Sur la situation économique, la crise systémique et la montée du chômage.
La récession en France est une réalité. La prévision du gouvernement, même revue à la baisse, de + 0,1% ne se réalisera pas. L’économie française, comme toutes les économies de la zone euro, connaîtra une « croissance négative » suivant l’expression consacrée, après plusieurs trimestres successifs de croissance zéro qui a permis de pousser des cris de triomphe : « La France n’est pas en récession »… Le chômage ne peut que poursuivre sa progression comme il le fait depuis 24 mois. Le gouvernement actuel n’en porte pas toute la responsabilité mais il n’a pas pris la mesure de la dimension de la crise que traverse les économies capitalistes développés depuis août 2007. Il n’a pas changé la politique économique.
Cette crise économique s’alimente de la baisse générale du pouvoir d’achat – sauf des 1% des plus riches – et de la hausse continue du chômage qui laisse les jeunes devant la porte du marché du travail ou les précarise. Le chômage de masse pèse sur les conditions de travail, de salaire et de vie. Il permet toutes les remises en cause des droits collectifs. Il ouvre la porte à tous les éclatements sociaux, à la montée de tous les racismes. Il se traduit par l’approfondissement des inégalités, l’accroissement de la pauvreté. (Voir l’édition 2013 de l’étude de l’INSEE sur « Les revenus et le patrimoine des ménages ».)
Le chômage institue une répartition du temps de travail imbécile. Certain(e)s – et il est juste de noter que le chômage touche désormais les hommes adultes indiquant une nouveauté, les suppressions d’emploi touchent l’ensemble de la classe ouvrière, c’est un élargissement du spectre et le chômage s’élargit aussi au secteur dit des services – ne travaillent pas cependant que d’autres travaillent trop. Réduire le temps de travail s’impose comme une nécessité à la fois pour combattre le chômage – on sait que les contrats dits d’avenir, le traitement social du chômage n’ont qu’un temps et que, de plus, ils se traduisent par la précarité – et lutter contre le stress dans les entreprises avec son cortège de souffrance au travail et de violence dans les rapports de travail. Plus encore, cette intensification du travail, cette charge de travail qui augmente par salarié(e) a comme conséquence d’obérer les possibilités du travail bien fait. La productivité du travail sur le moyen terme n’est pas à l’optimum.
Réduire le temps de travail c’est aussi permettre aux citoyen(ne)s d’exercer leurs droits.
Les politiques d’austérité – qu’elles s’appellent « rigueur » ou ne s’appellent pas – proviennent du monde d’avant la crise systémique qui touche tous les pays capitalistes développés et provoque la réflexion sur de nouveaux modèles de développement dans les pays appelés « émergents », en premier lieu en Chine. Elles sont reliées à l’idéologie libérale qui faisait de l’intervention économique et sociale de l’Etat l’ennemi principal. La crise, c’est la faillite de ce modèle, de cette idéologie libérale qui a pourri les rapports entre les individus et a fait reculer les solidarités collectives, les valeurs communes. Il serait temps d’effectuer une révolution copernicienne pour changer d’idéologie, de regard sur le monde.
C’est d’autant plus nécessaire que ces politiques ont aussi comme effet de diminuer plus encore le marché final. La surproduction ne peut que se poursuivre faute de politique anticyclique. Le changement de politique économique s’impose pour éviter que la récession ne se transforme en dépression. La plupart des économistes partagent ce constat. Le nouveau Président du Conseil italien comme une partie des élus politiques de gauche en France, comme le SPD allemand demande l’abandon de ces politiques d’inspiration libérale qui ne correspondent pas au contexte actuel. Même le FMI, via son chief economist, Olivier Blanchard, demande aux gouvernements d’abandonner cette politique de baisse des dépenses publiques. Plus encore, un étudiant du MIT a fait la démonstration de l’erreur de deux économistes du Fonds – Reinhart et Rogoff – dans leur appréciation des effets d’une hausse de la dette publique sur la croissance. Sur ce sujet, il faut le souligner, aucune étude sérieuse n’existe pour déterminer quel niveau de dette obère la croissance ou le développement ou les favorise.
Dans le même mouvement, les services publics ont besoin de création d’emplois pour remplir leurs missions.
Les collectivités territoriales – à commencer par les Régions – ont besoin de plus de crédits pour faire face aux transferts de compétence décidés par les gouvernements successifs. Agir sur le terrain local, favoriser la créativité sociale par de nouveaux droits, de nouveaux pouvoirs aux salariés devrait être une constante pour les pouvoirs publics décentralisés ou déconcentrés.
« L’impératif de la compétitivité » fait partie de la panoplie de la communication et non pas d’une analyse de la réalité de la crise. Les accords « compétitivité-emploi » bne peuvent que favorise la flexibilité du travail et la nouvelle loi dite sur la « sécurisation de l’emploi » va se traduire par l’éclatement des situations vécues par les salarié(e)s via la multiplication des accords d’entreprise. Cette « gouvernance » se traduira par la reféodalisation des rapports sociaux entreprise par entreprise s’ajoutant à la décentralisation qui, en contractualisant les relations sociales, fait éclater les droits et les devoirs territoire par territoire. « Santé et travail » d’avril 2013 fait le constat des conséquences dramatiques sur la santé des salariés de ce soi disant « impératif de compétitivité ».
Crise systémique donc globale, géopolitique et touchant tous les domaines. Crise écologique, climatique qui préexiste à la crise s’ouvrant en août 2007 et qui suppose des réponses à la hauteur de cet enjeu. Des dépenses publiques sont vitales. Le capitalisme, pour le moment, est incapable de répondre à ce défi sans les subventions des pouvoirs publics. Pourquoi ne pas utiliser ces sommes dans un service public de l’environnement ? Et créer un pôle public de financement national qui pourrait se décliner régionalement ? Les fonds dits stratégiques proposés par la région soit restent au milieu du gué, soit accepteront les critères de court terme des marchés financiers alors qu’une réplique de cette crise obscurcit l’horizon.
Crise financière donc. Sait-on que le « shadow banking » – le hors bilan des banques, le financement des hedge funds, la titrisation de manière générale – représente, suivant des estimations publiés dans le magazine l’Expansion de ce mois d’avril 2013, 640 000 milliards de dollars indiquant le risque de faillite bancaire en cas de retournement brutal des marchés ? Ces banques qui refusent à la fois les « accords de Bâle 3 » et la taxe sur les transactions financières… Réglementer le secteur financier est pourtant la seule solution.
Crise économique mais aussi sociale, politique et l’affaire Cahuzac rajoute une dimension de crise morale à cette crise de légitimité des gouvernants. Ce n’est pas seulement le mensonge c’est surtout le responsable de la politique d’austérité qui voulait échapper aux conséquences de la politique qu’il mettait en œuvre.
L’analyse de cette crise systémique devait inciter à répondre à tous les niveaux en faisant preuve d’imagination, en sortant des sentiers battus, en faisant confiance aux salariés.
On a tablé sur le « capitalisme vert », sur la Chine – le voyage du Président de la République en fait la démonstration – pour sortir de la crise… Sans effets pour le moment. Dans l’avis, le rapporteur insiste sur les « EMR », soit l’économie bleue tout en oubliant le reste. Les possibilités sont immenses. Plusieurs rapports ont insisté sur le nucléaire non pas sur sa dimension EPR mais sur les autres comme la médecine, le traitement des déchets, la fermeture des centrales… Sans oublier l’agriculture paysanne qui joue un rôle à la fois sur la protection de l’environnement et sur la santé des populations.
Il faudrait enfin discuter aménagement du territoire… Mais nous avons fait toutes ces propositions à la dernière assemblée plénière… Nous attendons les réponses…
Pour la FSU, Nicolas Béniès.