big Bands d’antan et de maintenant.

Le bassiste Miroslav Vitous, étourdissant virtuose, membre créateur de « Weather Report », né à Prague le 6 décembre 1947, a fait toute sa carrière aux Etats-Unis où il fut découvert par Miles Davis, tient la vedette de ce numéro 8, « Ziljabu Nights ». Il est en compagnie du pianiste turc Aydin Esen ici aux claviers, Du batteur italien Roberto Gatto, de Gary Campbell et de Robert Bonisolo aux saxophones, respectivement étatsunien et canadien. Une musique élaborée, pas toujours facile mais le bassiste brille dans la reprise de « standards » qui terminent sa prestation.
Il dira, dans l’interview réalisée chez lui : « I can’t copy, because the original music in me is so strong, that it will always come out. I’m lucky », il est chanceux, il ne peut pas copier parce que la musique originale qui est en lui finit toujours par sortir et, il faut lui rendre cette justice, ce n’est pas entièrement faux.
Nicolas Béniès.
« Radar », Michel Portal et « Ziljabu Nights », Miroslav Vitous, « European Jazz Legends », Intuition/Jazz thing, distribués par Socadisc.