Jazz. Unir le trio pour en faire une voix qui tourne les pages

Un trio où 3=1

Réunir un saxophoniste ténor, Frédéric Borey, un organiste, Damien Argentieri, et un batteur, Alain Tissot, pour construire une musique d’ensemble sans leader – même à tour de rôle – est à la fois une leçon de démocratie et de synthèse. L’orgue est, d’habitude, depuis au moins Jimmy Smith, un instrument orchestre, envahissant, empiétant sur tous les autres, là il se coule dans les voix des deux autres pour répondre aux sollicitations et aux questions posées. Le saxophone, instrument roi, accepte ces nouvelles contraintes en laissant planer les esprits de Lester Young, Stan Getz, Wayne Shorter, Larry Young…
Les compositions se placent sur le terrain de la balade pour nous faire marcher en s’arrêtant souvent pour contempler un paysage. Elles, se font murmure pour, soudain, se faire plus agressive, plus revendicative. Le cri, la révolte, sous jacente peut jaillir de l’un ou de l’autre, canalisés par l’ensemble pour rester dans l’architecture générale. Il arrive qu’on perde le fil, le son de chacun des instruments pour sombrer dans un ailleurs forgé par ce trio.
« Page 4 », parce qu’il est le quatrième de ce trio qui, enregistrement par enregistrement, transforme la donne de la formule qui semblait surannée. Il mérite son nom de « Unitrio ». Ce dernier opus, dans cette optique, est une grande réussite.
Nicolas Béniès
« Page 4 », Unitrio, Argentieri, Borey, Tissot, altrisuoni the jazz label