JAZZ, Diego Imbert

Couleurs du temps.

Diego Imbert fait partie de ces compositeurs tentés par d’autres cieux, d’autres métriques. Contrebassiste, il multiplie les pièges pour le batteur, en l’occurrence Franck Agulhon qui sait les entourer pour qu’ils ne se referment pas sur lui. Les références au blues des premiers titres sont à relier avec l’héritage de Ornette Coleman et sa manière de dire au revoir au blues pour mieux y faire référence et lui donner une nouvelle vie. Il ne craint pas, sur « Purple drive » une métrique à 7 temps. Pour en saisir la difficulté, il faut aller voir le film « Whiplash ». Par un filmage superbe, Damien Chazelle montre ce jeune batteur aux prises avec la mise en place des métriques singulières. Rien d’évident.
Pour son quartet, sans piano décidément à la mode ces temps-ci, il a associé les sonorités du saxophone ténor de David El-Malek et du bugle de Alex Tassel pour construire des couleurs musicales qui passent pour l’arc-en-ciel des métriques. Du 7 au 2 en passant par le 4 qui tient en trois tout en sauvegardant le rythme de la valse sous forme d’ombre chinoise.
Un album réussi qui tient son titre « Colors », des musiques qui savent construire des univers. J’ai juste un regret. L’absence de mordant, de colère, de révolte pour obliger notre monde à avouer son impuissance à susciter de la fraternité. Malgré tout, il faut reconnaître qu’on s’y trouve bien dans ces compositions mais l’appel aux maîtres du free jazz devrait aussi se traduire par un peu de « sale », de dirty.
Nicolas Béniès.
« Colors », Diego Imbert quartet, Such distribué par Harmonia Mundi.
Le quartet sera en concert au New Morning pour le lacement de l’album le 21 mai à 20h30