Du coté du jazz, Un Big Band, Walter Smith III et Matthew Stevens font en commun et Rudresh Mahanthappa fête un centenaire…

Plaisir du Big Band
Le « Brussels Jazz Orchestra » est un organisme vivant qui sait envelopper de sons le public conquis. Tant de ramages, tant de bruits organisés, tant de bonheur de jouer, d’être ensemble laisse forcément la fenêtre grande ouverte à toutes les escapades. Bien sur on pourrait lui trouver quelques pères putatifs. Sans intérêt. Ne gâchons pas le plaisir d’entendre les compositions et les arrangements de Pierre Drevet, trompettiste soliste en compagnie de la chanteuse Claire Vaillant. « Échange » est un titre qui tient ses promesses.
En ces temps troublés et troubles, cet orchestre fera la nique à tous les petits ennuis de la vie quotidienne. Il est temps de renouer avec ces grands ensembles qui ne ressemblent guère à une usine mais plutôt à un phalanstère.
Pierre Drevet, Claire Vaillant & le Brussels Jazz Orchestra : Échange, Label Lilananda/InOuïe distribution, www.lilananda.fr

Parcours
Le saxophoniste ténor Walter Smith III et le guitariste Matthew Stevens sont des vieilles connaissances. Ils ont décidé, en compagnie de Micah Thomas, piano, de Linda May Oh, une bassiste recherchée et de Nate Smith, batteur remarquable pour un curieux parcours dans les figures des États-Unis d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Il ouvre ce bal par une composition en forme d’autoportrait, « Roy Allan », du trompettiste Roy Hargrove, trop tôt disparu pour un hommage vivant au musicien qui a marqué les mondes du jazz. Le reste, compositions des deux compères, mêle les références au jeu vidéo et le portrait ambivalent du premier président, « General George Washington » à la fois libérateur et esclavagiste, une composition sur deux notes. Ils vont jusqu’au scénario de post-apocalypse pour donner le ton d’un album qui, a priori, semble bien sage. « In Common 2 » se veut représentatif de la scène new-yorkaise actuelle qui veut mettre en commun ses références pour construire une musique du temps.
Walter Smith III & Matthew Stevens : In Common 2, Whirlwind.

Hommages vivants.
Les centenaires sont nombreux- 1920 a dû être une bonne année pour la démographie – dans les mondes du jazz. Boris Vian y arrive tout comme Art Blakey. Le plus connu est assurément Charlie Parker. Il faut bien en rappeler le souvenir de cette ombre qui se balance et provoque toujours un séisme dévastateur tout en s’échappant loin dans le ciel, loin des contraintes de la terre en un voyage toujours recommencé. Le saxophoniste alto Rudresh Mahanthappa, en compagnie de François Moutin à la basse et de Rudy Royston à la batterie dans ce « Hero Trio » lui rend apparemment hommage en reprenant les compositions de l’Oiseau. Dans ce mouvement, ils s’approprient aussi John Coltrane, Sonny Rollins et surtout Lee Konitz et Ornette Coleman sans oublier Stevie Wonder. Un mélange de références sublimé par la sonorité du saxophoniste un peu traînante provenant, en partie de Benny Carter. Manière de dire que ce directeur des études musicales à Princeton sait se servir de toutes les mémoires du jazz pour construire une musique d’un temps qui a besoin d’avoir des repères historiques. Les deux standards, « I Can’t Get Started » et « I’ll Remember April » apportent la preuve de la continuité et du renouveau. Le thème reste présent tout en s’éloignant pour construire d’autres imaginaires.
Rudresh Mahanthappa : Hero Trio, Whirlwind

Nicolas Béniès