La poésie, une arme de combat
La tradition bousculée pour ouvrir la porte à la modernité et à l’imagination.
La poésie vient contester toutes nos certitudes pour interroger le monde, pour faire surgir, souvent avec les mots de tous les jours, des images de nos fantômes issus des mémoires réelles ou imaginées. La modernité, comme pour la musique, se fracasse sur la tradition pour lui donner de nouvelles significations. C’est le cas de Louise Glück qui se sert des figures de l’Antiquité et un peu de la tradition juive pour parler de notre présent, de ce temps suspendu devant un monde – celui du 11 septembre 2001 et après – privé de valeurs communes. La Prix Nobel de littérature 2020 – la 16e femme à l’avoir obtenu – nous a quitté le 13 octobre 2023 sans être traduite en français. Marie Olivier, présente et traduit trois recueils, parmi les plus récents : L’iris sauvage, Meadowlands et Averno, en une édition bilingue pour faire apprécier le rythme des mots dans la langue originale.
Etel Adnan fait partie de la catégorie des apatrides. Née au Liban, elle a fait ses études à Paris, a enseigné aux Etats-Unis en adoptant l’américain comme langue d’écriture principale. La guerre d’Algérie lui fera refuser le français comme langue coloniale pour signifier son engagement politique. Yves Michaud lui a consacré un essai, « Etel Adnan, les anges, le brouillard, le Palais de la Nuit », agrémenté de quelques-uns un de ses tableaux pour indiquer une similitude dans sa manière de créer « à partir d’un point pour aller le plus loin possible », une citation de John Coltrane pour dire l’influence du jazz sur son travail, sur son œuvre, « une catastrophe apprivoisée » – Cocteau qualifiait ainsi le jazz. « Je suis un volcan criblé de météores » – titre de cette anthologie des poèmes écrits de 1947 à 1997 – dit bien la faiblesse force de cette poésie qui touche en plein cœur en secouant l’esprit.
Nicolas Béniès
« L’iris sauvage, Meadowlands, Averno », Louise Glück, édition bilingue, traduit et présenté par Marie Olivier, Poésie/Gallimard ; « Je suis un volcan criblé de météores, Poésies 1947-1997 », édition Yves Michaud, traduit de l’américain par Marie Borel, Patrice Cotensin, Jean Frémon et Yves Michaud, Poésie/Gallimard. « Etel Adnan. Les anges, le brouillard, le palais de la nuit », Yves Michaud, Gallimard.