Compléments au « Souffle de la révolte », Bibliographie

Faute de place sans doute et pour ne pas alourdir le prix, la bibliographie ci-après ne figure pas dans le livre.

Bibliographie

« Une Chronologie du jazz », Philippe Baudoin avec la collaboration d’Isabelle Marquis, Outre Mesure, Paris, 2005. En forme de notules, des ouvertures vers d’autres recherches. En sus, des photos souvent rares qui permettent d’illustrer une période. Une manière de trouver une boussole.
Comme pour tout ouvrage de ce type des absences peuvent se signaler. Couvrir des périodes entières, quasiment des ères – pour le jazz tout va vite – est une gageure. Une « Histoire » du jazz est mission impossible. Un site permet de combler les vides.

« Une histoire du jazz en France, tome 1, du milieu du 19e à 1929 », Laurent Cugny, Outre Mesure, Paris, 2014. Contrairement à l’ouvrage précédent, des documents cités souvent in extenso pour permettre une approche de la période considérée. L’année 1929 est une rupture tellement évidente qu’elle s’impose. Laurent Cugny nous plonge dans l’époque et nous oblige à considérer aussi le style d’écriture pour aimer ou haïr cette musique. Pour éviter de l’oublier. Un travail de grande ampleur.
Une recension sur ce blog à lire si nécessaire.

Laurent Cugny, dans le cadre de son « Histoire » a consacré un ouvrage à Hughes Panassié pour à la fois lui rendre sa place, le replacer dans son contexte en faisant la part belle à sa dimension d’arbitre du jazz pour décider ce qui est et ce qui n’est pas « Jazz ». Une vision à la fois distanciée et sympathique tout en ne laissant pas de côté les aspects désagréables du personnage. Recension aussi sur ce blog.

La biographie de Bix par Jean-Pierre Lion fait autorité. L’auteur ne laisse dans l’ombre aucun domaine. Il parle autant de sa sexualité que de son amour monomaniaque du cornet ou de son alcoolisme. Dans ces années vingt de prohibition, le « Moonshine » est un poison violent. Jean-Pierre Lion est un grand amoureux de Bix. Malheureusement ce sera sa seule biographie.
La recension aussi sur ce blog.

« Une histoire de la batterie de jazz, Tome 1, Des origines aux années Swing », Georges Paczynski, Outre Mesure, Paris, 1997. Un projet follement passionnant et passionnément fou. L’histoire du jazz considéré du côté de son instrument emblématique, la batterie. Racontée l’histoire de la batterie, c’est raconter l’histoire du jazz. Pour ce faire, il faut passer en revue les batteurs tant il est vrai que l’existence du jazz fait partie intégrante d ela définition de son essence.

« Talkin’ that Talk, le langage du blues, du jazz et du rap, dictionnaire anthologique & encyclopédique », dernière édition, Outre Mesure, Paris, 2010.

« Chronologie de l’art du 20e siècle », Michel Draguet, Flammarion, Paris, 2003. Malheureusement pas un mot sur le jazz mais des informations nécessaires sur l’environnement artistique de toutes ces périodes sous forme, là comme chez Baudoin, d’encarts et de chronologie.

« Avenirs et avant-gardes en France 19e-20e. Hommage à Madeleine Rébérioux », Sous la direction de Vincent Duclert, Rémi Fabre et Patrick Fridenson, La Découverte, Paris, 1999. Philippe Gumplowicz, par ailleurs auteur du « Roman du jazz » (3 tomes, Fayard), s’est chargé de la partie sur le jazz. Sa contribution, « La cause du jazz. Naissance d’une passion. Paris 1930-1934 », où il retrace la place du jazz dans « Jazz Tango » et la création par Charles Delaunay et Hughes Panassié de « Jazz Hot » comme celle du Hot Club de France.
L’ensemble des contributions donne une image du foisonnement créatif de ces années 1920-30 pour ce qui intéresse notre période.

« Harlem 1900-1935. De la métropole noire au ghetto, de la Renaissance culturelle à l’exclusion », dirigé par Isabelle Richet, Série Mémoire/Autrement, Paris, 1993. Harlem, après le krach immobilier, attire la bourgeoisie noire pour habiter dans des logements conçus pour la partie la plus riche de la population blanche. Cette partie de New York attire les talentueux, les ambitieux, les aventuriers, les rêveurs. Elle est, après la Première Guerre Mondiale, le centre de l’utopie de la fraternité entre les peuples, entre les « races ». Noirs et Blancs s’y retrouvent pour construire un espoir de dépassement des antagonistes anciens, du capitalisme. 1929 sonnera le glas de cette utopie. Le ghetto naît de la crise qui frappe d’abord les populations noires.

« New Orleans sur Seine », Ludovic Tournès, Fayard, Paris, 1999, un essai d’histoire culturelle utilisé par tous les chercheurs qui ont suivi. Des informations nécessaires, un point de vue d’historien et de mordu de jazz.

« Making Jazz French. Music and Modern Life in Interwar Paris », Jeffrey H. Jackson, Duke University Press, 2003. Une recherche sur les liens entre la vie après l’Armistice et le jazz. Comment les musicien-ne-s de jazz français-es se sont convertis au jazz. Les frontières jazz de scène et « vrai » jazz sont laissées de côté pour s’intéresser aux transformations de la société en même temps que le jazz. (Non traduit en français). Les historiens américains ont un lien particulier avec l’Histoire de la France. Ils ont la distance nécessaire.

« Harlem in Montmartre. A Paris Jazz Story between the Great Wars », William A. Shack, University of California Press, 2001. Un des livres importants sur cette période, malheureusement non traduit en français. Le point de vue est celui des Africains-Américains présent à Paris dans cet entre deux guerres. Une recherche animée d’une volonté de rendre justice, de faire connaître musicien-ne-s de ce temps. La photo de couverture est presque tout un programme, l’orchestre de Jim Europe en 1918…
Ce travail a été interrompu par la mort de l’auteur. Shack fait preuve d’une empathie avec Paris qui traverse son écriture. Son grand-père a participé à la Première guerre mondiale aux côtés des Français, participation qui a orienté les recherches du petit-fils. Il a voulu retrouver l’ambiance en laissant de côté le racisme anti arabe et la colonisation pour ne retenir que l’entrée dans la modernité via le jazz. Andy Fry – voir plus loin – lui fait le reproche de peindre un peu trop en bleu la réalité française de ce temps.
Claude Izner, dans sa nouvelle saga dans le Paris de 1921, via le pianiste Jeremy Nelson, américain installé en France à la recherche de sa famille, se souviendra de Shack. « Le pas de renard » – le fox trot – et « La femme au serpent » pour les deux premiers tomes de cette série appelée à durer.

« Paris Blues, African American Music and French Popular Culture, 1920-1960 », Andy Fry, University of Chicago Press, Londres, 2014, une manière de situer dans l’Histoire la place essentielle du jazz. Un bon connaisseur de la France. Il a lu, comme Laurent Cugny, la plupart des commentateurs de l’époque. Intéressante perspective d ans la manière de considérer le jazz comme la porte d’entrée de la modernité.

« Swing », Jean-Yves Chaperon, Anne Carrière éditions, Paris, 2006, se veut évocation de ces Paris des années 1920 et 1930 sous prétexte d’une enquête sur un peintre qui a arrêté de peindre après la guerre 14-18. Pas vraiment un roman, pas vraiment un documentaire, pas vraiment un conte mais un peu de tout ça. Jean-Yves Chaperon offre une des portes d’entrée dans ces périodes troublées et troublantes.

« Jazz on Film. The complete Story of the musicians & music on screen », Scott Yanow, Backbeat Books, 2004. Un guide nécessaire pour se retrouver dans la production de DVD et de films sur le jazz. Les rééditions actuelles ne sont pas toutes répertoriées par définition. Les sorties sont nombreuses. Mais il permet de dresser une carte des différentes sources.

« Le jazz à la lettre », Yannick Séité, Les Littéraires/PUF, Paris, 2010. Au-delà de l’objet avoué de ce livre, faire le bilan, un siècle après, des relations entre le jazz et la littérature, c’est la mise en évidence du « choc » ressenti par les poètes, les littérateurs dont il est question. A la fois une histoire d’une partie de la littérature française dans sa relation avec le jazz et le Nègre – une sorte de mythologie -, la capacité de se renouveler, de se transformer, de concevoir la rupture nécessaire avec la génération précédente, avec la guerre ainsi que le type de jazz qui provoque « la crise » au sens d’André Breton. La rencontre est inouïe au sens le plus fort. Le jazz, le Nègre, le Sexe, l’érotisme se mêlent pour dégager d’autres manières d’écrire en se révoltant contrer les ordres établis. Le fond et la forme se rejoignent. Comme argumentait Marcuse, un fonds créatif rejoint la forme qui doit se conformer au fonds. Yannick Séité, sans jamais être ennuyeux, ni pédant, nous raconte cette histoire. Et ses rencontres notamment avec Philippe Soupault. Un pan du patrimoine culturel français. Une démonstration que l’identité n’est qu’une invention.

« La France du jazz, Musique, modernité et identité dans la première moitié du 20e siècle », Denis-Constant Martin, Olivier Roueff, Editions Parenthèses, Marseille, 2000. Réflexions sur le jazz mais aussi sur le patrimoine commun de différents groupes ou classes sociales. Le jazz « fait la soudure ». Les intellectuels défendent le jazz et les classes populaires dansent au son de cette musique. Les années 1920-30 font la démonstration que le jazz, en France, ne connaît de barrières sociales. Une deuxième partie réunit des textes mis dans leur contexte. Un travail là encore pionnier. Une chronologie complète la première partie.

« Buddy Bolden », le premier musicien de jazz », Donald Marquis, traduit par Jean-Loup Houdebine, Denoël, Paris, 1989. Un ouvrage remarquable dans le refus de considérer la vox publica comme la vérité. Une recherche historique qui marque un tournant dans les histoires du jazz qui, pourtant, ont, toutes, du mérite et offre une vue de cette musique art de vivre. Donald Marquis retrace aussi la Ville, la Nouvelle-Orléans au début du siècle, en 1906. Une double histoire – au moins – « Buddy » Bolden, le jazz, et la Ville son urbanisme et son architecture.

« Mister Jelly Roll », Alan Lomax, Presses Universitaires de Grenoble, 1980 pour cette édition, la première a été publiée en 1964 par Flammarion, traduit par Henri Parisot. L’édition de 1980 se conclut par un texte de Jacques Réda, « La mémoire de Jelly Roll » mais ne reprend pas la préface de Sim Copans.

« Hear Me Talkin’ To Ya », traduit en français par Françoise Mallet sous le titre « Écoutes –moi ça. L’histoire du jazz racontée par ceux qui l’ont faite », Textes recueillis et présentés par Nat Shapiro et Nat Hentoff, première publication aux Etats-Unis en 1955, 1956 pour la première traduction français chez Buchet Chastel, réédition chez le même éditeur, Paris 2015, traduction revue par Guy Cosson – un travail de correction superbe et toujours inachevé – augmentée d’un lexique essentiel pour s’y retrouver dans cet ensemble et d’une préface de Jacques Réda. Des paroles de conteurs qui disent et se contredisent pour faire rouler les histoires et les légendes. (voir ma recension sur ce blog)

« Histoire de New York », François Weil, Fayard, Paris, 2000. Pour la connaissance de la ville monde, qui ne dort jamais, de ses quartiers, de son architecture.
Le film de Scorcese, « New York, New York » est une sorte de parcours dans la Ville à l’intérieur d’un espace temps bien déterminer, après la deuxième guerre mondiale. Une réflexion aussi sur la différence entre marchandise/culture et œuvre d’art.

« Les Américains. Histoire d’un peuple », Robert Calvet, Armand Colin/Civilisations, Paris, 2004. L’auteur conteste l’idée de « jeune nation » par rapport à la « vieille Europe » et commence donc par évoquer les cultures et les peuples amérindiens présents avant les vagues d’immigration. Une bonne introduction à ces Etats-Unis toujours mythifiés.

« Revoir Hollywood, la nouvelle critique anglo-américaine », présenté par Noël Burch, Nathan Université, Paris, 1993. Pour s’interroger sur des films connus et sur la méthodologie de la critique.

« Le sourire de Gary Cooper », Sophie Pujas, L’Arpenteur/Gallimard, Paris, 2017. La trajectoire d’une actrice, Clara Bow, égérie de l’Hollywood des années 1920, incarnation de l’Âge du jazz cher à Scott Fitzgerald, compagne de Gary Cooper broyé par Hollywood des années 1930.

Charles Vildrac, « Chants du désespéré, 1914-1920 », Poésie/Gallimard, 2016 sur la guerre et ses cauchemars récurrents, un auteur injustement oublié.

Ahmed Kalouaz, « Juste écouter le vent », Éditions Rouergue/La Brune, 2015, évoque son grand-père combattant de la Première Boucherie mondiale, la boue, la puanteur, les tranchées sans compter le racisme. Écouter le vent, c’est prendre le temps d’entendre le murmure du temps…

Pour avoir une idée du contexte de ces années 1930, la lecture de « Je ne mange pas de ce pain là » de Benjamin Péret s’impose. Ce brûlot – et le terme est faible – date de 1936 et a été publié aux éditions surréalistes. Réédité par Syllepse, Paris, 2010 avec une présentation nécessaire de Gérard Roche. La violence, la sauvagerie visant tous les ordres, toutes les institutions est à l’image de la période. Entre Rouge et Noir.

Robert Desnos, dans « Nouvelles Hébrides », première parution en 1927, réédité dans L’imaginaire/Gallimard, Paris, 2016 permet, via la présentation de Marie-Claire Dumas, d’appréhender les débuts du surréalisme, les rapports avec Dada et la place, essentielle, de Desnos. Lui aussi sera un des propagateurs du jazz.

« La nuit pour adresse », Maud Simonnot, Gallimard, Paris, 2017. Pour l’ambiance à Paris des années 1920, rendez-vous de tous et de toutes les créateur-e-s et pour le portrait de Robert McAlmon, grand oublié de toutes les littératures.

Paris des années 1930 à la lisière de deux moments, celui des années 1920 qui se terminent tout en restant présentes et les années 1930 en germe – la crise de 1929 n’est pas encore sensible en France -, est photographié par Brassaï qui, lui aussi, a la nuit pour adresse ; « Brassaï, le flâneur nocturne », Sylvie Aubenas/Quentin Bajac, Gallimard, Paris, 2012. Je n’en ai pas parlé parce que les photos reproduites se suffisent à elles-mêmes.

Dans la conclusion j’évoque Walter Benjamin et sa réflexion sur « Le conteur » et l’oralité comme marque du collectif face au romancier plutôt individualiste. Dans ces « Œuvres III », publié dans Folio/Gallimard, Paris, 2000, traduit par Maurice de Gandillac, Rainer Rochlitz et Pierre Rusch. Dans ce même Ouvrage, une réflexion sur « L’œuvre d’art » (deux versions) qui viennent compléter le conteur et le concept d’aura, si difficile à définir.
Catherine Géry dans « Leskov, le conteur », sous titré « Réflexions sur Nikolaï, Walter Benjamin et Boris Eichenbaum », Classiques Garnier, Paris, 2017, a poursuivi les vues de Benjamin en se penchant sur l’art particulier de Nikolaï Leskov, presque inconnu en France alors qu’il a été abondamment traduit en Allemagne ce qui explique que cet auteur serve, en partie de référence, à Walter Benjamin. Elle permet à la fois de connaître la spécificité de cet auteur dans les Lettres russes – il s’oppose à Dostoïevski et se réclame de Tolstoï – et la forme du conte russe le « skaz » qu’elle propose comme « la poétique du lien », une manière de forger un patrimoine commun entre toutes les classes sociales. Cet auteur du 19e siècle interroge notre modernité et notre manière d’être.

Nicolas