Faire parler la basse.
Sarah Murcia manie la contrebasse avec une espièglerie qui lui permet d’allier profondeur et légèreté pour, de rebondissements en rebondissements, obliger à l’écoute. Lorsqu’elle rencontre le tuba de François Thuillier, on ne sait plus qui est le ou la contrebassiste. Le tuba est aussi appelé basse à vent, c’est lui qui se fait entendre dans la plupart des premiers enregistrements du jazz. Pour « Eyeballing », un titre bien de notre époque, et supporte au moins deux traductions, « surveillance » et « à vue d’œil », manières de se jouer des apparences.
Sarah Murcia se fait vocaliste pour affirmer un poème décalé qui va du gardien – caretaker – au « Minimum » pour affirmer une esthétique – en passant par inefficient et une « volonté avec un nuage de lait », sorte de mini scène de ménage qui lui fait dire qu’elle a été forcée à chanter… pour qu’elle se mette à l’écart des grands courants d’influence des vocalistes. Déchanté pourrait-on dire pour mettre en relief paroles et musiques au service de la parole, de la conversation.
Elle entremêle les claviers prenant la place de Benoît Delbecq, lui-même passant aux bruits électroniques et aux drums d’Internet, qui fait manquer la pulsation agile de la batterie tout en convenant au projet de la chanteuse. Olivier Py, saxophoniste, vient apporter la voix supplémentaire qui manquait.
Un groupe soudé, capable de faire surgir des images de leur imagination mêlée à la nôtre.
Nicolas Béniès
« Eyeballing », Sarah Murcia, dStream distribué par l’Autre Distribution
Parler lunaire ?
Raymond Boni, guitariste et construction de sonorités étranges mais moins étranges que notre univers lui-même dialogue avec Gilles Dalbis, batteur à la technique affirmée pour construire un langage compréhensible par les Sélénites, les habitant-e-s de la lune. Une manière de rêver un autre monde et s’échapper vers d’autres cieux. Un rêve de Kenichi – One kenichi dream -, spécialiste des conditions climatiques glaciaires, serait, sans doute, que le combat contre les mutations climatiques soient plus virulent de la part des Etats.
Le duo nous introduit dans le voyage de Kenichi vers la lune et l’apprentissage d’un nouvel environnement qui n’oublie ni le blues, ni la danse ni la chanson. L’alunissage est un moment clé qui ne permet pas toujours de se retrouver.
Participez à cette conversation pour habituer votre cerveau à une langue en train de se construire.
Nicolas Béniès
« Sélénites, one kenichi dream », Raymond Boni et Gilles Dalbis, Mazeto Square