Entre polar et science fiction.
« Silo », le premier opus de cette trilogie signée Hugh Howey, avait réussi à nous transporter dans un avenir indéterminé où les êtres humains vivaient sous terre. Les luttes de classe avaient quand même lieu entre le haut et le bas, les dirigeants et les travailleurs. A la fin de ce premier tome, le haut ne semblait plus savoir gouverner. Juliette, une marginale, avait découvert que son silo n’était pas seul, qu’il en existait d’autres. Ils étaient numérotés.
Pour « Silo, origines », le retour en arrière permet de comprendre l’histoire, le contexte et les formes du pouvoir créées par un démiurge qui s’est voulu Dieu lui-même, Thurman. Est-il possible d’usurper le nom de Dieu ? A l’évidence. Il suffit de se faire appeler Dieu…
Les références au « good book » – comme l’appellent les Américains -, à la Bible structurent le livre. En 2049, une partie de la classe dirigeante américaine décide d’un coup d’Etat passant par un génocide global. Ces dirigeants organisent une invasion de particules qui rendra la planète irrespirable. Au sens fort. Seuls seront sauvés ceux qui arriveront à temps dans les silos construits par Donald Keene, nouvellement élu à la Chambre des Représentants. Sans en connaître le but.
Les dirigeants des silos ne dirigent pas. Ils appliquent un credo, une mantra. Les modalités d’action sont contenues dans un livre. Le reste est oublié à coup de médicaments. Quelques-uns font exception et se souviennent. L’intrigue est construite autour de cette prise de conscience, prise de conscience d’un monde inhumain conçu pour disparaître.
Avec ce « presque rien », Hugh Howey balade le lecteur. Il arrive à donner le tournis en réfractant le temps par l’intermédiaire des réveils de la mort du personnage principal. S’éclairent dans le même temps toutes les interrogations contenues dans le tome précédent.
Cette « exofictions » – titre de cette collection – permet aussi de réfléchir sur notre monde tel qu’il ne va pas. Ces « credos » peuvent être ceux du libéralisme. Les gouvernants d’aujourd’hui donnent l’impression – comme ceux de 2345 – de ne plus réfléchir et appliquent des préceptes, ceux du libéralisme, sans considérer la réalité du monde.
Un grand roman que ce deuxième tome. Une écriture qui a pris ses marques pour une narration qui emporte le lecteur pour une grande leçon d’humanité. Le succès est logique et mérité. A lire toute affaire cessante.
Nicolas Béniès.
« Silo, origines », Hugh Howey, traduit par Laure Manceau, Exofictions/Actes Sud.