Basculements
La France se trouve au centre des interrogations sur l’avenir de l’Europe. La construction européenne repose principalement sur le couple franco-allemand. La décision de Macron sans concertation – comme d’habitude – provoque des chocs importants d’abord au niveau de l’Europe. La poursuite de la guerre en Ukraine, grand absente de la campagne, et le soutien à l’agressée risque de se trouver contestée.
Pas seulement. La Bourse de Paris a baissé dés l’annonce de la décision et n’arrive pas à renouer réellement avec la hausse. Ce n’est pas le nouveau front populaire qui fait peur aux marchés financiers mais Macron.
Le taux d’intérêt pour la dette publique de la France augmente en fonction même de la montée de l’incertitude politique autant qu’économique. Le « spread » – l’augmentation des taux due à la méfiance vis-à-vis de la France – a atteint 0,8% – 80 points de base – par rapport à l’Allemagne, du jamais vu depuis 2022. Ce que les agences de notation n’avaient pas réussi à faire, Macron l’a fait.
Macron avait l’objectif de faire, grâce au Brexit, de la place financière de Paris mla référence en prenant la place de la City, là aussi c’est raté.
La crise financière commence. Elle se rajoute aux crises existantes et va les approfondir.
La politique économique de Macron est restée prisonnière de l’idéologie néo libérale, sauf lors du confinement. A ce moment là la politique est devenue expansionniste sans réflexion, sans but. Une errance a remplacé une autre. Une fois la pandémie oubliée, le gouvernement est revenu à sa routine, à ses dogmes dont celui de ne pas s’attaquer à une réforme fiscale pourtant fondamentalement nécessaire à la fois pour lutter contre les inégalités et pour favoriser l’investissement. L’augmentation des dividendes, la distribution des profits aux actionnaires, montre que les capitalistes sont en peine de définir une orientation à moyen terme et, par-là même de mettre en place une augmentation de l’investissement productif pour répondre aux crises, climatique mais aussi économique.
Faute d’augmenter les impôts, le gouvernement a voulu baisser les dépenses, notamment celles de la protection sociale. Or, les dépenses sociales ont permis de diminuer les inégalité. La remettre en cause accroît la désespérance sociale et se traduit par la montée du RN. Perdu pour perdu en quelque sorte.
Le plus paradoxal lorsqu’on se penche sur l’absence de programme de ce parti – les silences sont des aveux – on peut apercevoir la poursuite de cette même logique néo libérale. La baisse de la TVA sur l’énergie par exemple permettra aux grandes entreprises d’augmenter leurs profits sans forcément baisser les prix… La même logique que Macron…
Le RN n’a pas l’intention d’augmenter la protection sociale. Il s’attaque aux plus pauvres.
Le Medef, un patronat frileux qui ne pense qu’enterme de hausse du profit à court terme et de baisse du coût du travail ne réfléchit plus et valide le RN face à la gauche.
Tous ces arguments rationels, il faut le dire, n’ont aucune prise sur l’électorat du RN. Pourquoi ?
Le quinquennat fde François Hollande et ses reniements successifs ont laissé la gauche exsangue, en crise de projet. Le PS mettait au sens strict la clé sous la porte. La droite, de son côté, subissait une crise profonde de programme, de place dans la société. Crise politique qui a permis à Macron de devenir Président en 2017 sans avoir véritablement de colonne vertébrale politique. Lui seul possédait l’orientation – obscure -, les décisions, la maîtrise de l’ensemble de son mouvement/parti. Se souvient-on des premiers temps d’Edouard Phillipe incapable de répondre aux interrogations des journalistes ne sachant pas ce que le président allait décider…
A cette crise politique profonde, Macron a rajouté une crise de régime en ne répondant pas par la négociation à la grande manifestation contre sa réforme des retraites. Il était et le restera considéré comme illégitime.
Dernier acte, avec la dissolution il fait surgir une crise institutionnelle en jouant avec mle résultat du RN aux élections auropéennes qui lui donne un avantage en terme de dynamique électorale. Comme si Macron appelait de ses voeux la victoire du RN lui qui se présentait comme le meilleur rempart contre l’extrême droite.
Ces crises successives représentent le substrat de la montée du RN dans un contexte de crises profondes qui lézardent la forme du capitalisme mise depuis le milieu des années 1980. Ce monde a vécu
Pour le maintenir le RN mettra en œuvre la construction d’un État illibéral, à la mode Orban s’attaquant directement aux libertés démocratiques. En cas de victoire de ce parti, il sera plus difficile de lutter sur tous les terrains. Tout en rappelant que Macron, après Hollande et Sarkozy avaient renforcé l’arsenal répressif. Une tendance lourde de ce capitalisme tardif incapable de s’imaginer un avenir. La rupture avec cette forme du capitalisme est vitale pour redonner un espor de changement social.
Le programme du NFP est un début de réponse qui doit être complété, affiné
Le 30 juin et le 7 juillet l’enjeu est de taille dans ce monde qui bascule… Enjeu qui devrait faire taire toute petite querelle…
Nicolas Béniès