Une économie mondiale à la dérive.
La crise systémique continue d’exercer ses effets. Elle se mondialise et touche désormais tous les pays, les émergents Chine et Inde y compris. L’OCDE, Organisation de Coopération et de Développement Économique qui réunit les experts des pays les plus riches du monde, a revu ses prévisions de croissance à la baisse. Plus encore, la surproduction menace dans tous les pays capitalistes développés et, désormais, aussi en Chine.
Le rebond attendu après une profonde récession – celle qui sévit dans tous les pays capitalistes depuis 2008 – ne se produit pas. La théorie des cycles enseigne pourtant que plus la récession est importante, plus la reprise est forte… Il faut en tirer une conclusion : la crise actuelle a ouvert une période de mutation profonde, de révolution interne au capitalisme pour lui permettre de définir une sortie de sa crise Il doit inventer un nouveau régime d’accumulation. Dans un premier temps, il s’agit de détruire l’ancien avec son cortège de déstructurations sociales.
Faute de cette compréhension, les gouvernements et les grandes institutions mondiales comme le FMI s’enferment dans les dogmes les plus éculés du libéralisme. François Hollande par Macron interposé ne craint pas de s’attaquer à l’ensemble des acquis sociaux et aux droits des salariés pour favoriser le patronat sans comprendre que cette voie est une impasse. Comment croire que « la croissance est là » lorsque le taux de croissance de l’économie française, au premier trimestre 2015, est de 0,6% ? L’INSEE, c’est vrai, avait prévu… 0,4% ! Mais la différence provient de la hausse de la consommation d’énergie des ménages répondant à un premier trimestre plus froid que le dernier trimestre 2014… Pas suffisant pour faire baisser le chômage bien évidemment. En France, comme dans les autres pays capitaliste développés suivant à la fois l’INSEE et l’OCDE, la faible croissance s’explique par la baisse des investissements productifs, moteur principal d’une croissance pérenne.
Toutes ces prévisions oublient de souligner la tendance à la surproduction et à la déflation qui marquent l’économie mondiale et expliquent les faibles résultats de cette « reprise économique » sans ressort. Les prix des matières premières continuent de baisser. Particulièrement les prix alimentaires, au plus bas depuis 6 ans. Le prix du pétrole, qui a connu une timide remontée, reste inférieur de 40% au niveau atteint l’an dernier. Il continuera vraisemblablement à baisser. Les pays de l’OPEP, Arabie Saoudite en tête, ayant décidé d’augmenter leur production. Les Etats-Unis, malgré les risques connus, continuent de produire du gaz comme du pétrole de schiste exerçant une pression supplémentaire à la baisse. Globalement, dans tous les pays capitalistes développés, le taux d’inflation reste inférieur à 2%, preuve que la déflation est toujours présente malgré les politiques monétaires expansives des banques centrales. La BCE, notamment, crée 60 milliards d’euros tous les mois depuis mars 2015. Cette création monétaire comme les taux d’intérêt proche de zéro provoquent une spéculation sur tous les marchés financiers qui sont la proie d’une volatilité – en français d’une incertitude terrifiante – jamais vue.
La crise financière menace de nouveau. Le quasi-krach sur le marché obligataire en est une des prémices. Le 4 juin, le « Bund », l’emprunt à 10 ans de l’État allemand, a connu une vente massive suivi d’un début de panique sur tous les marchés financiers. Le pire a été évité. Le taux d’intérêt est passé de négatif à 0,84%. Une hausse brutale qui donne la mesure des risques encourus. Les taux d’intérêt, globalement, sont orientés à la hausse et se traduiront par de nouveaux défauts de paiement. Pas seulement et pas essentiellement pour les dettes des Etats mais surtout pour les dettes privées. Le facteur déclencheur de la crise financière d’août 2007 a été le surendettement des ménages américains. Dans tous les pays développés – à l’exception logique des États-Unis – la dette privée a recommencé à croître de manière vertigineuse en lien avec la baisse des revenus pour la classe ouvrière et les « classes moyennes ». La montée des inégalités à la fois est un facteur de crise politique et de crise économique. Seuls les 1% des plus riches sont devenus encore plus riches. Les revenus moyens se sont appauvris et les pauvres sont devenus plus nombreux et plus pauvres.
La prochaine crise financière sera plus profonde de celle d’août 2007 entraînant avec elle une possible dépression. Elle se manifesterait vraisemblablement par une crise de l’euro qui pourrait remettre en cause toute la construction européenne…
Nicolas Béniès.