Le coin du polar.

Guerre civile

A partir des expériences des Zadistes – de ZAD, zone à défendre -, Jérôme Camut et Nathalie Hug construisent « Islanova », un pays sis du côté de l’île d’Oléron gardé par une intelligence artificielle et surveillé par des drones. Les habitant-e-s se nomment les « 12-10 », jour où Colomb a découvert l’Amérique, et prêtent serment pour faire partie de l’armée du 12 octobre. Une sorte de gourou, Vertigo, conduit ce petit monde jusqu’à son assassinat par un mercenaire. A partir de là, la guerre civile commence. L’Etat, le gouvernement, ne peut permettre l’éclatement du territoire national… Le tout s’organise dans un projet d’alimentation en eau de tout le continent africain.
Le fil directeur est la radicalisation d’une jeune fille de 15 ans, Charlie, vivant dans une famille recomposée, amoureuse de son faux « frère », Leny, qu’elle manipule pour partir avec lui vers Islanova retrouver sa mère biologique.
Les morts s’ajouteront aux morts, les désespoirs aux désespoirs face à un monde qui ne sait plus où se lève le soleil de l’espoir.
Un peu long, un peu tarabiscoté mais passent les révoltes de l’adolescence face à une société qui ne connaît que l’égoïsme de l’individu. Comment lutter pour un monde meilleur ?
Nicolas Béniès.
« Islanova », Jérôme Camut et Nathalie Hug, Fleuve noir.

Une réédition

Robert Bloch (1917-1994) a été obnubilé par « Jack the Ripper », Jack l’éventreur, à qui il a consacré de nombreux écrits jusqu’à en faire un immortel. Il est l’auteur de « Psychose » dont la thématique a servi à Hitchcock pour le film du même titre.
10/18 réédite « Le boucher de Chicago », sorte de condensé entre l’éventreur et le Landru dans le contexte de l’Exposition Universelle qui a lieu à Chicago en 1893. Moment important pour les Etats-Unis. Les architectes définissent une conception de la ville. On parlera de « Ville blanche » pour qualifier cette architecture qui doit beaucoup aux formes de la Grèce et de la Rome antique. La gare de Philadelphie en conserve la trace.
G. Gordon Gregg, faux pharmacien et docteur, poursuit la tradition américaine – celle des Westerns – en vendant une potion magique, faite d’eau et d’électricité, capable de lutter contre toutes les maladies. Il a construit un château où les passages secrets permettent de donner l’illusion d’être à deux endroits à la fois. Il résout ses problèmes d’argent en assassinant ses épouses et ses créanciers. Une jeune femme, journaliste aux dents longues et au cœur étrange, mettra fin à ses activités. « Le boucher de Chicago », titre de cette enquête, aura vécu. Les réactions de la « bonne société » de Chicago sont bien vues.
Une trame intéressante mais qui reste à l’état de scénario. Une nouvelle qui laisse le lecteur sur sa faim. Une description de Chicago qui vaut la lecture ainsi que l’histoire vraie de ce château.
Nicolas Béniès.
« Le boucher de Chicago », Robert Bloch, 10/18

De l’illusion à la réalité.

Harry Houdini a été l’un des grands magiciens, illusionnistes de la fin du 19e, début du 20e. Weiss, son nom d’état civil, est un Juif qui fuit les pogroms. Il se forge une réputation en défaisant menottes et chaînes qui l’entravent en quelques minutes. C’est un entraînement de tous les jours. Il a pris pour maître Robert Houdin, le premier roi français de l’illusion.
Juillet 1899 le voit à San Francisco, avec son épouse et partenaire, Bess. Il est chargé d’une enquête sur la mafia chinoise. « Metamorphosis » raconte, sans y toucher de trop, le début de carrière de Houdini et, surtout, Chinatown au cœur de la ville de San Francisco. Vivianne Perret se sert de la notoriété de son personnage à la fois proche et lointain du véritable Houdini, pour décrire les débuts de cette ville de la Côte Ouest.
Comme d’habitude ce premier mouvement d’une série prend le temps de présenter les personnages alourdissant le propos mais les suivants devraient donner plus de place aux intrigues. On attend la duite.
Nicolas Béniès.
« Metamorphosis. Houdini, magicien et détective », Vivianne Perret, 10/18.

Théorie du complot.

Luis Miguel Rocha (1976-2015), écrivain portugais, est un spécialiste des jeux de pouvoir du Vatican. A partir de l’attentat sur le pape Jean-Paul II en 1981 qui explique le titre de cet opus, « La balle sainte », il construit toute une trame qui opère un lien entre des évènements qui se produisent aux quatre coins du monde. Son héroïne, la journaliste Sarah Monteiro, fera la preuve de la force de la théorie du complot.
Drôle, énigmatique, provoquant ce roman fait aussi découvrir la liturgie et ses raisons, le Vatican et ses secrets comme les fantasmes de l’auteur qui sait être convaincant dans ses délires.
Nicolas Béniès.
« La balle sainte », Luis Miguel Rocha, Folio/Policier.